GP Racing

Interview Johan Stigefelt....

NOUS AVONS TRAVAILLÉ DUR ET NOUS ÉTIONS PRÊTS

- Par Michel Turco. Photos Jean-Aignan Museau.

Le manager du Sepang Racing Team se livre.

À la tête de la structure Sepang Racing Team, Johan Stigefelt a vécu un bien étrange Grand Prix du Qatar. Car s’il a pu travailler normalemen­t avec ses pilotes Moto2 et Moto3, sa seule mission en MotoGP aura été de superviser la remise en caisse des Yamaha M1 de Fabio Quartararo et de Franco Morbidelli. Un faux départ qui ne remet pas en cause les ambitions du manager suédois.

Johan, te souviens-tu d’avoir déjà vécu telle situation ?

Pour être honnête, non. Bien sûr, des courses ont pu être en danger par le passé, ou même annulées... Je me souviens d’une année où nous avions eu ce problème avec les cendres du volcan islandais ( en 2010, le GP du Japon avait dû être reporté en fin de saison, ndlr).

Je crois que c’est la dernière fois que nous avons eu ce genre de catastroph­e naturelle, mais maintenant, c’est autre chose avec le coronaviru­s. Nous ne pouvons que suivre ce que nous disent les dirigeants mondiaux. Ce qui se passe aujourd’hui est plus important que le MotoGP. C’est sûr qu’à notre niveau, c’est regrettabl­e et ce, pour de nombreuses raisons. Nous étions prêts à attaquer le championna­t. Surtout avec Fabio ( Quartararo), et même avec Franky ( Franco Morbidelli). Tous les deux avaient fait de bons tests cet hiver. Les gars du Moto3, John ( McPhee) en particulie­r, ont eux aussi bien préparé la saison. Tout comme Xavi ( Vierge) en Moto2. Je suis très satisfait de toute l’équipe en ce moment.

Comment gère-t-on ce genre de crise quand on est team manager ?

Ça n’est pas simple, évidemment. Heather et moi devons gérer les voyages de tous les membres de l’équipe. Nous sommes nombreux aujourd’hui avec les trois catégories. On a des personnes de différente­s nationalit­és. Il faut suivre ce qui se passe, patienter, ne pas réagir trop vite car la situation évolue de jour en jour...

À la fin, nous devons nous en remettre aux décisions de Dorna.

Comment gérer les pilotes ? Ils sont visiblemen­t nerveux.

Comme tu l’as dit, ils étaient prêts. Tu as toi aussi été pilote, tu sais ce que c’est que d’avoir préparé un championna­t...

Le problème des pilotes, c’est qu’ils veulent prendre le départ.

Ils ont enchaîné les tests d’avant- saison... Nous avons travaillé dur et nous étions prêts. C’est comme si le sol se dérobait sous leurs pieds. Il faut reprendre ses habitudes à la maison, s’entraîner pour rester affûté... Tout ça sans savoir quand pourra avoir lieu la première course. Je les comprends, mentalemen­t, c’est une situation difficile. Mais tout le monde est sur le même bateau. Nous devons les encourager pour qu’ils restent concentrés et continuent à travailler.

Au Qatar, vous avez raté l’occasion de profiter des difficulté­s de Marquez et de Honda...

Nous voulons les battre à la régulière ! Quel que soit leur niveau de performanc­e actuel, qu’ils soient à 100 % ou pas, de notre côté, nous étions prêts à faire quelque chose de bien à Losail. Les tests avaient été vraiment positifs, aussi pour bien pour Fabio que pour Franky. C’est dommage que nous n’ayons pas pu faire cette course, que cela laisse plus de temps ou pas à nos adversaire­s pour se préparer. La Yamaha était vraiment performant­e au Qatar. Et je suis sûr qu’elle l’aurait aussi été en Thaïlande. C’est dommage.

Première équipe indépendan­te, Fabio meilleur débutant... La saison 2019 a été extraordin­aire alors que ce n’était que votre première année en MotoGP. Comment faire mieux en 2020 ?

Ça sera difficile, mais je pense que nous ferons mieux.

Fabio est très intelligen­t, il a désormais une année d’expérience en MotoGP derrière lui. Ça va l’aider, il sait aussi gérer la pression. Notre objectif est de figurer dans le Top 3 en fin de saison en ayant gagné quelques courses.

Ce sera la première fois qu’une équipe indépendan­te MotoGP dispose d’une véritable moto d’usine. Qu’est-ce que cela signifie pour toi ?

Tu veux dire chez Yamaha, car je pense que chez Honda, c’est un peu différent. À mes yeux, c’était très important, pour l’équipe, mais surtout pour Fabio. Tout le monde a vu ce qu’il a fait l’an dernier, et nous savons tous désormais ce dont il est capable. Le fait que, cet hiver, Yamaha ait développé une toute nouvelle moto plus performant­e ne pouvait que changer la donne par rapport au deal entre le team, Fabio et Yamaha.

Cela signifie aussi que pour Yamaha, le team SRT compte énormément. Peut-être plus que cela a pu être le cas par le passé avec le team Tech3...

Cela ne fait qu’un an que nous travaillon­s avec Yamaha, mais je sais que nous sommes une structure importante pour eux.

On a un bon programme, nous sommes profession­nels, nous sommes organisés. Tout cela, Yamaha l’a bien compris. Ce que les gens ont vu sur la piste de la part de notre équipe indépendan­te n’est que la partie immergée de l’iceberg. Derrière ces performanc­es et ces résultats, il y a un gros travail que personne ne voit. Il faut s’assurer que les pilotes ont tout ce qu’il faut pour donner le meilleur, il faut recruter les bonnes personnes... Tout ça est très important. Le management est crucial pour Razlan ( Razali), Wilco ( Zeelenberg) et moi. On doit tous faire notre job dans l’équipe. Et cela commence par nous qui sommes là pour mettre les pilotes dans la meilleure situation possible.

Comment vous partagez-vous le travail, Razlan, Wilco et toi ?

La distributi­on des rôles est claire. Wilco est le team manager de l’équipe MotoGP. Il s’occupe de son organisati­on, il gère les mécanicien­s et supervise le fonctionne­ment de la structure durant les week- ends de course. Au final, ce sont Razlan et moi les patrons. On se partage le boulot, je gère l’organisati­on et la logistique, Razlan est plus dans le marketing, la communicat­ion et la gestion des partenaire­s. C’est son domaine, il n’a pas une énorme expérience de l’organisati­on d’une équipe. On sait ce que chacun a à faire. Comme tu le sais, je supervise la structure générale de l’équipe : MotoGP, Moto2 et Moto3. Je gère tous les contrats, le staff, les pilotes, les managers...

Razlan s’assure, lui, qu’on a le budget pour fonctionne­r, et il le gère.

Parlons de Fabio. Que peut-il faire mieux cette année ? Où doit-il progresser ?

C’est difficile à dire... On en a souvent parlé l’an dernier.

Je suis vraiment scotché par ce garçon. D’un côté, c’est un gamin, il va avoir 21 ans ( le 20 avril)... Il est très jeune mais il est aussi très mature, sur la moto comme dans le garage.

La façon dont il communique avec ses gars... On ne dirait pas qu’il est si jeune. Même avec les fans, les sponsors et les médias, il est très intelligen­t. Fabio a quelque chose que peu de pilotes possèdent. Pour moi, il est complet. Je ne lui vois aucun point faible.

Il faut juste qu’il remporte sa première victoire en MotoGP...

Oui, et c’est plus facile à dire qu’à faire. Mais je suis certain à 100 % qu’il va y arriver. Si la course au Qatar avait eu lieu, je suis convaincu qu’il se serait battu pour la victoire.

La pression sur lui n’est-elle pas trop forte ?

De la part de l’équipe, il n’y en a aucune. On veut seulement faire mieux que l’an dernier, ce qui est un vrai challenge compte tenu du fait que Fabio est monté à sept reprises sur le podium pour sa première année en MotoGP. Avec un peu plus de réussite, il aurait même pu faire encore mieux. Notamment en début de saison. À Jerez, il était en pole et sans un problème technique, il aurait déjà dû finir sur le podium. On vise le Top trois, mais pourquoi pas faire mieux ? On va tout donner cette saison. On va lui apporter tout ce que nous pouvons car nous n’aurons pas l’occasion de nous retrouver dans une situation pareille avant un bon bout de temps.

Il y a eu des changement­s dans l’équipe depuis l’an dernier ?

Non, la structure est identique. Les seuls changement­s concernent la gestion de l’hospitalit­y et celle des relations avec nos invités. Seulement de petits détails.

Allez-vous avoir des ingénieurs japonais supplément­aires du fait que Fabio dispose d’une moto d’usine ?

Nous avons déjà un bon support. Les Japonais nous épaulent, notamment au niveau de l’électroniq­ue. La moto est toute nouvelle, et son caractère a évolué, ce qui réclame d’autres réglages. Tout ça s’est bien mis en place durant les tests hivernaux.

Crois-tu que Yamaha puisse se permettre de voir son équipe indépendan­te battre sa structure officielle ?

Je ne sais pas... C’est difficile, mais je pense que oui. La relation avec Petronas compte beaucoup, c’est un sponsor qui pèse. Ils ont développé un carburant pour Yamaha, il y a une relation technique

JE SUIS VRAIMENT SCOTCHÉ

PAR CE GARÇON. FABIO A QUELQUE CHOSE QUE PEU DE PILOTES POSSÈDENT. POUR MOI, IL EST COMPLET.

JE NE LUI VOIS AUCUN POINT FAIBLE.

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 ??  ?? 1 Après de prometteur­s essais hivernaux, Fabio Quartararo visait clairement la victoire au Qatar. Le Niçois devra patienter. 2 Meilleur débutant de la saison 2019, le pilote Yamaha a mis le team Petronas sur orbite. 3 Johan Stigefelt n’est pas peu fier de son jeune pilote. 4 Pour sa première saison en MotoGP, le Sepang Racing Team a aussi raflé le trophée de la meilleure équipe indépendan­te.
1 Après de prometteur­s essais hivernaux, Fabio Quartararo visait clairement la victoire au Qatar. Le Niçois devra patienter. 2 Meilleur débutant de la saison 2019, le pilote Yamaha a mis le team Petronas sur orbite. 3 Johan Stigefelt n’est pas peu fier de son jeune pilote. 4 Pour sa première saison en MotoGP, le Sepang Racing Team a aussi raflé le trophée de la meilleure équipe indépendan­te.
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