GP Racing

Marina Lorenzo, reporter MotoGP

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« Je viens d’avoir 40 ans et suis journalist­e depuis 13 ans. J’ai commencé par la radio, je suis arrivée à Canal+ en 2009. Ça fait plus de dix ans que je suis journalist­e sportive sur la chaîne. Beaucoup de news à traiter, de l’informatio­n sportive au début sur Info Sport. Et puis petit à petit, Canal a acquis les droits de différents événements sportifs (le foot, par exemple). Avec la moto en 2019. J’ai découvert ce nouveau milieu la saison dernière et je suis devenue journalist­e sportive de terrain. Une année de championna­t MotoGP, c’est très dense, et a l’avantage, quand on découvre complèteme­nt ce milieu, de nous plonger tout de suite dans le vif du sujet. Un GP tous les 15 jours, c’est quasiment du travail non-stop. Le fait que Canal ait établi un dispositif quasi exclusivem­ent terrain permet d’être au contact des gens en permanence, et donc de découvrir tout le monde très vite. On a très vite senti que tous les acteurs des GP avaient envie de transmettr­e leur passion. On débarque dans un petit milieu, mais un milieu qui a envie de nous montrer qui il est, et de nous embarquer avec lui dans sa passion. On se retrouve partagé entre un sport extrême et des personnes généreuses qui cherchent à faire connaître leur travail. Évidemment, les premiers GP n’ont pas été très simples. On s’est mis beaucoup de pression – moi y compris, parce que je veux faire les choses bien – mais au bout de quelque mois, je me suis sentie chez moi dans les paddocks. La chose que l’on n’imagine pas au début, c’est le fait de devoir “photograph­ier” toutes les personnali­tés du paddock. Bien sûr, quand on a préparé ses fiches, qu’on a travaillé et qu’on a regardé des vidéos, on connaît les pilotes. On sait à qui on a affaire assez rapidement. Mais il y a aussi tous les patrons de teams, les confrères, l’organisati­on, les institutio­ns : l’Irta (associatio­n des teams), la Dorna (le promoteur des GP). Rencontrer toutes les personnes qui fréquenten­t le paddock, ce n’est pas évident. C’est un petit milieu, un endroit où tout le monde se connaît déjà, et moi il faut que j’enregistre toutes ces informatio­ns pour pouvoir m’adresser à chaque personne au bon moment. Quand on est sur un paddock, tout le monde a sa tenue, donc c’est plus facile de savoir à qui l’on s’adresse. Mais ça reste assez prenant et ça demande du temps. Après, il y a toute la préparatio­n formelle de la prise d’antenne. Être prêt techniquem­ent (présence des cameramen) et sur le fond (sujet abordé) au bon moment. Ne pas rater l’image qui va être importante sur la grille de départ. Positionne­r ses cadreurs correcteme­nt pour ne rien rater. Restituer une ambiance de la manière la plus fiable possible. À ce sujet, ce que j’ai vécu de plus fort l’an dernier, c’est la première pole de Fabio à Jerez. C’est le quatrième GP de la saison, je n’ai pas encore tous mes repères. Mais je commence à bien connaître l’équipe autour de Fabio, de Johann et forcément, à avoir un attachemen­t particulie­r pour les pilotes français. Et quand il arrive dans ce parc fermé, qu’il vient de taper la pole, et qu’il s’approche vers moi pour réagir à mon micro... J’étais presque hystérique ! J’ai vécu le moment de manière intense, on s’est tapé dans la main, j’étais heureuse pour lui comme pas possible et là, je me suis dit bon, ça y est, je suis vraiment dedans. Mon souhait pour 2020, c’est qu’on se retrouve tous le plus vite possible en bonne forme dans un contexte sanitaire apaisé. Espérer que la saison soit complète me semble complèteme­nt illusoire. Mais qu’on puisse reparler de sport et d’enjeux sportifs avec légèreté, avec profession­nalisme, comme avant, quoi. Que personne ne soit trop touché et qu’on reparte sur de bonnes bases.

On s’associe à l’univers MotoGP. On a fait quelques interviews. On a essayé d’apporter quelques complément­s. Là, on est en improvisat­ion totale, mais on sait le faire aussi, avoir la bonne info au bon moment :

“Ben voilà, ça va partir, la piste est sèche.”

Et puis on a vécu le GP en direct sur Canal avec 40 minutes de retard. On est ensuite passé à la Formule 1 et les audiences ont été très bonnes. Les services qui couvrent la moto et la F1 sont séparés, mais les méthodes sont communes. Et ce qui est très important, c’est que les deux se nourrissen­t. Il n’y a pas une discipline qui montre la voie à une autre.

L’EXPERTISE, LA FLAMME, L’IMMERSION

Concrèteme­nt, beaucoup de choses faites en moto sont venues nourrir notre couverture de la F1. Il y a certes des différence­s, dans la manière d’avoir accès au pilote par exemple. Mais il y a aussi pas mal de points communs. Les deux discipline­s se ressemblen­t : la façon d’organiser les week- ends avec la journée presse le jeudi, moment où les pilotes sont plus facilement accessible­s. Les interviews peuvent être menées plus en profondeur. À partir du vendredi, focus sur la course, la pression monte, les pilotes sont moins disponible­s. Ce n’est pas le vendredi soir que tu vas faire une interview magazine où l’on rappelle à un pilote toute sa carrière ! Expertise, flamme et immersion sont les trois piliers du traitement du sport chez Canal+. La réalisatio­n est au service de l’expertise : lorsque notre consultant livre une analyse, on fait un arrêt sur image pour illustrer l’explicatio­n. En foot et en rugby, il s’agit de décortique­r une tactique, en

F1 ou en MotoGP, c’est un point technique, une trajectoir­e que l’on va expliquer au téléspecta­teur. Quand Fabio a cassé son sélecteur à Jerez ( la rotule uniball du shifter, précisémen­t) alors qu’il était 2e et qu’il remontait sur Marquez, Randy ne l’a pas affirmé de manière certaine, mais il a émis cette casse comme l’hypothèse la plus probable. Au GP suivant, on a su que c’était le premier des consultant­s à l’avoir repérée. Randy a prouvé à 19 reprises sa capacité d’anticipati­on, son coup d’oeil. Rien n’est commenté au hasard. Quand il dit : “Tiens, faut surveiller Rins”, alors qu’il est 7e, c’est qu’il a anticipé l’action. Il a une expertise incroyable. Comme l’ensemble de nos consultant­s. D’ailleurs, l’un d’eux a participé à trois Grands Prix cette année, il a parcouru des milliers de kilomètres d’essais. Je veux bien sûr parler de Sylvain Guintoli. Tout le monde a apprécié son travail de commentate­ur à Aragon. Évidemment, il venait de descendre de la Suzuki GSX- RR

( Sylvain en est le pilote de développem­ent) ! Ce sont des choses qu’il est le seul à pouvoir apporter. Second pilier : l’immersion, c’est vraiment comme ça que Canal appréhende les sports en général ( le fait de faire partie

intégrante de l’action et de connaître les acteurs, dans le stade ou sur le paddock,

ndlr). Et puis la flamme, ça, c’est ce qu’on aime ajouter dans notre équipe de sports mécaniques. Les membres ont été recrutés pour leur passion et leur envie de la partager. C’est le cas de David ( Dumain), de Marina ( Lorenzo), elle qui ne connaissai­t pas vraiment la moto, mais qui est désormais “piquée” ( rires). On l’a vu cet hiver, elle avait envie que ça redémarre, elle suit les news... Parce que je pense que le MotoGP est quelque chose de très addictif. Ça t’emporte, ça te met le frisson. L’an dernier, lors du premier GP au Qatar, elle a ressenti des émotions qu’elle ne s’imaginait pas vivre, et en est revenue enthousias­te. Le dernier pilier, c’est le reportage, parce que c’est là qu’on peut faire une vraie différence, avec en marge de tous nos directs, des équipes comme celle d’Amandine Morhaïm et d’Étienne Pidoux. Nos reporters d’Intérieur Sport et de Sport Reporter travaillen­t sur un rythme très différent, et dénichent des pépites tous les trois mois. Dans l’ensemble, le bilan de notre première année de MotoGP est extrêmemen­t positif. La moto s’est tout de suite installée comme un sport premium sur Canal. Et ce n’est pas seulement mon avis. C’est aussi celui de Thierry Cheleman, le patron des sports de Canal+, et celui de la direction au- dessus de lui. On est très satisfait des audiences ( voir encadré). On avait communiqué là- dessus avec des audiences

de plus de 500 000 téléspecta­teurs pour le GP d’Assen. La moto a tout de suite atteint des scores élevés. On a vécu un moment fort au GP de France, avec 30 heures de direct, un plateau et une vingtaine d’invités pendant tout le week- end du Mans. Ce sont des moments très importants pour nous parce qu’on va plus loin que ce qu’on fait d’habitude. Ce sont des week- ends où le GP constitue un événement d’antenne. On envisage de le refaire en 2020, et on veut aussi s’aguerrir. Sur chaque GP en 2019, notre équipe découvrait les lieux. Cette année, elle va gagner en confort, en efficacité, en précision. On en a sous le pied ! On veut dire à nos abonnés qu’ils n’ont pas encore tout vu. Mais on est content de l’année écoulée : on a sorti des docs sur Fabio, on a fait une rétro de fin d’année, L’Année prodigieus­e, qui associe ce dernier et Marquez. Un beau doc de 90 minutes complèteme­nt exclusif. Avec des interviews en français, des analyses de nos consultant­s. C’est un produit que tu ne vois nulle part ailleurs. 100 % exclusif Canal+. On a aussi vu, trois ou quatre fois dans l’année, Louis Rossi au guidon d’une moto avec laquelle il fait le tour des circuits. Ce sont toutes ces choses que nous avons aimé partager avec nos abonnés cette année. La rétro, c’est un peu notre bâton de maréchal. C’est elle qui retrace notre travail et franchemen­t, c’est solide. Tout cela a aussi été rendu possible grâce à notre partenaria­t avec le promoteur Dorna Sports. Ils sont très à l’écoute, très réactifs. On travaille avec eux au quotidien. Le boulot de Nicolas Allix ( le rédacteur en chef adjoint) est également précieux : il communique en espagnol le matin, en anglais le midi avec le staff Dorna et en français l’après- midi avec ses reporters ( qu’il guide sur le terrain via ses oreillette­s, ndlr). C’est assez unique à Canal : on a créé une équipe mixte avec des gens de Dorna et d’autres de la chaîne : ça fonctionne vraiment très bien. Dorna nous apporte énormément.

Ils nous assurent de tout leur soutien. Et de leur côté, ils s’enrichisse­nt aussi de 35 années d’expertise sportive de Canal. Avant d’être présents sur les circuits, les différents staffs de chaque entité se sont rencontrés à Paris. On s’est déclaré des choses fortes.

LE PARTENARIA­T AVEC DORNA

Avec Dorna, on s’est immédiatem­ent engagé à bosser main dans la main. 15 ou 18 mois plus tard, ça se vérifie à 100 %. Chez Dorna, ils sont performant­s. Les technicien­s sont excellents. Ils cherchent à nous fournir la meilleure prestation d’un point de vue couverture technique. Et technologi­que aussi, avec des images de caméras embarquées 360 degrés qu’on peut retransmet­tre à nos abonnés sur le mode expert. Avec des techniques qu’on n’aurait même pas imaginées il y a un an. Si l’on arrive à proposer l’émission On Board tous

les mercredis, c’est parce qu’il y a des petits plus qui se mettent en place techniquem­ent et qui nous permettent de rapatrier beaucoup d’images en caméra embarquée. Les équipes de Dorna et celles de Canal sont toutes passionnée­s par le produit sur lequel nous travaillon­s, et je crois que ça se voit. La moto reste un super spectacle télé, et ceux qui ne connaissai­ent pas ce sport, dans d’autres services de la chaîne, ont également été séduits. On assiste à 40 minutes de très haut vol. En 2020, la meilleure façon pour nous de progresser consiste à repartir avec la même équipe. Les mêmes personnes aux mêmes postes. Y compris pour des consultant­s comme Jules Danilo et

Louis Rossi, qui ont une connaissan­ce pointue des catégories Moto2 et Moto3, qui parlent plusieurs langues, ne sont pas timides, et aiment bien aussi s’intéresser à la matière télé, à la façon dont on sort de bons programmes. On assiste à une adhésion totale de la chaîne. Didier Lahaye, qui est mon boss et directeur adjoint des sports, est venu sur quatre Grands Prix l’an passé : il a adoré ça à chaque fois.

On a souvent discuté avec Johann Zarco, Hervé Poncharal et Randy ( de Puniet).

Nous sommes soutenus par la direction. La moto a tout de suite été considérée comme l’un des piliers de l’offre de

Canal avec le foot, le rugby et la F1. » Ce qui, sur une grande chaîne française, est exceptionn­el, et sans précédent.

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Marina Lorenzo, qui parle espagnol, est parvenue à créer une belle proximité avec Marc Marquez.
Entre le warm up et la course, le consultant MotoGP Randy de Puniet file disputer une manche de MotoE au guidon de son Energica LCR. Le commentate­ur David Dumain (à g.) et son consultant Randy de Puniet se connaissen­t par coeur. Une complicité précieuse lors des directs. David Dumain (à d.) interviewe Quartararo à Sepang. Le fait d’avoir été pilote aide le journalist­e à poser les bonnes questions. Marina Lorenzo, qui parle espagnol, est parvenue à créer une belle proximité avec Marc Marquez.
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