Coupe du monde MotoE.......
Avec un débutant pour nouveau champion, la Coupe du monde Moto E confirme sa démocratisation. Un signe encourageant pour Nicolas Goubert, le patron de la moto électrique.
Jordi Torres s’impose au Mans.
Il faut le reconnaître, question suspense et spectacle, le MotoE a, cette année, été à la hauteur. Malgré la crise du Covid- 19 qui a bousculé son calendrier, la deuxième édition de la Coupe du monde de motos électriques a proposé des courses animées, et au final, un champion inattendu. Arrivé au Mans en troisième position au classement général avec sept points de retard sur le leader et tenant du titre Matteo Ferrari, Jordi Torres était en effet loin de faire figure de favori. « Je misais plutôt sur un duel entre Aegerter et Ferrari, reconnaît Nicolas Goubert, le directeur de la compétition.
Mais une fois encore, nous avons eu quelques surprises... » L’Italien étant parti à la faute et le Suisse ayant été pris dans un carambolage, c’est finalement l’Espagnol qui a tiré les marrons du feu en remportant la première des deux courses organisées dans le cadre du Grand Prix de France.
Une sixième place dans la deuxième lui a suffi pour remporter le titre. Immédiatement à l’aise au guidon de l’Energica, Jordi Torres était monté sur le podium dès l’ouverture de la saison à Jerez. Il avait ensuite remis ça à Misano en terminant deuxième et troisième des deux courses organisées sur le circuit italien. Sa victoire au Mans a parfaitement conclu sa première saison en MotoE.
Jusque- là, le pilote du team Pons avait un peu fait parler de lui en Moto2 – victoire au Grand Prix d’Allemagne 2013 –, ainsi qu’en Superbike, où il avait récemment essayé de relancer sa carrière avec le team Pedercini. Le MotoE lui a permis de consolider son palmarès. « Le fait que Torres se soit vite adapté à la catégorie est une excellente nouvelle, se réjouit Nicolas Goubert. Cette année, nous avions 8 débutants sur dix- huit engagés ( Torres, Aegerter, Tulovic, Zaccone, Medina, Marcon, Kornfeil et Cardelus) et deux d’entre eux se sont battus pour le titre alors que nous n’avions pu organiser que quatre journées de test avant le début de la compétition. L’an dernier, cela avait été beaucoup plus difficile, de nombreux pilotes avaient eu du mal à s’adapter à la moto.
Cela signifie que l’Energica a évolué dans la bonne direction, même si les changements n’ont pas été si nombreux. »
LE MOTOE, TREMPLIN VERS LE MOTO2
En gros, 10 % de couple en plus, un meilleur refroidissement de la batterie qui permet de gagner un tour aux essais, de nouveaux réglages d’hydraulique pour la fourche et une construction de pneu arrière identique à celle utilisée en MotoGP. « Seul le choix de gomme était bien évidemment différent du fait de courses beaucoup plus courtes, précise Nicolas Goubert. Dès la première course à Jerez, nous étions une seconde et demie plus vite que lors des tests que nous avions réalisés l’an dernier sur ce même circuit. » Pour le reste, difficile d’établir des comparaisons, le MotoE ayant dû se
contenter d’arpenter trois circuits : Jerez, Misano et Le Mans. « Nous n’avons pas pu aller à Assen – le Grand Prix étant annulé – et en Autriche car il y avait la Red Bull Rookies Cup et nous étions soumis à des mesures de restriction dans le paddock. Nous avons malgré tout réussi à organiser cinq week- ends de course. Compte tenu des circonstances, je pense que nous pouvons être satisfaits de l’évolution de notre championnat. On a eu de belles bagarres, cinq vainqueurs différents... Et nous avons réussi à maintenir 7 épreuves. »
Après deux saisons, le profil type du pilote MotoE commence à s’affiner. « Il y a eu un vrai renouvellement du plateau cette année, détaille Nicolas Goubert. Pour lancer cette Coupe du monde, nous avions fait en sorte l’an dernier d’avoir des noms connus du grand public, d’anciens pilotes MotoGP, Randy de Puniet, Sete Gibernau, Mike Di Meglio, Bradley Smith... Cela nous a permis de donner de la crédibilité à une discipline alors inconnue. Cette année, nous avons eu
« CETTE COMPÉTITION VA ÉVOLUER MAIS IL FAUT LUI LAISSER DU TEMPS »
NICOLAS GOUBERT
des jeunes qui lui ont donné un autre élan. Des jeunes qui estiment que le MotoE peut jouer un rôle de tremplin pour passer en Moto2. Ils considèrent que le MotoE peut leur donner de la visibilité en profitant du fait d’avoir le même matériel que les autres, ce qui est un gage de compétitivité. Hector Garzo, qui a retrouvé cette année un guidon en Moto2, en est un bon exemple. » Pour briller aujourd’hui en MotoE, un pilote doit tout de même posséder une certaine expérience des circuits, le temps passé en piste étant des plus réduits. « C’est vrai, reconnaît le patron de la compétition. À chaque épreuve, on a seulement trois séances d’essai durant lesquelles les pilotes ne peuvent boucler que 8 tours. Ça laisse peu de temps pour régler la moto. » En piste, l’Energica demande calme et précision. « Avec une moto lourde, les freinages sont toujours compliqués. Une trajectoire mal engagée sera tout de suite plus difficile à corriger. Il faut donc être précis et ne pas trop avoir le sang chaud pour ne pas faire d’erreur. D’autant qu’avec des courses très courtes, il est toujours plus difficile de regagner du terrain quand on en a perdu. » À côté de ça, il ne faut pas non plus trop hésiter au moment de doubler.
« Il faut être effectivement percutant sur les dépassements, reprend Nicolas Goubert. C’est ce qui a, cette année, été la force d’un pilote comme Aegerter. Tulovic était souvent rapide lors de la E- Pole mais, trop hésitant en course, il n’a pas toujours concrétisé. »
UN FORMAT DE COURSE ADAPTÉ À SON PUBLIC
L’an prochain, avec une pandémie de Covid- 19 qui s’enkyste, la Coupe du monde MotoE ne devrait pas connaître de grosses évolutions. Peut- être un tour de plus en course grâce à de nouveaux chargeurs qu’il sera possible d’utiliser sur la grille de départ pour compenser l’énergie perdue dans le tour de formation. Mais pour la réduction du poids des batteries d’une machine qui accuse aujourd’hui 260 kg sur la balance, il faudra encore patienter. « Cette compétition va évoluer mais il faut lui laisser du temps, estime Nicolas Goubert. Pour l’instant, le promoteur est satisfait du spectacle proposé. Il faut continuer à travailler pour avoirs des courses disputées comme cela a été le cas cette saison. Pour beaucoup de gens qui regardent tout ça derrière leur télé, il n’y a pas de grande différence entre une course de motos électriques et une course de motos conventionnelles. À nous de faire connaître le MotoE plus largement. Même si ça ne va pas plaire aux anciens, le format du petit quart d’heure est adapté aux habitudes d’un jeune public de plus en plus impatient et enclin à zapper. J’espère tout de même que nous aurons des épreuves plus variées en termes de circuit, mais cela dépendra d’un calendrier MotoGP difficile à établir compte tenu des circonstances. »