Le + audacieux massimo Bottura osteria francescana • modène • italie
LE Business DES 50 BEST François simon
Célébrée l’an dernier au Pérou, l’édition sud-américaine aura lieu cette année au Mexique. « Cinq millions d’euros ont été versés par le gouvernement pour accueillir l’événement, affirme le diplomate. En contrepartie, un certain nombre de leurs tables devraient figurer au classement. » Invité à réagir à ces accusations, le groupe Reed a renvoyé GQ vers William Drew, qui nie en bloc toute magouille. « Lorsque nous nous sommes installés à Singapour pour les Asia’s 50 Best, nous avons passé un deal avec l’office de tourisme : une bourse contre l’organisation de l’événement et un programme éducatif à destination des étudiants en écoles de cuisine du pays. À aucun moment nous n’intervenons dans le processus de vote. D’ailleurs, depuis la création du classement asiatique en 2013, aucun chef singapourien n’a fait mieux que la cinquième place. » Soucieuse de faire taire les critiques, l’organisation a pour la première fois mandaté un auditeur indépendant chargé de vérifier la validité de la prochaine élection, dont les résultats seront rendus publics lors d’une grande cérémonie, le 1er juin, au Guildhall, à Londres. Délivré de la langue de bois diplomatique, Philippe Faure parle beaucoup et franchement, d’« Alain » (Ducasse), de « Charles » (Reed, le patron du groupe), et quand il évoque la « botte secrète » que la France dégainera en cas de résultats décevants, c’est avec l’excitation du gamin qui sait qu’il va bientôt tester son nouveau jouet. « Tout ça ressemble un peu à du Madoff, résume-t-il. Les Anglo-saxons font preuve d’une volonté délibérée de nous décrocher du palmier. On va se battre, leur montrer qu’on n’est pas que des vieux papys. » On n’en saura pas plus sur la riposte, qu’on imagine être un contre-classement, le rapport du Conseil préconisant « la publication d’un guide mondial des étoilés ».
la théorie du complot Pour ce qui est des accusations d’escroquerie, Philippe Faure nous recommande d’appeler le journaliste allemand Jörg Zipprick, qui enquête depuis plusieurs années sur les 50 Best. Quoique séduisante, sa démonstration manque de preuves. Partant du double constat que les chefs distingués défendent une cuisine à la technicité innovante, et que le groupe William Reed Business Media publie des revues spécialisées à destination des professionnels de l’agroalimentaire, il en déduit que les 50 Best sont bidouillés de façon à récompenser des chefs acquis à la cause de l’industrie. « Les gens des 50 Best ne sont pas des escrocs, tempère François Simon, critique gastronomique et ancien responsable du classement pour la France. Juste une nomenklatura composée de doux dingues de la bouffe qui partagent les mêmes amis, les mêmes valeurs, prennent les mêmes avions pour se faire arroser dans les mêmes restaurants. » Autrement dit, pas besoin de tricher, il suffit de nommer des responsables de région sensibles à la cuisine d’avantgarde, qui eux-mêmes composeront leur panel en piochant dans leur réseau. Les critères de choix retenus par le chef du collège français Andrea Petrini, connu pour son irrévérence et son aversion pour le Michelin, sont à ce titre éclairants : « Pour composer le jury, j’évite les gros cons, les profiteurs, et je choisis des personnes qui voyagent beaucoup, et ont une vision plus ouverte que le gastronome conservateur ou le foodie parisianocentré qui ne sort jamais du XIE arrondissement. » Des gens qui lui ressemblent, en somme. Philippe Faure regarde sa montre. Dans cinq minutes, une journaliste de RFI doit l’interviewer sur l’initiative de Good France. « Vous en avez entendu parler, j’espère? », s’enquiert-il. L’espace d’une journée, le 19 mars, plus de 1000 chefs répartis sur les cinq continents ont servi un dîner « hommage à l’excellence de la cuisine française ». « Enfin la France réagit, se félicite Nicolas Chatenier, consultant en communication spécialisé dans la gastronomie. Il faut qu’elle se montre, qu’elle joue le jeu. On ne peut plus se permettre d’attendre qu’on vienne nous chercher. » « Cette initiative va dans le bon sens », renchérit, fair-play, le patron des 50 Best William Drew. Avant de tirer la couverture à lui: « Je me réjouis que le classement ait poussé la France à adopter un mode de communication moderne. J’espère maintenant que nous allons pouvoir collaborer davantage. » Philippe Faure sourit. « Nous en reparlerons après le 1er juin. »
répartis à travers le monde votent pour
leurs restaurants préférés. « il n’y a pas d’algorithme compliqué », soutiennent les organisateurs. La liste finale est obtenue après simple
addition des votes.
le Carré Idéal Qu’ils viennent occasionnellement (Rafael Nadal, Leonardo Dicaprio, François Hollande, Sepp Blatter, Beyoncé, Jay Z), régulièrement (Anne Hidalgo, Jamel Debbouze, Nicolas Sarkozy, Arnaud Lagardère, Patrick Bruel), ou qu’il ne soit encore jamais venu (Mark Zuckerberg), voici les personnalités que les actionnaires qataris rêvent de réunir lors d’une même soirée autour de Nasser Al-khelaïfi.
Jay Z et de son agence sportive Roc Nation Sports pour Neymar, le prodige brésilien du Barça. « Les gens qui les entourent savent qu’il y a des choses excitantes à vivre à Paris, et un match au Parc des Princes en fait désormais partie », vantent des proches du club, dont les représentants ont refusé de s’exprimer sur cet influent cénacle. La présence du couple glamour a mis un coup de projecteur sur l’endroit. Le Paris SaintGermain, vainqueur 3 buts à 2 ce soir-là, capitalise sur l’image. Le club ira même jusqu’à vendre aux enchères, au profit de sa fondation, la réplique du pull porté par la chanteuse pour l’occasion. Le tricot est parti à 16000 €.
rêver « plus grand » La composition du carré paraît presque aussi cruciale que celle de la feuille de match. Chaque rencontre déclenche le même rituel. La presse veut savoir qui sera de la partie. Au pied des gradins, les photographes traquent les célébrités. Les caméras de télévision balayent le secteur et les spectateurs alentour sont prêts à dégainer leur smartphone. C’est qu’il ne faudrait pas manquer la furtive poignée de mains entre Nicolas Sarkozy et Manuel Valls, la mine béate du PDG de Free, Xavier Niel, ou Leonardo Dicaprio caché sous son béret. Plus difficile à repérer, le geek Kevin Systrom, patron d’instagram, venu assister le 4 mars 2015 au quart de finale de Coupe de France contre L’AS Monaco. Pour le club de la capitale, ces grands noms représentent une vitrine alléchante. C’est bon pour le business, la « marque », le « projet », ces mots qui ne quittent plus les lèvres des actionnaires qataris depuis leur arrivée en 2011. Au même titre que les Ibrahimovic, Thiago Silva et Cavani, les tournées en Chine et au Maroc, les produits dérivés vendus du Brésil au Japon et la collection de luxe développée avec le magasin Colette, ce morceau de stade aide à rêver « plus grand », comme le dit le slogan. Le carré devient l’équivalent d’une générale de théâtre, d’un nouveau restaurant étoilé ou d’une boutique à la mode, le ToutParis s’y presse. Pour les très gros matchs, comme ceux de Ligue des Champions, le Paris Saint-germain enregistre parfois plus de 800 demandes. Deux salariés à temps plein les étudient, s’occupent de faire le tri, sollicitent d’autres invités potentiels. Un Tunisien de 35 ans, qui n’apparaît sur aucun organigramme officiel, supervise leur travail. Il s’appelle Adel Aref. Ami et chef de cabinet de Nasser Al-khelaïfi, cet ancien arbitre international de tennis a officié lors de plusieurs finales de tournois du grand chelem, à Roland-garros ou Wimbledon. Habitué du
a les trois rangs protocolaires Au-dessus de l’entrée de la tribune trônent trois rangs de dix-neuf places chacun. C’est la zone la plus prestigieuse et officielle, dont Nasser Al-kelhaïfi constitue l’épicentre. Autour de lui peuvent se retrouver les hommes politiques ou d’affaires les plus en vue (Sarkozy, Valls, Niel, Bompard, Arnaud Lagardère, etc.), la maire de Paris, les autorités du football, des patrons de chaînes de télé ou encore les membres du conseil d’administration du club et d’anciens présidents. Tout à gauche, quelques sièges sont réservés à l’équipe visiteuse.
b invités Au pied de ces trois rangs, s’étalent deux blocs de 49 places chacun. Le premier, à gauche, accueille les « invités » haut de gamme. C’est là que les sportifs et anciens sportifs, les vedettes du show-biz français ou international suivent la partie, comme l’ont fait Jay Z et Beyoncé. de communiquer ces informations. Orange détient cinq invitations par rencontre, le PMU en a trois. « On s’en sert pour faire des relations publiques, admet un cadre. Sur les gros matchs, c’est le PDG qui vient avec ses invités. »
d la tribune officielle En haut du Carré, derrière une rambarde vitrée, une dizaine de rangs dessinent ce que l’on appelle la Tribune Officielle (TO), que certains surnomment la « tribune des frustrés ». On y trouve les personnalités de « second rang ». Les politiques acceptent mal d’y être relégués. « Pour certains, c’est presque une insulte à la République », se marre un ancien du ministère des Sports. En 2014, Nathalie Kosciusko-morizet, candidate aux municipales à Paris, aurait eu du mal à supporter d’y être exilée alors que sa rivale Anne Hidalgo, déjà adjointe au maire, figurait au sein des trois rangs protocolaires.