GQ (France)

Social network, par Vincent glad Chat mignon, j’écris ton nom

Plus incorrupti­bles que les lanceurs d’alerte, plus puissants que les printemps arabes… Les chats mignons des réseaux sociaux sont les fers de lance de la démocratie. Si, si. Ce spécialist­e de la culture web, aujourd’hui installé à Berlin, écrit pour GQ,

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Banksy maîtrise le buzz encore mieux que son pinceau. Alors quand, en février, le street artist britanniqu­e a taggué un chaton géant dans les ruines de Gaza, j’ai écouté attentivem­ent sa leçon d’internet : « Je voulais mettre en lumière la destructio­n de Gaza en publiant des photos sur mon site. Mais sur Internet, les gens ne regardent que les images de chatons. » Le piège était parfait : le chaton a fait effectivem­ent le tour du monde et Gaza a grappillé quelques secondes de cerveau disponible. Dans la « guerre pour l’attention », cette denrée de plus en plus rare sur l’internet, le chat mignon est l’arme fatale. Pour nous retenir pendant ses programmes du soir, le TF1 des années 1980 avait pour habitude de promettre des femmes à poil dans son teasing avant la publicité. L’internet se montre à la fois plus civilisé et plus asexué en remplaçant les paires de seins par de petits chatons.

Mais les félins ne sont pas que des appeaux à clics, ils jouent aussi un véritable rôle politique. Le chercheur américain Ethan Zuckerman développe depuis quelques années une « théorie du chat mignon », capable de faire le lien entre les révolution­s arabes et les vidéos de chats. Selon lui, les internaute­s sont moins intéressés par l’activisme politique que par les animaux trop cute. Les outils développés pour permettre la circulatio­n de ces contenus sont autant de supports permettant d’aider les activistes dans des dictatures où la liberté de la presse est bafouée. Youtube n’a pas été développé pour accueillir des vidéos d’opposants égyptiens massacrés par l’armée, mais c’est le succès du LOL qui a rendu possible leur large médiatisat­ion. Surtout, ces outils deviennent très difficiles à contrôler grâce au bouclier anticensur­e formé par les chats mignons. Couper le robinet Youtube dans un pays, c’est supprimer des milliers de vidéos d’animaux, ce qui a un coût politique très fort. La population reste moins indifféren­te à la censure d’un réseau grand public qu’au blocage d’un site d’activistes. En 2008, le gouverneme­nt tunisien a tenté de bloquer Facebook pendant une semaine, avant de renoncer face à un mouvement populaire. Trois ans plus tard, le réseau social sera en première ligne lors de la Révolution de jasmin.

Les chatons sont les gardiens de la démocratie Internet, ils gardent la place au chaud quand il ne se passe rien de grave, comme une armée de réserve capable de se mobiliser quand l’histoire s’accélère. Le web est une place Tahrir qui ne désemplit jamais, car les chatons veillent. La Chine a d’ailleurs développé une stratégie dans ce sens. Puisque les internaute­s veulent des vidéos d’animaux, le régime bloque les réseaux sociaux mais encourage dans le même temps la création d’ersatz locaux, lavés de tout risque de contestati­on politique et remplis de contenus mignons. Du pain et des chatons, et le peuple sera content.

Sous ses airs inoffensif­s, le chat mignon serait-il en train de devenir malgré lui un rempart contre la violence politique ?

Le web est une place Tahrir qui ne désemplit jamais, car les chatons veillent.

« J’étais à New York quand le rap et la dance music ont éclos ; on achetait des grosses baskets downtown que je portais avec des costumes très colorés. L’album Trouble (1990) essayait d’amener les samples dans la chanson, mais ça n’a pas très bien marché… Je suis revenu au piano, costume gris et col roulé. » « J’écoutais Bowie et Talking Heads. Ma meilleure amie, Laurence Heller, était styliste à Elle, et c’était la femme de Jean-baptiste Mondino qui réalisait mes pochettes… On traînait au Palace. Helmut Lang, Kenzo ou Dries Van Noten, qui démarraien­t, avaient besoin des artistes pour communique­r. » « Mes premiers 45 tours n’avaient pas marché et quand Claude François m’a proposé de rejoindre son label, c’était tentant. Il était intelligen­t, efficace. Il pensait qu’il fallait faire le show, s’inspirer des artistes de soul américaine, avoir des costumes de scène spectacula­ires. Après les pattes d’éph, les vestes en velours à larges revers… Disons que c’était une parenthèse de quatre ans (1972-1975) durant laquelle je me sentais un peu en porte-à-faux. »

ALAIN CHAMFORT

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