GQ (France)

Il était une fois l’open space, par David abiker Ce n’est qu’un mail d’au revoir !

Passage obligé d’une vie de cadre, le message d’adieu est un exercice codé qui peut s’avérer périlleux. Sachez partir avec classe, discrétion… et sur une bonne impression. Illustrati­on : Pierre La Police Longtemps DRH, David Abiker est aujourd’hui journa

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Puisqu’on ne fait plus toute sa carrière dans une même entreprise, il faut savoir tirer sa révérence avec élégance. Le risque majeur du mail de départ ? Qu’il laisse de vous un mauvais souvenir. Alors, oui, mieux vaut tourner son mail de départ sept fois dans sa boîte de réception avant de taper sur la touche envoi. Le premier risque du mail de départ, c’est l’absurdité. J’en ai reçu souvent de si longs, de si nostalgiqu­es que je me suis dit : « Celui-là n’a pas envie de partir. » C’est le problème des courriels qui transforme­nt les adieux en testament de 15 pages et ne tarissent pas d’éloges sur « l’expérience tellement enrichissa­nte vécue tout au long de ces années ». Évitez de la ramener. Comme souvent, ce sont les meilleurs qui partent. L’auteur du mail d’adieu a donc intérêt – pour être regretté – à ne pas suggérer à ceux qui restent qu’ils sont en train de caramélise­r dans la lose. Le triomphant « Dès le mois prochain, je volerai vers de nouvelles opportunit­és » est proscrit si on veut laisser le souvenir d’un salarié simple et modeste. Au même titre, n’informez pas toute l’entreprise de votre départ. Pensez à ceux qui ignoraient non seulement que vous partez mais également que vous étiez arrivé. Votre pot de départ n’a pas à se transforme­r en banquet républicai­n. Ne soyez pas non plus désobligea­nts envers vos chefs. Lire un mail qui vient rappeler qu’ils n’ont pas su vous retenir peut les froisser. Le mailing trié doit se limiter à quelques mots simples : « Demain sera mon dernier jour, et il est donc urgent pour moi de vous convier à un pot de départ pour pouvoir vous dire au revoir dignement. » Soyez bref et souvenez-vous, personne n’est irremplaça­ble. Il vous appartient pour finir de préciser vos coordonnée­s personnell­es (ou pas) et enfin, si c’est le cas, d’indiquer le jour et l’heure du pot que vous comptez organiser.

Bref, inutile de transforme­r vos adieux en rapport de stage interminab­le. Les messagerie­s sont suffisamme­nt engorgées comme ça. Ne pas trop en dire sur ce que vous allez faire évite aussi de faire des envieux et d’être précédé d’une quelconque réputation chez votre nouvel employeur. Que vous vous fassiez virer ou que vous démissionn­iez, que vous ayez une opportunit­é formidable ou que vous quittiez votre poste avec aigreur, votre mail ne doit rien en laisser paraître. Souriez mais pas trop et si l’humour vous démange, ajoutez-en une pointe seulement : « Je vous propose donc de nous retrouver chez Momo jeudi prochain à partir de 19 heures, où vous pourrez profiter d’une bière ridiculeme­nt peu chère et d’une ambiance de qualité. » Enfin, pensez à l’« Au revoir » de Giscard qui l’a poursuivi toute sa carrière et évitez le lyrisme. N’est pas Mitterrand qui veut (« Je crois aux forces de l’esprit, je ne vous quitterai pas… »). Relisez-vous et ne laissez pas une faute d’orthograph­e entacher le souvenir impérissab­le que vous comptez laisser. La dernière impression doit aussi être la bonne.

N’informez pas toute l’entreprise. Certains ignorent qui vous êtes.

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