GQ (France)

SUR TWITTER, LE PRÉSIDENT HOLLANDE POSSÈDE PAS MOINS DE TROIS PROFILS. À CHACUN SA FONCTION. LE + OFFICIEL ‡ELYSEE LE + PERSONNEL ‡FHOLLANDE

LA CELLULE WEB DE L’ÉLYSÉE @Elysee_com • 8 mai PLUS DE 1 MILLION DE FOLLOWERS Fonction :

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rendez-vous en matière de communicat­ion présidenti­elle, loin de la liturgie républicai­ne de la salle des fêtes du palais de l’élysée. Nous ne sommes plus à l’heure de l’incantatio­n mais à celle de la conversati­on, du 3.0. » Cela pourrait être signé Gantzer. À son arrivée, il était temps d’arrêter la « com’ à la papa ». Les deux premières années se sont souvent traduites par un bilan calamiteux (affaires Leonarda, Cahuzac, Valérie Trierweile­r, Julie Gayet, etc.), malgré (ou à cause de ?) Aquilino Morelle et Claude Sérillon, poussés vers la sortie, en raison de leur profil « old school ». Seul Christian Gravel, lui aussi débarqué, a rebondi au Service d’informatio­n du gouverneme­nt. Reprendre en main la parole présidenti­elle, c’est la mission de Gantzer. Et Frédéric Giudicelli, qui pilote au quotidien la cellule web, est formel: « L’arrivée de Gaspard a été déterminan­te dans ce e montée en puissance. Nous parlons le même langage. »

Le rythme des réseaux sociaux Une fois dans la place, Gantzer commence par valoriser la cellule web : moyens accrus (pour a eindre une douzaine de personnes) ; création d’une réunion chaque samedi matin entre le « PR » (pour président de la République), Gantzer et Giudicelli pour faire remonter les sujets ayant le plus buzzé sur la Toile ; nomination de Frédéric Giudicelli dans le cabinet du « PR », un geste d’autant plus remarqué au Château que le patron de la cellule 3.0 n’est pas énarque, mais ingénieur de formation, et qu’il a conquis ses galons en politique par le biais du militantis­me. Un autre membre de la cellule, Mehdi Mebarki, est un ancien architecte, lui aussi passé par le PS et la twi osphère. Pour Gantzer, ces nomination­s montrent que la com’ est une affaire de compétence­s plutôt que de diplômes. Il parle, réfléchit, se déplace vite. Au rythme des réseaux sociaux. Le 8 mai, il assiste aux commémorat­ions de la fin de la Seconde Guerre mondiale sur les Champs-élysées. Un oeil sur le président, l’autre sur son portable. Il tombe sur un papier de Valeurs actuelles (« Julie Gayet : et maintenant elle travaille à l’élysée ! ») qui relaie une rumeur lancée la veille par Closer. Gantzer prévient Giudicelli de sa décision de démentir illico ces deux articles. Ping-pong de SMS jusqu’à trouver la bonne formulatio­n : « Bonjour, @closerfr l’article de @Valeurs est faux, non étayé et non vérifié. La prochaine fois, demandez-nous. Bonne journée. » Le tweet est posté sur le compte de « Communicat­ion Élysée ». Gantzer en avertit Hollande. Dix minutes à peine ont suffi pour clore l’incident. Il y a quelques années, une réunion aurait précédé l’envoi d’un communiqué, qui aurait été analysé par des rédactions qui, elles-mêmes, se seraient concertées avant de décider d’en faire un papier : un processus qui aurait duré de longues heures. « Et puis c’est mieux qu’un droit de réponse: au moins, nous maîtrisons notre rythme et notre forme d’expression », se réjouit le conseiller présidenti­el.

Être convaincu de la puissance du web, c’est une chose. En persuader son patron en est une autre. Dans son livre sur les coulisses de l’élysée (2), Vanessa Schneider, grand reporter au Monde, raconte comment, il y a quelques mois seulement, Gantzer a dû expliquer à son patron ce qu’était Instagram avant de lui soume‰re une propositio­n de photo à poster. Preuve du chemin parcouru, c’est Hollande, quelque temps plus tard, qui passe outre les réticences de Gantzer et de sa chef de cabinet, l’alertant sur les risques de selfies travailler sur l’image de Laurent Fabius. De lui, ses mentors répètent qu’il « sent les choses », peut-être aussi qu’il a l’âge pour mieux flairer l’air du temps qu’eux. L’usage des réseaux sociaux est dans son ADN, un oeil en permanence braqué sur son modèle : Obama. Gantzer n’est d’ailleurs pas peu fier du « coup » réalisé lors des commémorat­ions du D-day. Ce 6 juin 2014, Frédéric Giudicelli et Romain Pigenel (son prédécesse­ur) demandent à Dorothée Adam, la JRI de la cellule web, de filmer les coulisses de la rencontre

aussi la petite histoire. Le 24 décembre, de retour d’un voyage officiel à Saint-pierre-et-miquelon, l’élysée reçoit une femelle labrador en cadeau. Une fois baptisée Philae, encore faut-il annoncer son existence sans que l’affaire ne tourne au ridicule. Une photo dans Le Parisien d’un côté, un tweet sur le compte personnel de soirée, il semble tenir un joint. La belle affaire! Mais un possible début de pataquès pour un nouveau conseiller com’ du président. L’anecdote s’évapore en deux jours. Signe du nouveau respect qu’inspire l’homme, précédé d’une bonne réputation, et la fonction (embêtant de se me…re tout de suite à dos le nouveau pivot de la com’

à la manoeuvre. Le moindre temps mort est perçu comme un retrait. Ce qui ne veut pas dire parler sans cesse ». Mais montrer le président, chaque jour, partout ou presque, oui. Jusqu’à, par exemple, se voir informé par un Vine que le « PR » a rencontré « sa Béatitude Bechara Boutros Raï » du Liban pour aborder « la situation dramatique des chrétiens d’orient ». Une apparition fugace qui n’apprend rien aux abonnés, mais veut rassurer ceux qui en douteraien­t : le président travaille. Plus décisif, un tweet révèle fin septembre la mort de l’otage français Hervé Gourdel, en Algérie. Retweeté plus de 1900 fois, il a été publié sur le compte personnel de François Hollande alors qu’il se trouvait aux Nations unies, à New York. La vidéo annonçant l’exécution, diffusée par l’état islamique, a été repérée par la cellule web avant même les services de renseignem­ent, ce qui a permis au chef de l’état de réagir immédiatem­ent. En revanche, aucun tweet n’a été posté sur les accusation­s de viol par des soldats français en Afrique. 140 signes sur un sujet si délicat : l’exercice d’équilibris­te a ses limites.

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