Mise en scène du travail présidentiel
Le numérique a pris le pas, mais il ne s’agit pas de négliger la com’ plus traditionnelle et les équipes qui s’y consacrent. Chaque vendredi se tient la réunion de tout le service communication. Ce jour-là, l’information la plus importante est l’annonce de la participation de Hollande à l’émission « Le Supplément » le dimanche suivant, et donc la présence dans la semaine à venir d’une équipe de Canal + parmi le staff présidentiel. Le grand patron reste bel et bien François Hollande, qui décide in fine de chaque rendez-vous média. En grand amateur de conversations avec la presse (de nombreux journalistes possèdent son 06), il va jusqu’à participer au montage de certaines opérations. Il a ainsi accepté, sans en parler à personne, l’invitation à dîner lancée par Maïtena Biraben, une soirée qui a constitué le prélude à la négociation de l’interview dans « Le Supplément ». La semaine précédente, François Hollande avait débarqué à l’improviste à ce«e réunion du vendredi, et la scène avait été aussitôt diffusée sur le compte Twi«er de l’élysée. Quelques membres du cabinet ont grincé des dents, la mise en scène du travail présidentiel allant, à leur goût, un peu loin dans les détails. « Oh, il faut bien un peu d’autodérision !, s’amuse Gaspard Gantzer. On peut travailler sérieusement sans être toujours sérieux, et le président le premier aime rigoler. Et puis c’est frappant comment, dans un endroit comme l’élysée, l’ambiance peut passer en une seconde d’une très grande gravité à la détente. » L’incroyable rapidité avec laquelle le système politicomédiatique évolue le surprend encore. Même la comparaison avec l’époque de Nicolas Sarkozy, dont l’omniprésence dans les médias confinait à l’obsession, ne tient plus, selon lui. « Tout est différent d’il y a cinq ou six ans, et d’abord votre façon de travailler. À tout moment un journaliste sortant de mon bureau peut envoyer une info directement de son smartphone », explique Gantzer. Une perspective qui semble davantage l’exciter que l’effrayer.
(1) (2)
19 mai 2015
éd. Stock, mai 2015