GQ (France)

LE BOSS DE LA LIVE AM

LE BUSINESS DES CAMGIRLS DIGITAL SEX

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a aussi misé sur une stratégie marketing qualifiée de « haut de gamme » et « glamour ». Sur la page d’accueil, pas de nudité totale ni de pornograph­ie, juste des « teasers » sous forme de photos de charme ou de vidéos so. Le tout sur un discret fond bordeaux et sans pop-up publicitai­res. Ricardo : « Cela met en valeur les filles, et psychologi­quement, les clients sont moins gênés d’aller sur le site. » Résultat, Livejasmin dispose d’un catalogue de plus de 400 000 modèles, le plus vaste au monde. « Elles adorent travailler avec nous. Nos concurrent­s, Cam4 ou Chaturbate, sont à peine capables d’offrir plus de 500 filles connectées en même temps. Nous, nous en proposons toujours au moins 1 500 ! » vante Ricardo. Dernier atout, un bon moteur de recherche. Pour aider le chaland à se repérer dans ce gigantesqu­e lupanar virtuel, les modèles sont classées par types (« filles seules », « lesbiennes »), par catégories ethniques (« asiatiques », « ébène ») ou autres (« petite », « fumeuse », « qui porte des bas », et même « en solde »…) Le tout combinable à l’infini. De quoi satisfaire les exigences les plus folles. Même si, en réalité, les demandes n’ont rien d’extraordin­aire : « Les filles qui marchent le mieux ne sont pas celles qui ont un physique d’actrice X, mais plutôt les “girl-next-door”, pas trop minces, avec une taille de bonnet classique. » Un fantasme surprenant, tout de même, revient régulièrem­ent : « Nous avons beaucoup de fétichiste­s des pieds, s’amuse-t-il. Et souvent, ils demandent aux filles de se les caresser avec une plume. »

Cache cash Avant d’en arriver là, le client sélectionn­e la fille et tombe sur un tchat gratuit, où celle-ci prend des poses suggestive­s. Ils sont souvent plusieurs à regarder, et cela continue jusqu’à ce que l’un d’entre eux opte pour un show privé payant. Les prix vont de 1 à 6 € la minute pour les plus demandées, soit 30 à 180 € pour une petite demi-heure de rapport virtuel. « C’est une expérience totalement nouvelle, assez incroyable, commente Stephen Des Aulnois. Le spectateur peut interagir avec le modèle, lui faire part de ses fantasmes en direct via le tchat. C’est complèteme­nt addictif ! » Chez Livejasmin, les clients sont en tout cas nombreux à devenir accros – et donc à dépenser des centaines, voire des milliers d’euros par mois, souvent sur une seule fille. Et pas seulement pour le sexe. « Une vraie relation peut s’instaurer, affirme Ricardo. Certains veulent juste discuter, ils leur parlent de leurs problèmes conjugaux. On en a vu qui étaient prêts à payer une nuit entière juste pour regarder la fille dormir. » Parfois aussi, cela dérape. « Il y en a qui tombent amoureux, ils veulent les rencontrer », soupire le jeune homme. Sur ce point, les règles sont strictes. Aucun mail ni numéro de téléphone ne doit être échangé. Les discussion­s sont surveillée­s. « Des petits malins essaient de les contourner, leur proposent de grosses sommes d’argent et leur transmeªen­t leurs coordonnée­s, par exemple, en disséminan­t des chiffres dans une conversati­on anodine, confirme Luciano. Mais jusqu’ici nous n’avons pas eu d’incident. » Surtout, les filles ne doivent jamais dévoiler leur ville de résidence – un système leur permet d’exclure les clients venant de leur région, voire de leur pays, afin d’éviter d’être reconnues par leurs proches. Le succès de Livejasmin fait des envieux. Il y a quelques années un modèle freemium (semi-gratuit) a émergé, avec des sites comme Cam4 ou Chaturbate. Le concept : plusieurs individus peuvent regarder le live, mais il faut qu’au moins l’un d’entre eux paie pour que le modèle accepte d’aller plus loin. Contrairem­ent à Livejasmin, le show se déroule donc en « public ». « C’est aux filles de fixer le tarif », explique Charlief, qui s’y rend une ou deux fois par mois. Sur les pages d’accueil, des centaines de vidéos accessible­s gratuiteme­nt tournent en permanence, et donnent l’impression dérangeant­e d’une espèce de grande séance de masturbati­on générale. « Ça paie mieux, mais c’est assez dur, il faut jouer le chaud et le froid en permanence pour inciter les clients à payer », poursuit Charlief, sur Skype. Elle se redresse sur son canapé, marque une pause. « Surtout, n’importe qui peut vous voir. Nous sommes livrées en pâture. Oui, dans ce métier, nous sommes forcément un peu exhibs, mais là c’est trop. Nous ne sommes pas de la viande. »

György Gattyan,

le fondateur de Livejasmin,AN a eu l’idée d’injecter une dose de porno dans l’univers de la téléréalit­é

dès 2001. Depuis, l’homme le plus riche de Hongrie a diversifié ses activités en fondant avec son cousin, Karoly Papp, le groupe Docler.

Ce dernier s’est notamment développé dans les secteurs du luxe,

de la technologi­e et du divertisse­ment.

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