MON RODÉO EN MUSTANG Le Tone
DE LE TONE C’est l’histoire d’une fougueuse chevauchée en Bavière. Le récit cocasse d’une improbable rencontre entre notre chroniqueur et une voiture mythique. De couleur jaune canari. Notre essayeur de grosses cylindrées et d’engins roulants en tout ge
La Ford T de Tintin au Congo, les GT40 du Mans, la Torino de Starsky et Hutch, la Ford Escort MK2 d’ari Vatanen… Ford, c’est LA marque légendaire. Elle a accouché d’un paquet de monuments. Mais il faut bien reconnaître que ses derniers modèles – des familiales pour la plupart – nous ennuient un peu, même ornés d’une calandre en trapèze façon Aston Martin. La Fiesta n’invite pas à la fête, la Focus devrait faire le point. Et le nouveau Transit mériterait d’être stimulé. Heureusement, il y a l’immortelle Mustang de Steve Mcqueen ! Cette voiture, aussi racée à sa naissance que le cheval qui lui donne son nom, aura réussi à survivre à des époques plus ou moins dramatiques : l’insipide Mustang 2 est vite tombée dans l’oubli, la numéro 3 n’avait que son moteur pour elle, la 4 recommençait vaguement à hennir, mais c’est la 5, en 2005, qui a réveillé l’intérêt des fans – je garde d’ailleurs un souvenir ému d’une après-midi folle et sauvage au volant d’une Mustang 5 GT 500 de 670 chevaux sur les courbes trempées du circuit de Brands Hatch. L’un des jours qui m’a fait le plus mûrir dans la vie.
C’est avec ces images en tête que je me dirige vers la petite dernière. Manque de bol, elle est jaune. À part pour les Ferrari dont c’est la couleur originelle (qu’on retrouve sur l’écusson), le jaune, c’est dur! J’attire peut-être tous les regards au feu rouge mais j’ai surtout envie de me cacher dans la boîte à gants. L’autobahn allemande sera parfaite pour se fondre incognito dans le trafic. Mais une fois lancé, ça ne marche pas vraiment. Très vite, un type me rattrape avec sa BMW en carbone aux jantes vert émeraude. Il a le pouce levé, me fait un grand sourire. Je sens que ça ricane entre les files alors je me redresse derrière mon volant et j’écrase le champignon. Quand j’atteins, facilement, les plus de 200 km/h, mon capot – jaune – est pris de soubresauts et semble prêt à se faire la malle. Cocasse. Affolé, je tente de négocier avec le RP de Ford un échange de voiture (et de couleur). Je n’obtiens qu’un : « T’inquiète pas, on est au courant, c’est en cours de modification. »
C’est donc à bord de mon improbable engin, mi-canari, mi-canasson, que je bifurque vers les champs de colza de la Bavière pour profiter du nouveau train arrière à roues indépendantes. C’est la principale innovation : la « pony car » abandonne finalement le pont arrière rigide. Le comportement de la caisse commence enfin à ressembler à celui d’une vraie voiture. À cause de son poids, elle se tortille comme un bon gros saumon dans les virages mais pour une propulsion, c’est rigolo et sûr. Pendant un long moment, je suis heureux comme un cow-boy sur une nouvelle monture. Mais, entre mon pilotage, sportif, et le taux de pollen dans l’air, j’ai oublié que j’étais asthmatique. Et le rodéo s’achève devant une pharmacie bavaroise. En sortant, je découvre un attroupement devant le cheval jaune. Les compliments fusent : « Sehr schöne Farbe » (« très jolie couleur »). Je souris mais j’attends d’être seul pour repartir. Moi, cette Mustang, je la veux, mais en noir.
Dans les virages, elle se tortille comme un bon gros saumon.