GQ (France)

SCÈNES

En tournée mondiale pour son nouveau spectacle, X, l’Écossais sans filtre Daniel Sloss aborde sur scène ses travers, ses relations amoureuses ou la mort de sa petite soeur. Et on rit.

- PAR HÉLÈNE MOLINARI

Daniel Sloss, attention humoriste méchant !

« JE SUIS UN HOMME BLANC, hétérosexu­el, de classe moyenne, au succès marginal et extrêmemen­t bien membré. Où sont mes dificultés ? Comme la plupart des hommes blancs hétérosexu­els, j’ai donc créé mes propres combats. » Dans son one-man-show Jigsaw, diffusé sur Netflix, Daniel Sloss se décrit avec sincérité. Repéré avant 20 ans lors du Fringe festival d’Édimbourg, l’Écossais de 29 ans, onze spectacles au compteur, aime l’humour noir – même l’évocation de sa petite soeur morte à 7 ans fait rire. Son second show lance une vague de ruptures : des milliers de couples se séparent après l’avoir vu, le remerciant pour son ode au célibat. L’humoriste poursuit son introspect­ion avec X, en explorant les questions de masculinit­é et de violences sexuelles. Au téléphone, il s’en explique : « J’ai été accusé de masculinit­é toxique, ce qui était légitime. Plutôt que d’être dans le déni ou la colère, j’ai pensé : voyons ce que ça veut dire et si j’en ai quelque chose à foutre. » Alors il lit, parle avec son entourage et s’observe. Il dit avoir changé certains aspects de son comporteme­nt : « Je me trouve parfois intrinsèqu­ement sexiste – ces choses qu’on perçoit comme “féminines” ou “masculines”, par exemple – et il me faut quelqu’un d’extérieur pour le pointer. »

Dans X, décrit comme « une lettre d’amour aux hommes », Daniel Sloss estime que ceux-ci doivent être tenus pour responsabl­es de leurs actes : « Si les hommes en prennent plein la gueule, une grande part est méritée, même si ce n’est pas forcément individuel­lement. Personnell­ement, je peux et je veux faire mieux. » Sans jamais donner d’ordre à son public, il raconte son expérience et expose ses conclusion­s. « Si vous n’êtes pas d’accord, aucun problème. Ce serait un monde de merde sinon. Il n’y aurait plus d’art. » Celui qui est « très très loin d’être parfait » reconnaît avoir dit des « choses stupides » plus jeune, « mais il est important de faire remarquer qu’on grandit ». Selon lui, les excuses ne servent à rien : « Si je dis quelque chose de mal, j’irai apprendre pourquoi ça l’est et m’assurerai de ne plus le dire. Si une personne tient des propos homophobes, mieux vaut qu’elle aille vers la communauté LGBT, qu’elle parle avec les concernés pour comprendre ce qui ne va pas et qu’elle fasse ensuite de son mieux. S’il n’y a jamais eu d’excuse, je m’en fous : ce qui aura été fait est bien mieux. »

Daniel Sloss évoque sur scène tout ce qui l’affecte. L’agression sexuelle subie par une amie n’y échappe pas, mais il ne trouve pas les bons mots. Avec l’aide de son entourage, il peau ine son texte. « 50 % des personnes qui viennent me voir auront subi une forme d’abus sexuel. Je risque de faire remonter un souvenir terrible. Il fallait être sûr d’être drôle mais aussi sensible, avec des vannes qui ne ridiculise­nt pas les survivants ni n’en font l’objet d’une punchline. » Il ajoute : « J’ai rencontré beaucoup de victimes après mes spectacles, un bon moyen de véri ier que je n’ai rien dit de stupide. Ce n’est pas de la censure, juste de l’empathie. » S’il défend aussi le droit des humoristes à ne pas vouloir faire d’effort et à « s’en foutre », lui a consciemme­nt choisi de « faire mieux ». En attendant la in de sa tournée, Daniel Sloss affronte son ami humoriste Kai Humphries dans une battle de tricot qui passionne leurs fans sur Instagram : « Kai a été élu meilleur tricoteur. Reste à voir qui va faire le pire pull de Noël – le mien est pour ma copine. C’est relaxant, cathartiqu­e. Ça laisse l’esprit libre de vagabonder… »

DE DANIEL SLOSS, LE NOVEMBRE AU RÉPUBLI UE, À PARIS

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Ses spectacles Dark et Jigsaw sont disponible­s sur Netflix.

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