Pierre Hardy évoque son amour pour les baskets haut de gamme.
Créateur des chaussures Hermès depuis 1990, Pierre Hardy fut l’un des premiers stylistes à transformer la basket en accessoire design et « haute couture ».
PParlez-nous de la première sneaker que vous avez dessinée...
C’était la Quick, pour Hermès, en 1998. Et ce n’était pas du tout stratégique. Au contraire, c’était même assez disruptif dans cet univers, surtout chez nous. À cette époque, ça n’existait pas, des baskets créées par des marques de luxe. La Quick n’était ni une vraie chaussure de sport ni une chaussure spécifique à une activité. C’était une chaussure multifonctions, qui correspondait bien à l’histoire et à la mode d’Hermès dans les années 1920-1930, liées à l’automobile, au sport, au tennis, au golf, à l’aviation... à des activités dynamiques en plein air. Après se posait la question créative : comment faire pour que cette chaussure soit une chaussure Hermès ? C’est ainsi qu’est venue l’idée de la confier à l’un des fabricants historiques de la maison, celui qui produit les chaussures homme. Nous avons essayé de retrouver un maximum d’éléments en commun avec d’autres objets Hermès, et il a fallu ensuite trouver la bonne matière pour rendre la semelle confortable.
C’est un design très différent de celui des autres chaussures ?
Complètement différent ! Notamment au niveau de l’artisanat que cela implique. C’est comme un nouveau métier : ça relève finalement plus du design d’objet puisque pour la partie semelle, c’est de l’injection, il faut concevoir des moules, avoir des visuels en 3D… En ce qui concerne Hermès, il y a des nuances parce qu’une grande partie de la chaussure est fabriquée en cuir, à la main. Il y a vraiment une imbrication, un mélange de ces deux choses. Pour l’inspiration, il y a une idée de dynamique. Cela va au-delà du sport, c’est comme une énergie qui circule et qu’on peut expliquer de plein de façons différentes.
Qu’est-ce qui différencie vos sneakers des chaussures de sport ?
Il y a des marques spécialisées dont tout le design est axé sur cette idée de la performance appliquée à certains mouvements. Ce n’est pas notre cas. Nos sneakers sont des objets de mode, de création et presque d’identité. Leurs tiges sont d’ailleurs souvent fabriquées comme celles des chaussures de luxe. J’essaye toujours de me servir du meilleur de ce que je peux avoir expérimenté dans l’univers des chaussures classiques et de le transformer, de l’injecter, au sens propre comme au figuré.