Grand Seigneur

“LES NATIONALIS­TES, C’ÉTAIENT D’ÉNORMES FÊTARDS ! ”

À 53 ans, l’ancien avocat de la mafia et des indépendan­tistes corses défend aujourd’hui Alain Delon et quelques célébrités. Mais ça ne l’empêche pas de se souvenir avec émotion des apéros-terrines Canal Historique…

- Entretien : Olivier Malnuit

Pascal Garbarini, vous avez été pendant plus de dix ans l’avocat des nationalis­tes corses de la bande dite du Petit Bar. C’était quoi ce fameux « Petit Bar » ?

— G.B. : Juste un petit café sur le pont Napoléon au coeur d'Ajaccio, dont on disait à l'époque à la télé qu'il était un lieu de réunion des nationalis­tes corses, proches du FLNC Canal Historique, et de personnes susceptibl­es d'appartenir à un groupe criminel. En fait, c'était surtout un bar avec des apéros très sympas et une salle de poker, ça n'avait rien d'un lieu de conspirate­urs. On faisait la fête en buvant des vins d'Ajaccio (domaine Abbatucci) avec la tête de l'Empereur sur l'étiquette !

Et ces nationalis­tes du Petit Bar (François Santini, Charles Pieri, etc.), c’étaient des bons vivants ?

Plutôt d'énormes fêtards, vous voulez dire ! Au Petit Bar, les tables ressemblai­ent à celles de François 1er de retour de la chasse. Bon, ce n'était pas non plus un bistrot avec une équipe de chefs qui cherchaien­t à détrôner Gagnaire ou Ducasse, hein. Mais il y avait toujours du sanglier, de la perdrix, du pigeon. On mangeait du jambon Prisuttu, du Lonzu (filet de porc fumé), des terrines de Sansonnet (étourneau), des fromages de Niolo (brebis à pâte molle et croûte lavée), de Sartène (brebis à pâte pressée non cuite et croûte sèche)... Le tout accompagné des meilleurs vins rouges comme ceux du domaine Comte Peraldi, au-dessus du golfe d'Ajaccio. Je sais bien qu'il n'y a pas que les nationalis­tes qui aiment la vie, mais ceux-là étaient tout sauf des gens ternes.

Ça n’a pas empêché certains de se faire descendre ou de s’entretuer. C’est à cette époque que vous étiez protégé par la police ? Aujourd’hui, vous préférez défendre des acteurs ? C’est quoi, aujourd’hui, les meilleures tables parisienne­s quand on est avocat ?

Après un procès, je reste un inconditio­nnel de l'Hôtel Costes (Paris 1er) et de son cabillaud chilien Comme je suis un fan de Melville (Le Cercle

rouge), c'est vrai que je suis aux anges d'être le conseil d'Alain Delon. Je défends aussi Benoît Magimel, François Cluzet, etc. Bien sûr, j'ai encore quelques dossiers corses. Mais je ne vis plus sur place, alors je trouve ça compliqué de s'impliquer. Et puis, c'est toujours un peu la même chose : de la criminalit­é organisée avec beaucoup de saupoudrag­e policier autour, des rivalités entre services, entre parquets… Au bout d'un moment, ça suffit.

En pleine guerre entre les militants d'A Cuncolta (FLNC Canal Historique) et ceux du MPA, le Mouvement pour l'autodéterm­ination, le ministère de l'Intérieur avait estimé qu'il me fallait une garde rapprochée. Mais ça n'a pas duré longtemps. Je trouvais que je n'avais pas à dépenser l'argent de l'État. Tout ça, c'est du passé, ça ne fait plus partie de ma vie. sauce thaï. C'est un bel endroit pour déstresser... Sinon, j'ai un faible pour le thon blanc snacké aux tomates vertes de Philippe Marc au Relais Plaza (Paris 8e) et la souris d'agneau au thym de Sylvain Couture au Bistrot Marguerite (Paris 4e). Mais le

must, bien sûr, c'est la table de la Maison du Barreau de Paris (Paris 1er), réservée aux avocats qui passent le concours d'éloquence le lundi.

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Photo : Julien Liénard

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