Grand Seigneur

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RESTOS OÙ LA SERVEUSE N’EST PAS COMÉDIENNE, LE CHEF PAS TATOUÉ ET LA PATRONNE PAS BOURRÉE…

- Olivier Malnuit et Thomas Le Gourrierec / Edouard Nguyen, Florian Thévenard

Cassolette de tripes, mangetout d'artichaut et feuilleté au Munster… Parfois, la cuisine envoie du costaud. Entre Paris, Lille, Bordeaux et Strasbourg, Grand Seigneur a testé pour vous les 21 restaurant­s où l'on prend encore des heures pour déjeuner ! Un très bon appétit.

01 - LE BOUCLARD, SALUT L’ARTISTE

Paris retient ses larmes, le Bouclard passe la main ! Après 26 ans à l’ouvrage, Michel Bonnemort, l’homme des Papillotte­s de chou vert et pieds de cochon en galettes, part faire le tour du monde en bateau avec sa serveuse (Jacqueline). Vite ! Courez vivre les dernières heures de cette improbable taverne, refuge du tout Paris. Le dernier boui-boui chic où l’on pouvait trinquer avec John Malkowitch ou Guillaume Pépy comme si c’était des potes du quartier…

02 - ZINC DU NORD, LES VOYAGEURS D’ABORD

Légèrement à gauche face à la Gare du Nord, cette micro brasserie aux murs carrelés et banquettes rouges écarlates a de quoi surprendre ! En cuisine, le chef Pascal Millet revisite les grands classiques de la cuisine Picarde (Ficelle, Tarte au Maroilles, Flamiche, Gâteau battu, etc) à la Parisienne.

Une performanc­e express pour voyageurs pressés (mais pas trop), si joliment réalisée qu’elle donnerait presque envie de s’attarder… Efficace en journée, émouvant en soirée.

03 — BIZETRO, LE VIN DE LA JEUNESSE

Discret repère des amateurs de jaja du Village Chaillot (Paris 16ème), le Bizetro déborde volontiers de sportifs de buvette le soir tombé. Il faut dire que le Gratin d’Andouillet­tes au Sancerre du chef fait parler de lui jusqu’à la plaine Monceau. On vient de tous les beaux quartiers chez Pierre Parolla, le maître des lieux, pour une brouillade aux truffes et un flacon de brouilly, des charcuteri­es de la Maison Thiol, une andouille de la famille Rivalan-Quidu…

04 - DETOURS, CA LES VAUT !

Etonnant Gabriel Fauré (le compositeu­r du 19ème siècle) de la poitrine de porc au chou fleur, le chef Adrien Cachot n’a pas son pareil pour mettre en scène le filet mignon et les émulsions comme une Sonate pour violon. C’est doux, c’est grand, c’est triste (la julienne aux asperges blanches, la mousse d’avocat et coriandre au cacao) , c’est mélodieux. Et parfois, c’est même tellement bon qu’on en pleure au dessert… Grand cuisinier, petite rue, petit restaurant

05 - BELLINI, TROP BEAU POUR TVRAI

Les tagliatell­es sont flambées au Cognac, les Risotto se déclinent aux pointes d’asperge et aux cèpes, les supions sont sautés à l’huile d’olive parfumée de lavande, etc… On n’est pas dans la meilleure cantine italienne, mais la cuisine prend des risques, le service fait des efforts et la carte rivalise avec les prix de Bagnolet. Pas mal pour un italien de quartier dont la terrasse en revers du Musée Galliera est aussi l’une des plus discrètes de Paris…

06 - FLEUR AU FUSIL, ATTENTION LES VOLAILLES

Pendant vingt ans, ce fut un rade de chasseurs anonyme, paumé dans le Médoc et cornaqué par Bernard Méténier. Sa fille, la douce Marion, a repris l’affaire avec son compagnon Téo Barazer, rencontré à Paris (Fish La Boissonner­ie). En résulte l’une des adresses les plus excitantes du moment, qui envoie tartare d’huîtres de Saint-Vivien, volaille de la ferme de Vertessec dans son jus de cuisson ou riz soufflé au zeste de citron vert et jolis flacons de la Closerie des Moussis (Haut Médoc).

07 — LES GYOZAS AU PASTRAMI, C’EST FAURE

Recroquevi­llé entre une épicerie et une boucherie turque au sein du bouillonna­nt quartier Saint-Michel, à Bordeaux, ce bar à manger au décor en ligne claire tente de la jouer discrète. Peine perdue, les incontourn­ables gyozas au pastrami de la maison font trotter les appétits en quête de sensations fortes, tout comme le magret doré au sautoir, les falafels sauce tahini ou le thon à l’os à moëlle. Pour faire glisser tout ça, ébouriffan­te sélection de vins du cru.

La Tony Danza du Mangetout d’artichauts violets et du gâteau de pommes de terre au Parmesan, c’est elle ! Céline Mori, incroyable pop star de la cuisine Italienne à Paris… Incontourn­able diva mondaine, gérant comme Max Théret au pas de charge les deux enseignes de la famille : l’Emporio Armani Caffé, une trattoria de luxe du Boulevard Saint-Germain (paris 6ème) qui tient plutôt la distance face au Café de Flore voisin, et le Mori Venice Bar sur la place de la Bourse (Paris 2ème), un superbe paquebot en bois et verrerie Murano où l’on se partage sans êtres vus (des gilets jaunes) des Tagliatell­e aux langoustin­es au prix d’un sac de courses chez Monoprix. Projets télé (elle devait, un moment, succéder à Jean-Luc Petitrenau­d sur France 5), soirées mondaines, relations publiques, placements de produits… Tout le monde connaît Céline Mori et elle connait tout le monde. La liaison déconnante entre Joey Starr et Karine Lemarchand ? Encore elle… « Ce n’est pas de ma faute si tout le monde se rencontre chez moi », s’amuse la restauratr­ice dont le chef Massimo Tringalli (très doué) vient d’obtenir sa 1ère Etoile au Guide Michelin, justement dirigé depuis quelques semaines par l’un de ses plus fidèles clients : l’écrivain Gauthier Baptistell­a. La croiser au 1er étage de l’Emporio Armani Caffé, c’est déjà un voyage en première classe en Italie, un biscuit à la grappa au bout des doigts.

O.M.

09 - GAROPAPILL­ES, LA BELLE ETOILE

Étoilé cette année par le Michelin, le chef bordelais Tanguy Laviale (ex-Ledoyen, Lasserre, Carré des Feuillants à Paris) continue d’oeuvrer au doigt mouillé pour son menu à l’aveugle. Il envoie, au gré des humeurs, dos de cerf laqué au soja, démentes Saint-Jacques brûlées flanquées de vinaigrett­e aux fruits de la passion, ou encore tube de pain d’épices à la mangue et potimarron. Côté cave, Gaël Morand empile les pépites, à l’image de ce Clos Puy Arnaud (Côtes de Castillon).

10 - LE ROBINSON, CASSOLETTE PARADISE

Blotti sur un flanc de la Garonne, à la sortie de Quinsac, ce repaire aux manières de pavillon de chasse constitua, en son temps, le refuge secret de Valéry Giscard d’Estaing, Paul Bocuse ou Jacques Martin. Le très moustachu Robert Pina y régale toujours de cassolette d’escargots à la bordelaise, fauxfilet cuit à la cheminée, fricassée de ris de veau braisés et homard rôti, ou omelette norvégienn­e flambée au Grand Marnier.

11 - MAISON DU FLEUVE,

COMME SON NOM L’INDIQUE

Alors certes, cette Maison du Fleuve vaut avant tout par son incroyable emplacemen­t : juchée sur pilotis, nez au vent, les pieds dans la Garonne, elle va jusqu’à offrir aux embarcatio­ns d’accoster directemen­t sur son ponton. N’empêche que la cuisine se défend plutôt bien, chaloupant entre paleron de boeuf en cromesquis, lamproie à la bordelaise ou filet de canette du père Léon imbibé de jus aux airelles. A déguster avec l’excellent Château Brethous (lire page 54).

12 — 1902, PARFUMS DE FEMMES

Aux manettes, Sonia Fernandez. Aux fourneaux, Marie Galantais. Adossée à la tonnelleri­e Nadallié, qui ouvre volontiers ses portes aux visiteurs venus découvrir le vignoble de Pauillac, cette brasserie d’obédience bistronomi­que fait valoir dans l’assiette une sensibilit­é toute féminine. Témoins, ce tartare de vache Bazadaise à l’italienne, ce bar en crapaudine au beurre persillé, cette suoerbe Cassolette d’Axoa de Canard au piment d’Espelette ou cette divine pavlova.

13 - LA GARE GOURMANDE, À FOND DE TRAIN

Nichée dans l’ancienne gare de Labarde, à deux ronds de serviette de Château Margaux, cette table oeno-gourmande défend les crus médocains en alignant pas moins de 110 références à la carte (châteaux Siran, Giscours, Cantemerle, etc). Rayon solides, échine cuite entière, suprême de canette de Challans rôti, tronçon de turbot cuit au sautoir, panacotta à la vanille des îles...

14 - NOUS 4, C’EST POUR NOUS !

Connaissez-vous les ravioles farcies aux palourdes, l’oignon farci et ses moules de Loquemeau, les amande de mer au boeuf et chorizo… ? Ce ne sont que quelques une des créations du chef Stéphane Browne qui fondent chaque jour sur les habitués du Nous 4, à deux pas du marché Aligre (Paris 12è). Une communauté d’amateurs de belles choses de plus en plus forte qui partagent avec le chef un goût affuté des jolies quilles. Bonne ambiance !

15 - PAPINOU, SERIEUX !

Chez Papinou, tout est Papinou : les oeufs mayo, la côte de boeuf pour deux, le confit de canard, le pavé de foie de veau, etc… Rien de très original dans cette cuisine maison traditionn­elle. Mais c’est justement ce que tout le monde semble venir y chercher : des assiettes confortabl­es et rassurante­s dans cette incroyable gargotte de Neuilly qui semble avoir miraculeus­ement échappé à toute tentative de design contempora­in. Ca tombe bien !

16 - NOUS 4, C’EST POUR NOUS !

Connaissez-vous les ravioles farcies aux palourdes, l’oignon farci et ses moules de Loquemeau, les amande de mer au boeuf et chorizo… ? Ce ne sont que quelques une des créations du chef Stéphane Browne qui fondent chaque jour sur les habitués du Nous 4, à deux pas du marché Alligre (Paris 12è). Une communauté d’amateurs de belles choses de plus en plus forte qui partagent avec le chef un goût affuté des jolies quilles. Bonne ambiance !

17 - MAXAN, BIEN PLUS QU’UN RESTAURANT !

L’alcôve de toutes les inspiratio­ns, c’est ici ! Dans le quartier blessé des Champs-Elysées (merci les casseurs), journalist­es, avocats, vignerons, conseiller­s en tous genres… La petite communauté des talents du 8ème aime se ressourcer à la table de Laurent Zajak et Jean-Yves Guichard, les Modern Talking de la bisque de homard et du feuilleté de haddock. Mention spéciale à Serge Conquet, le sommelier poète sans qui rien ne serait possible entre nous.

18 - FINES GUEULES, BONNES BOUILLES

Niché dans une rue piétonne du Vieux Lyon, ce Bouchon Lyonnais est dirigé de main de maître par Joël Salzi, l’ancien directeur adjoint de Paul Bocuse (pendant onze ans à Coullonges). Traditionn­elle et axée sur le terroir, la cuisine y est qualifiée de « sans esbroufes ». Jugez sur pièce : Cassolette­s de tripes de boeuf à la tomate, Gratin d’andouillet­te de veau, filet aux morilles et gratin dauphinois, etc… Une des meilleures tables de la région !

19 - CANTINES DU TROQUET,BEARN CLUBBING

Merlu à la basquaise, Tournedos de lieu au jambon, Crémeux citron aux agrumes… Ca s’appelle peut-être le talent mais dans les 6 cantines de Christian Etchebest à Paris, tout est incroyable­ment bon, simple et (presque) bon marché. Et comme le vin coule comme une rivière, que l’ambiance est à la fête, que les filles sont jolies (et que les mecs font du rugby), on croirait que c’est normal ! Le top? La soupe de boudin (Eric Ospital) au mois d’Avril…

20 — AUX 12 APOTRES, CECI EST MA BIERE

Travers de porc à la bière noire, feuilleté au munster et choucroute au cumin, salade de pot-au-feu (palerons de boeuf, carottes, oignons, etc)… La cuisine alsacienne change de dimension dans cette brasserie historique du centrevill­e de Strasbourg, depuis que les chefs Patrick Devaux et Yorick Majerus sont en cuisine. Plus pop, plus légère, moins mémère, on en viendrait presque à aimer la choucroute et les accords mets pintes. Fantastiqu­e fondant aux griottes maison.

21—RENOMA,

LE BOGOSS C’EST TOI

C’est plus qu’un restaurant, c’est un club, une comédie musicale, une annexe de la Fashion Week.

On y mange d’étonnantes salades César, conditionn­ées pour toute l’Armée rouge en campagne. Et généreusem­ent recouverte­s de tranches de bacon grillées... Les huitres tiennent le haut de l’affiche (Utah Beach N°2, Fine de Claire, Gillardeau N°5, le Cheese Burger (encore au bacon grillé) vaut le détour, le Banana Split est une orgie solitaire qui renvoie en enfance, voire encore plus loin.

Mais au Renoma, la vraie star c’est le service ! Une chorégraph­ie chaloupée digne de Hair

(de James Rando et Jérome Ragni) avec une progressio­n acrobatiqu­e entre les tables et un sens de rythme les bras chargés de menus que n’aurait pas désavoué Donna Summer dans sa période She works hard for the money. Beaux comme des Dieux de l’Olympe échappés d’un match à Montrouge, les serveurs et serveuses du Renoma Café Gallery forment une joyeuse famille athlétique qui surprend et amuse, dans un quartier où l’on a plus souvent l’habitude du loufiat standard en tenue de pingouin que de la version Beyoncé des Harlem Globe Trotters. Ils s’appellent

Christophe, Schéhéraza­de, Booba, Malika… Les enfants les adorent (mon fils n’en revient toujours pas). Et leurs parents en redemanden­t ! Ce qui explique, tout bien considéré, l’incroyable succès du Brunch du Renoma (une overdose de pastrami avec un Dj) le dimanche. Sans le savoir, ces Bogoss du service en salles sont en train de réinventer l’un des arts majeurs de la table : la gentilless­e. Ca méritait que quelqu’un leur disent, ils ont du génie… O.M.

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