Grimper

LES ÉQUILIBRES DE BASE

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Votre moniteur d’escalade vous l’a déjà répété : « En escalade, pas la peine de tirer sur les bras, faut pousser sur les pieds ! » Diff icile à croire lorsqu’on se trouve en travers sur une dalle pourrie, les bras en surchauffe, à vouloir faire parler la force. Pourtant ce brave homme tranquille­ment adossé à un arbre, un brin d’herbe entre les lèvres, a désespérém­ent raison. Avant de bourriner, encore faut-il être équilibré.

Pour

reprendre l’imagerie automobili­stique, grimper les pieds dans la choucroute en fermant les bras à grand renfort d’énergie, c’est un peu comme une voiture gavée de chevaux mais dotée d’un châssis en allumettes. À quoi ça sert d’accélérer fort si c’est pour ne pas prendre un virage ? Il en est de même en escalade. À quoi ça sert de forcer quand on peut passer en souplesse ?

Dans tous les cas, avant de tenter un mouvement, vérifiez toujours que vous êtes convenable­ment équilibré. Si vous vous sentez partir en vrille lorsque vous décollez une main, revoyez vos appuis. Il peut s’agir du choix de vos prises ou de votre position sur celles-ci. Un court état des lieux vous permet de réviser votre position pour espérer enchaîner le mouvement suivant sans griller trop de cartouches. N’oubliez pas qu’en escalade, plus on s’économise, plus on a d’espoirs d’aller haut. De là à dire que la grimpe est un sport de fainéants, il n’y a qu’un pas… Cette sensation d’équilibre repose sur une logique simple :

>> Prises décalées : être de face, pied opposé au bras travaillan­t en carre interne.

>> Prises dans le même axe : être de côté, pied opposé au bras travaillan­t en carre externe.

Mais comme, malgré sa grande mansuétude, la nature n’avait pas que ça à faire, elle n’a pas toujours placé les prises exactement comme on l’aurait aimé pour faire des cas d’école. Il faut donc pouvoir s’adapter en transféran­t un peu de poids d’un côté ou de l’autre grâce à la judicieuse utilisatio­n des drapeaux (un pied servant de contrepoid­s) qui, en prime, offre un aspect esthétique et gracieux pas vraiment négligeabl­e dans ce monde viril.

1/ Placement de face, pied en carre interne

C’est la base de l’escalade, ce que vous faites sans y penser si vous disposez de toutes les prises désirées. Restez face au rocher, le genou de la jambe d’appui plus ou moins tourné vers l’extérieur. Cette position permet de valoriser toutes sortes de prises de main, surtout horizontal­es, si vous disposez d’une prise de pied du bon côté (opposé à la main qui bloque). C’est la « missionnai­re » de l’escalade, à la grande différence que si la position est simple, c’est aussi souvent la plus efficace. Malheureus­ement, la configurat­ion des prises ne vous permet pas toujours ce placement.

Bien sûr, l’emplacemen­t des prises guide l’attitude à adopter mais il n’est pas nécessaire de tenter une innovation technique à chaque mouvement, d’autant qu’il existe de bonnes vieilles recettes, des cas d’école d’une efficacité redoutable. C’est donc à vous de décider quelle technique utiliser et à l’adapter selon votre forme, votre souplesse, le temps ou l’âge du capitaine…

En revanche, à l’instar de Buckingham Palace, il est fortement conseillé de ne pas trop sortir des convenance­s, toute excentrici­té étant sévèrement sanctionné­e par une chute (tenue correcte exigée). Voilà d o n c , a p r è s moul t p é r é g r i n a t i o n s ve r b a l e s, l e s attitudes de base répertorié­es à la cour d’Angleterre comme étant gage de bonne éducation.

2/ Le drapeau

Équilibre avec la jambe passée derrière la jambe d’appui. Cette position est nécessaire si vous n’avez qu’une prise de pied, placée assez haut. Votre jambe d’appui est pliée, vous restez face au rocher et votre jambe inutile se rend utile en se positionna­nt derrière l’autre. Ainsi, tout votre poids ne se trouve pas du même côté de l’axe d’appui main/pied. Cette ruse permet de stabiliser votre position. En effet, sans cela vous auriez une fâcheuse tendance à tourner sur vous-même. Si vous vous trouvez en train de bloquer main droite, avec le pied droit placé très haut, pensez donc à laisser partir votre jambe gauche. Vous aurez fait d’une pierre deux coups car vous serez équilibré, et en plus, vous passerez pour un vrai pro. Selon l’humeur des prises, vous pouvez toujours planter un « cancan », soit la même chose mais avec la jambe passée devant la jambe d’appui.

3/ Placement de côté, carre externe

Ce placement est fort utile si la nature a disposé les prises de pied et de main du même côté. Il est également quasi indispensa­ble pour tenir une prise verticale ou inversée. Vous vous tournez de profil par rapport au rocher, le bassin n’étant plus du tout de face et le genou rentre plus ou moins vers l’intérieur selon l’emplacemen­t de la prise de pied. Votre corps est automatiqu­ement placé pour vous permettre de vous enrouler autour du bras et d’aller chercher une prise éloignée. Voilà donc un placement hypersympa, s’accordant très bien avec les beaux jours. Une valeur sûre, indémodabl­e et qu’il faut conserver dans sa garde-robe quel que soit l’avis de votre petit-neveu adepte du grunge.

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 ??  ?? Autre situation : la main et le pied du même côté travaillen­t de concert. Le genou s’ouvre et un drapeau par-derrière la jambe équilibre l’ensemble.
Autre situation : la main et le pied du même côté travaillen­t de concert. Le genou s’ouvre et un drapeau par-derrière la jambe équilibre l’ensemble.
 ??  ?? Bonne ouverture de bassin et gros carre interne restent les techniques de base dans les murs verticaux où légèrement déversants comme ici à Buoux.
Bonne ouverture de bassin et gros carre interne restent les techniques de base dans les murs verticaux où légèrement déversants comme ici à Buoux.
 ??  ?? Le pied et la main opposée travaillen­t dans le même axe. le pied gauche annihile l’effet de rotation engendré par la montée de l’épaule gauche.
Le pied et la main opposée travaillen­t dans le même axe. le pied gauche annihile l’effet de rotation engendré par la montée de l’épaule gauche.

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