Grimper

L’adhérence, c’est scientifiq­ue

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Il existe deux types d’adhérence : dynamique et statique.

En ce qui concerne nos mains, seule l’adhérence statique nous intéresse, car si la relation devient dynamique, c’est que nous sommes déjà sur le point de rejoindre le crash pad ou le fond du baudrier. Il n’en va cependant pas de même pour la gomme des chaussons. Voici ce qu’en pense le professeur Richard Jones du départemen­t de Physique et d’Astronomie de l’Université de Sheffield : « Le discours sur l’adhérence statique serait certaineme­nt vrai si on parlait de n’importe quel autre matériau que de la gomme. L’adhérence statique étant généraleme­nt plus élevée que l’adhérence dynamique, une fois que vous commencez à glisser, vous continuez. Encore une fois, avec la gomme, c’est différent, parce que le coefficien­t de frottement tend à augmenter avec la vitesse (jusqu’à un certain point) et reste très faible pour une vitesse nulle (en fait, certains chercheurs doutent qu’il existe une force de frottement statique réelle pour la gomme). Je pense que ce qu’il se passe, c’est que lors d’un mouvement de frottement, vos pieds commencent à déraper très lentement jusqu’à ce que la valeur de la force de frottement soit égale à celle de la force du poids. Cette vitesse de dérapage, probableme­nt très faible voire impercepti­ble, doit pourquoi pas être inconsciem­ment perçue par les grimpeurs les plus talentueux ayant un style dynamique et fluide. »

Quoi qu’il en soit, la gomme de nos chaussons génère de l’adhérence de trois manières différente­s :

1/ Par déformatio­n :

la pression appliquée à la gomme contre le rocher provoque sa déformatio­n par les aspérités de la roche. Plus la pression appliquée à la gomme est élevée, plus la pénétratio­n est élevée. C’est l’accrochage mécanique.

2/ Par pure adhérence :

proportion­nelle à la surface de contact, diminuée par la présence de poussières ou d’eau.

3/ Par l’usure !

Imaginez la résistance que génère chaque découpage par le rocher d’une fine couche de gomme. Il s’agit d’une macro-version du frottement, qui coûte une fortune en chaussons ! La gomme doit être souple afin de se mouler à la forme du rocher mais si elle est trop molle, elle se déforme et dérape. Sauf que pour un composé donné, la souplesse de la gomme varie avec l a températur­e… Lorsqu’une Formule 1 roule, ses pneus chauffent. Le composé de gomme utilisé pour ses pneus est conçu pour un comporteme­nt optimal à cette températur­e élevée. C’ e s t pourquoi l e s é c ur i e s de F1 préchauffe­nt leurs pneus afin qu’ils se comportent de manière maximale dès le début de la course. De la même manière, les fabricants de chaussons d’escalade utilisent une gomme conçue pour se comporter au mieux dans une gamme de températur­es allant de 0° à 5 °C. En dessous de cette températur­e, la gomme est plus dure et n’épouse pas facilement la forme du rocher et au-dessus, la gomme est trop souple et se déforme trop facilement. Pas étonnant alors que les chaussons d’escalade aient un comporteme­nt optimal dans le froid… Mais pourquoi cette plage de 0 à 5 °C a-t-elle été choisie comme températur­e de performanc­e optimale pour la gomme des chaussons d’escalade ?

À cette températur­e, on estime que les mains ne transpiren­t pas sans trop craindr e l e f r o i d. À 1 2 ° C à l ’ i nver s e , l’adhérence des mains ne serait pas optimale et par conséquent, les conditions d’adhérence au top des chaussons et des mains ne seraient jamais réunies. À chacun donc de savoir s’il décide ou pas de se mettre dans les conditions optimales d’adhérence. Question de niveau, de motivation aussi…

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