GRIMPER EN DALLE

Toujours la même chose. Vous vous êtes engagé conf iant sur une dalle à l’allure accueillante, mais voilà, pas plus de prises sur cette pente foireuse que de poils sur le cul d’un chauve. Il va falloir se débrouiller autrement. Oui mais comment ?

Après une étude minutieuse de précieux grimoires d’époque, nous voilà en mesure de répondre à cette interrogation pourtant pas si désuète que cela. En effet, si l’escalade en dalle n’est plus très à la mode, cela ne veut pas dire que toutes les voies ont été désintégrées, alors il vaut mieux le savoir pour ne pas être pris au dépourvu. Car l’escalade en dalle ne ressemble pas du tout à une progression en dévers. Les équilibres ne sont pas les mêmes et la taille des prises non plus. Débutants, ouvrez donc grand votre cerveau pour enfourner la suite. Grimpeurs confirmés ou de haut niveau aussi, car il ne suffit pas de se dire : « Ouais, moi j’en ai fait plein quand j’étais jeune, c’est bon, je connais… » Car la dalle, c’est comme les maths, ça s’oublie. Il suffit pour s’en convaincre de voir les démonstrations dallesques des ténors actuels. Si tous ont commencé en dalle, en ayant d’ailleurs eu un excellent niveau, il leur faut un certain temps de réadaptation qui peut être risible si l’on est moqueur de nature. Alors révisions pour tout le monde.

Voilà, ça, on aime…

>> Ci-dessous, regard clair et vif (si ce n’est pas le cas, mettez vos lunettes de soleil, on vous l’a déjà dit) pour détecter les moindres aspérités. Tête légèrement en arrière pour élargir le champ de vision et donner du relief. Observez bien les prises de pied tant que vous les avez sous les yeux et essayez de vous en souvenir. Au pire, marquez-les avec un trait de magnésie.

>> Doigts d’acier et surtout peau à toute épreuve parce que les petites prises, ça fait mal. Pour vous donner du courage, dites-vous que tous les grands sont passés par là et que ce n’est certainement pas étranger à leur succès. Bon courage quand même.

>> Buste bien décollé, exactement à l’aplomb des pieds. De cette façon, non seulement vous possédez une superbe allure mais surtout vous appuyez selon le bon axe sur les pieds. Coup double, vous êtes mieux équilibré et vous risquez moins la zipette des pieds en poussant vers l’arrière.

>> Genoux légèrement fléchis pour plus de stabilité. Vous pouvez même les poser contre le rocher pour vous équilibrer complètement pendant un temps d’observation ou de « remagnésage ». Une ruse subtile mais parfois bien utile.

>> Au bout d’un moment, quand vos doigts pèlent, que vos pieds se liquéfient dans les chaussons, que vous avez broyé votre collant tout neuf en raclant les genoux, le tout pour quinze mètres d’escalade en une heure, et que les larmes montent, répétez à voix haute : « La dalle, c’est un régal. » Cela s’appelle de l’autosuggestion et vous aurez fait un grand pas vers le contrôle absolu de vos émotions.