MANON HILY
L’ART DE CONVERTIR L’ENTRAÎNEMENT EN RÉUSSITE
niveau ! Mais quand l’envie baisse, j’ai de grosses difficultés à être sérieuse face à l’entraînement, je ne suis plus aussi assidue sur les exercices et, le plus souvent, j’arrête de suivre la planif. Je me repose alors sur mes acquis quelques mois, puis, petit à petit, je me sens faiblir physiquement, cet état de sous entraînement devient insupportable alors la motivation remonte et je remets à m’entraîner.
Je trouve que l’effet des cycles de physique est presque magique. C’est vraiment une question de maîtrise de mon corps. Quand je grimpe, ce que je déteste par-dessus tout, c’est commander quelque chose à mes muscles et voir que, par pure faiblesse, ça ne fonctionne pas, or rien de tel que l’entraînement physique pour régler le problème ! Par exemple, si je bosse les tractions lestées, au début je suis à 10 kg ; à la fin du cycle je suis à 30. Je peux vous dire que sur la grimpe ça s’en ressent. Depuis mes débuts, et même si la falaise m’a beaucoup apporté à ce niveau, la technique n’a jamais été mon fort. C’est pour ça que je base pas mal mon entraînement sur le physique, pour faire ce que je sais faire, même si j’ai conscience que d’autres auraient pu avoir l’attitude inverse en cherchant à tout prix à remédier aux lacunes techniques. »
L’opération Biographie
Pour un peu plus de concret, il n’est pas un secret que j’ai pris pour objectif d’enchaîner Biographie (N.D.L.R. : le premier 9a+ du monde, à Céüse) et que je suis repassée en mode entraînement depuis quelques semaines. Avec mon coach, on a prévu un plan sur 2 saisons (environ 1 an et demi) basé sur la force, l’endurance de force et la force doigts. On fait le pari que si j’arrive à être facile dans les sections, en particulier le pas de bloc final, alors la résistance nécessaire suivra. Pour le bloc du départ, après m’être suspendue sur les prises, j’ai vu que je manquais cruellement de force dans les doigts, qui est par ailleurs un de mes points faibles.
Pour progresser en tenue de prises, je fais des suspensions courtes sur réglettes, à un bras, en semi-arquées et avec le bras à 120°. Mais comme il y a pas mal de bidoigts et tridoigts fuyants dans Biographie, je fais aussi des suspensions en préhension tendue, à deux bras, sur bidoigts et aussi sur tridoigts avec du lest. Pour la force en général, je fais des tractions lestées, des exos de tractions à un bras et des exercices d’endurance de force : une trentaine de mouvements en imposant des blocages entre les pas ou bien en partant sans sac à pof et en interdisant les délayages. Tous ces exercices sont intégrés à ma planif par cycles de 3 semaines. Pour la résistance, pas de travail spécifique à l’entraînement, on mise sur la falaise. J’ai fait plusieurs trips sur le caillou (avant le confinement) car le but est aussi de ne pas se noyer dans le training, de garder la motivation, mais aussi d’avoir des projets intermédiaires pour tenir la distance face à un projet de longue haleine comme Biographie qui s’annonce mentalement éprouvant. Avoir à côté des projets un peu moins durs où on fait rapidement des essais d’enchaînement peut aussi permettre, quand on en est encore au travail des mouvements dans le gros chantier, de se préparer mentalement à gérer la pression au moment de mettre des essais du sol.