BLEAU, SITE-MONDE
« Il y a assez de blocs à Fontainebleau pour y grimper plusieurs vies ! » On entend souvent ce genre de phrases pour décrire la richesse inimaginable de l’escalade dans cette forêt. Mais son immensité géographique, malgré ses près de 300 secteurs, n’est rien comparée à l’océan de culture qui l’entoure. Cela fait penser à la notion géographique de “ville-monde” qui désigne, il vous en reste peut-être quelques vagues souvenirs du lycée, Londres, Paris, New York et Tokyo. Il y a, dans le concept, l’idée que la puissance culturelle de ces villes est si forte que le monde entier s’y reflète. Bleau n’est pas une ville-monde, c’est un «site-monde», parce que toute l’escalade, dans sa magie comme dans ses travers, y est d’une certaine manière enfermée. Les prémices du libre, l’entraînement des grands alpinistes (P24), une quête du haut niveau passionnante au fil des décennies (P86), des philosophies d’ouverture différentes et complémentaires (P43), des grimpeurs si inspirants qu’ils en deviennent artistes (P36), une foule de questionnements éthiques (P8, 76, 96) … Sans oublier bien sûr le cosmopolitisme très fort qui a conduit les anglophones à rebaptiser eux-mêmes le spot : Font. Il y aurait tellement de choses à dire, à raconter sur l’escalade dans cette forêt que cet édito se veut profession d’humilité face à tout ce qui, inévitablement, manquera dans les pages qui suivent. Vous l’aurez compris, ce magazine ne vous fera pas seulement toucher du doigt le magnifique grès de Fontainebleau ; dans la droite lignée des Face de Bleau que notre chroniqueur Stéphan Denys vous concocte chaque mois, apprêtez-vous à plonger pour 100 pages en immersion dans l’univers bleausard.