MOF Master comme of Fire
À toi qui me lit, je vais te raconter une histoire. Une ancienne légende qui parle de l’existence d’une flamme, d’un feu ardent perdu en un temps oublié.
Cette flamme était le symbole de la passion originelle : celle qui nourrit le coeur desamoureux·se·s, des intrépides, des fous, des folles, de toutes celles et ceux qui se lancent à corps perdu dans des projets impossibles. Qui la détenait voyait son ascension ultime assurée pour l’éternité. Elle fut remise par les divinités de la grimpe à la femme et à l’homme doté du plus grand courage, de la plus grande audace et d’une sagesse admirable. Celles et ceux qui ont pu, un temps, détenir cette flamme étaient alors dotés d’une précision telle que zippette à Bleau leur était inconcevable, d’une force incroyable capable de tracter d’un bras sur une arquée de 2mm, d’une agilité mystique leur permettant de faire un skate sur plus de 15 volumes et d’un mental sans pareil qui rendrait jaloux Villanueva et consorts… Depuis la perte de ce feu sacré des centaines de grimpeur. euse.s étaient à sa recherche, tentant les ascension les plus extrêmes, les expéditions les plus folles ou même venant sur les compétitions les plus dures pour montrer qu’iels étaient les plus doué·e·s. Malheureusement rien n’aura pu faire réapparaître cette relique. D’après cette même légende, la renommée Muriel Sarkany et l’illustre Claude Barbier furent les dernier·ère·s détenteur·rice·s de cette capricieuse flamme qui, un jour les quitta et disparut. L’histoire devint alors légende, la légende se transforma en mythe et certaines choses qui n’auraient pas dû être oubliées fures perdues. Soudain, une rumeur commença à circuler et ce n’est qu’il y a quelques mois, dans les hauteurs de La Saume, que l’on me mis au courant. Après avoir fait renaître un vieux hangar de ses cendres et transformé ce dernier en salle de bloc, un trio de grimpeurs belges aurait redécouvert ce feu sacré à Bruxelles. Leur surprise fut énorme lorsqu’ils découvrirent cette flamme mythique dans leur futur camp de base. Sachant qu’elle ne leur était pas destinée, ils se sentirent responsables de trouver les prochain·e·s Maître·sse·s du Feu ! Alors, tel la gerbe de flammes sortant de la gueule d’un dragon, un idée jaillit des tréfonds de leurs esprits : une joute sera organisée en l’honneur de
tou·te·s les ancien·ne·s qui leur ont transmis cette passion. Cette compétition hors norme sera baptisée : the Master of Fire. Ce 15 octobre 2022, 350 valeureux.ses guerrier.re.s se donnèrent donc rendez-vous à Ixelles en plein coeur de la capitale belge dans l’arène du jour : Le Camp de base. Les braves arrivèrent à l’aube, les doigts acérés comme jamais, animés par une passion à toute épreuve. Tout au long de la journée, iels ont affronté 50 défis, créés par une escouade de démons aussi machiavélique les uns que les autres. Cette équipe d’ouvreurs n’avaient qu’une envie, voir tomber les plus grand·e·s héro·ïne·s et les empêcher de repartir avec la flamme tant convoitée. Au milieu de cette lutte sans merci, j’ai vu des grandes figures s’élancer dans l’arène. Quelques images me viennent encore à l’esprit : Fanny Gibert, notre championne, montant sur le tapis les yeux noircis par la détermination mais aussi le trio de “Soudain Seul”, se creusant les méninges pour déjouer les sorcelleries de cette compétition. Toi qui me lis, tu douteras certainement de la véracité des faits que je relate mais celles et ceux qui y étaient pourront en témoigner ! Après deux vagues de combats, 14 noms furent retenus pour tenter l’ultime épreuve qui leur permettrait de s’emparer de cette flamme ardente. Une trêve s’imposa dans les combats permettant à deux sages de nous rejoindre : descendu•e•s de leur montagne pour nous inviter à une table ronde, Éline Lemenestrel et Seb Berthe étaient présent•e•s pour embrayer la discussion autour de « la crise écologique et nos contradictions ». Leurs discours furent accueillis avec attention et les débats qui s’en suivirent furent intenses et constructifs : si des solutions existent, nous les touchions du doigt avec nos réponses imparfaites. L’ultime épreuve allait commencer, il était temps pour moi d’entrer en scène. Serais-je à la hauteur d’un tel moment historique ? Un second narrateur me rejoignit, Seb Berthe prit lui aussi le micro afin de m’aider à invoquer au mieux les dieux et les déesses de l’escalade mais aussi l’ardeur du public. Pour parfaire cette cérémonie, Dave Graham en personne s’empara des platines pour créer une ode infinie retentissant jusque sur les plus hauts sommets. Enfin, le dernier acte démarra et c’est dans un fracas de joie et d’émulation que les prétendant·e·s foulèrent le tapis ! À partir de cet instant, tout Bruxelles hurlait à nos côtés et, épreuves après épreuves, blocs après blocs, nous observions et commentions des exercices incroyables mélangeant subtilement force, coordination, équilibre et agilité.
Sous nos yeux, nous avions la fine fleur de l’escalade européenne. Derrière nous, nous avions le plus fantasmagorique des publics : près de 1000 personnes étaient là, entassées dans cette salle pour assister à cette dernière lutte. La flamme, se sentant convoitée, se mit à briller plus fort et à chaque acclamation du public elle grandissait. Elle savait que ses prochain·e·s détenteur·rice se trouvaient là, quelque part sur le tapis. Les combats devinrent de plus en plus féroces. Tou·te·s si proches du but, s’arrachaient la peau dans des hurlements capable de déclencher une terrible avalanche. Les mystiques ouvreurs avaient même proposé un bloc mixte. Cet exercice inhabituel avait pour but de montrer à quel point les championnes présentes pouvaient laisser leurs confrères au tapis. La flamme s’en trouva fort amusée.
Jamais, avec Seb, nous n’avions vu pareil déferlement d’encouragements. Personne ne voulait rater une miette de ce fabuleux spectacle.
Et puis, vint la dernière épreuve, qui pour moi, chèr·e lecteur·rice, fut l’image la plus marquante de ma vie de narrateur. La plus grande championne belge, Chloé Caulier, l’une des mieux classées et des plus proches pour devenir la Maîtresse du feu, fit son entrée avec la plus belle des armures : cette épaisse étoffe de fourrure qu’elle jeta au sol avant de s’élancer dans ce dernier combat sans se poser la moindre question. En l’espace d’un instant seulement, elle se retrouva en haut et c’est dans la communion des cris du public qu’elle comprit...
Ce dernier acte prit fin, tous les grimpeur·euse·s étaient épuisé·e·s. C’est dans une ultime cérémonie que la flamme sacrée pu enfin retrouver de nouveaux
propriétaires : un duo Belge qui aura su faire jouer toute la puissance de leurs talents. Chloé Caulier et Hannes Van Duysen furent ainsi couronné·e·s Maîtresse et Maître du feu. Ce feu restera donc entre les mains de nos amis belges... Quelques temps du moins. Maintenant qu’elle brûle à nouveau ardemment, j’en suis certain, une prochaine édition de cette quête ardente aura lieu ! Après une telle victoire, une telle consécration, c’est évidemment une fête d’anthologie pleine de paillettes que nous, simples mortels, avons pu partager en l’honneur de nos plus grandes idoles. Cette orgie de joie permit de célébrer les vainqueur·euse·s ainsi que tous les grimpeur·euse·s présents. Notre vin de cérémonie fut la cervoise et notre hymne une sombre fréquence basse nous faisant sauter dans tous les sens. Tel le plus grand des délires collectifs, nous avons dansé ensemble jusqu’au bout de la nuit…et quelle nuit ! Une rumeur court déjà à propos d’une prochaine édition… peut-être auras-tu la chance d’être mis.e au parfum au détour d’un sombre tunnel, sur un quelconque sommet ou au fond d’un paquet de frites ? Pour les absents ou les nostalgiques, vous pouvez raviver la flamme ici : www.lecampdebase.be/mof