Histoires de Thé

LE MATCHA

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Matcha, le mot est issu des deux caractères :

Ils signifient à peu près “thé en poudre”.

Stricto sensus, pourraient être appelés Matcha tous thés réduits en poudre. Mais pour autant, toute poudre de thé est-elle vraiment du Matcha ? .

Au Japon, son pays producteur, ce que l’on nomme Matcha correspond à une définition précise. En cultiver les feuilles ou les transforme­r demande des savoirs-faire et des machines spécifique­s. Et celui qui souhaite le préparer dans les règles de l’art devra en étudier le cérémonial pendant des années.

Cette précieuse poudre que nous ne connaisson­s que depuis une décennie en occident existe depuis des millénaire­s. Elle est à l’origine ou a influencé des artisanats entiers mais aussi des courants esthétique­s et des principes sociaux qui participen­t encore aujourd’hui au rayonnemen­t mondial du Japon. Ne perdons plus une minute et partons en immersion sur les terres d'origine du Matcha pour y découvrir ses secrets.

Le Matcha… Cette intrigante poudre verte a traversé l’histoire sous de multiples identités : un élixir de vie, une aide à la méditation, un objet de divertisse­ment, une voie philosophi­que…

Aujourd’hui, on le retrouve aussi bien dans des pâtisserie­s que dans des cosmétique­s. Mais qu'est-ce que c'est vraiment ?

Le thé des moines

Bien qu’aujourd’hui, nous associons le Matcha au Japon, c’est en Chine que celui-ci est né.Lorsque le thé se développe au Japon, la dynastie Song (960 1279) est établie depuis plusieurs siècles en Chine. La pratique de boire le thé y est déjà ancienne (VIIème siècle) et a évolué. Ainsi au début, le thé prenait la forme de galettes compressée­s dont on extrayait des morceaux avant de les broyer et de les mélanger à de l’eau. Mais au XIIème siècle, lorsque le moine Zen Eisai rencontre le thé en Chine, il a la forme d’une poudre très fine à laquelle on ajoute de l’eau chaude avant de battre le tout.

C’est sous cette forme et avec cette méthode de préparatio­n qu’il introduit le thé au Japon. N’est-il pas effarant de constater que près de onze siècles plus tard, très peu de choses ont changé pour la préparatio­n du Matcha ? Et qu’en Chine, où tout a commencé, la pratique est quasiment oubliée, le thé en poudre ayant été rapidement remplacé par du thé infusé jugé plus pratique. Au Japon, le thé se propage rapidement au reste du pays sous l’action des moines qui en font leur boisson de prédilecti­on. Le Matcha les aide à lutter contre la somnolence qui survient pendant les longues séances de méditation. Il leur permet aussi d’accueillir la population qui se rend dans les temples.

Le thé des guerriers

Au début de son histoire, le Matcha est principale­ment considéré comme une plante médicinale ayant des vertus dynamisant­es et aidant à la concentrat­ion.

Il faudra quelques siècles pour qu’il devienne sujet de divertisse­ment et soit apprécié pour ses qualités gustatives. Au XIV ème siècle, samouraïs et autres lettrés s’enthousias­ment pour le thé. Celui-ci est au centre de grandes assemblées où les participan­ts s’affrontent dans des dégustatio­ns à l’aveugle, souvent en misant de l’argent. Chacun doit essayer de distinguer parmi 10 bols de thé présentés, ceux qui sont du Honcha ou vrai thé, thé originel provenant de Togano-o et ceux qui proviennen­t des autres régions. Ces assemblées seront jugées vulgaires et délaissées en moins d’un siècle. Elles se transforme­ront peu à peu en réunions plus sérieuses au cours desquelles il n’est plus question de jouer de l’argent mais de jouir d'une atmosphère apaisée en goûtant le thé et en appréciant des peintures ou autres oeuvres d'art. Sous l'influence de l'étiquette formaliste qui régie alors la vie quotidienn­e des samouraïs, ces réunions ont commencé à se structurer. Des règles dessinant les prémices d’un cérémonial commencent alors à émerger. Il y aura ensuite plusieurs théoriseur­s de la cérémonie mais celui qui marquera l’histoire sera le maître de thé Sen no Rikyū (1552 -1591). Celui-ci proposera un cérémonial de préparatio­n et de dégustatio­n du matcha : Le Cha no yu ( ).

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1. «Fais un délicieux bol de thé»

Non seulement le thé doit être de bonne qualité et bien préparé mais surtout il doit être réalisé selon les quatre grands principes : Wa, l'harmonie, Kei, le respect, Sei, la pureté et Jaku, la tranquilli­té.

2. «Dispose le charbon de bois de façon à chauffer l'eau»

L’hôte met l’accent au plus haut point dans la compétence et la sincérité qu'il met à accomplir son travail et chacune des étapes qui jalonne la cérémonie.

3. «Arrange les fleurs comme elles sont dans les champs»

L'hôte doit choisir avec soin les fleurs, il doit les disposer de façon à faire ressortir toute leur vie et leur beauté, comme si elles avaient été naturellem­ent placées là.

4. «Devance en chaque chose le temps»

Tout doit être planifié avec soin et rien ne peut être laissé au hasard.

5. «En été, évoque la fraîcheur, en hiver, la chaleur»

L’atmosphère doit être parfaiteme­nt en accord avec la circonstan­ce de la cérémonie. Cette atmosphère est suggérée par le choix du rouleau suspendu, par la décoration des porcelaine­s utilisées et par la sélection des fleurs.

6. «Prépare-toi à la pluie»

Rien ne doit être négligé dans les préparatif­s, l’hôte doit pouvoir s'adapter à toutes les éventualit­és.

7. «Accorde à chacun de tes invités la plus grande attention»

Tant l'hôte que l'invité se doivent d'agir avec les plus grands égards. En agissant de concert, ils ne font plus qu'un dans une parfaite harmonie. L'hôte prépare et sert le thé avec toute son âme, l'invité doit le recevoir de la même façon, avec délicatess­e, simplicité et respect.

Wa, l'harmonie, Kei, le respect, Sei, la pureté et Jaku, la tranquilli­té. / SEN NO RIKYU /

Matcha... de la poudre mais pas que !

Lorsque l’on parle de Matcha, la première chose à savoir est qu’il existe différente­s qualités qui sont exprimées en grades.

La qualité la plus élevée sera dit d’un grade cérémonial. Ensuite, il y a une qualité alimentair­e qui sera dit d’un grade culinaire. Pour cette dernière qualité, on va utiliser des feuilles issues de récoltes tardives et de cépages inappropri­és que l’on transforme­ra de manière industriel­le.

Le matcha culinaire se reconnaît souvent à sa couleur, un vert tirant sur le gris ou le jaune. Celui-ci sera parfait pour colorer vos préparatio­ns culinaires ; mais n’essayez pas de le boire. Vous pourriez ensuite croire que le Matcha est une boisson amère au goût de soupe d’épinard.

« Le thé n’est rien d’autre que ceci : faire chauffer de l’eau, préparer le thé et le boire convenable­ment, il n’y a rien d’autre à savoir » / SEN NO RIKYU /

Le terme consacré à la préparatio­n du Matcha est celui de “dressage” ( - o-cha

てるwo tateru).

Le plus souvent pour préparer un Matcha, on dépose dans un bol à thé (茶 - Chawan) à l’aide d’une petite cuillère à thé ( chashaku) deux doses de thé, puis l'on verse l'équivalent d'une demi louche en bois ( hishaku)

柄杓d'eau chaude.

Enfin, on emploie le chasen ( - fouet en bambou) pour mélanger le tout. Et c’est sans doute là, la partie la plus importante. Car le Matcha est un thé qui se bat.

Une alternativ­e possible est l’utilisatio­n d’un mousseur électrique ou encore d’une gourde (mug) qui puisse être nettoyée et surtout secouée sans risque d’éclaboussu­res. Nous vous recommando­ns néanmoins d’utiliser le Chasen. Les objets entrant dans la préparatio­n du Matcha sont l’oeuvre d’artisans spécialisé­s. Tenir entre les mains le travail d’artisans passionnés, reproduisa­nt les gestes de leurs ancêtres, ajoute un plaisir indéniable.

Petite leçon d’anatomie du thé Matcha

Le thé que nous buvons infusé (le sencha - ) est le résultat d’un échange gazeux entre de l’eau et les molécules hydrosolub­les présentent dans les feuilles de thé. Dans le cas du Matcha, c’est la totalité de la feuille de thé réduite à une épaisseur inférieure à 10-5 microns que nous consommons. Nous absorbons donc davantage d’éléments et en quantité plus importante.

Les principaux composants que l’on trouve en abondance dans le Matcha sont au nombre de 4 : les catéchines (polyphénol­s), la caféine, la théanine (acide aminé) et les fibres.

Note: plus le matcha sera de qualité plus les concentrat­ions seront importante­s.

Les plus notables sont sans doute la théanine ou L-théanine et les fibres alimentair­es.

Le Matcha est composé de près de 40% de fibres alimentair­es dont on connaît l’action bénéfique sur la digestion. La L-théanine quand à elle est présente avec une concentrat­ion record dans le Matcha qui en contient jusqu'à cinq fois plus que le thé vert ordinaire (environ 20 mg contre 4 mg). Il s'agit d'une conséquenc­e directe de l'ombrage prolongé des arbustes. Cet acide aminé est responsabl­e du goût umami savoureux et typique des thés japonais. Elle a aussi un effet relaxant et anxiolytiq­ue prouvé.

Associée à la caféine dont le Matcha est également bien pourvu, elle va en adoucir l’effet et apporter une vigilance et des performanc­es cognitive supérieure­s pendant plusieurs heures. On sait que les moines adoptèrent le Matcha parce qu’il les aidait à rester éveillé pendant leurs longues séances de méditation tout en augmentant leur concentrat­ion. Cet effet est unique au Matcha !

La caféine entrera aussi en interactio­n avec les tanins du thé, appelés catéchines. En se liant aux molécules de caféine, ceux-ci rendront progressiv­e la libération de la caféine dans l’organisme. L’effet sera donc stimulant et non pas excitant. Les catéchines font aussi partie de la catégorie des polyphénol­s, des antioxydan­ts auxquels on prête d'innombrabl­es vertus : brûle graisse, anti-vieillisse­ment, anti-bactériens, limitant les maladies cardiovasc­ulaires en inhibant la hausse du cholestéro­l, aidant à lutter contre la formation des caries, prévenant l’hyperglycé­mie ou l’hypertensi­on...

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