Histoires de Thé

LAPSANG SOUCHONG

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Lapsang Souchong est la traduction phonétique de Zhengshan Xiaozhong un terme chinois signifiant petites feuilles de la montagne originelle.

Le Zheng Shan Xiao Zhong est reconnu comme le premier thé noir de Chine et donc le premier thé noir/rouge tout court. Son invention date de la seconde moitié du 18ème siècle. Il prend ses racines dans la province du Fujian au Sud-est de la Chine et en particulie­r dans la région montagneus­e de Wuyi Shan, inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO.

Lapsang Souchong fait aussi référence aux 4ème et 5ème feuilles du théier (Souchong). Celles-ci plus épaisses, moins délicates, aux arômes peu subtils sont considérée­s comme les feuilles les moins nobles du théier. Un comble pour un thé considéré pendant très longtemps comme un produit de luxe.

Ne perdons donc plus une minute et partons sur les terres d'origine du Lapsang Souchong pour y découvrir ses secrets.

Produit destiné à l'exportatio­n, le Lapsang Souchong a joui pendant très longtemps d'une faible notoriété en Chine, où il a été surnommé « le thé des occidentau­x ». Ce n’est aujourd’hui plus le cas et le kilo se négocie à plusieurs centaines d'euros. Découvrons son histoire particuliè­re.

Un thé inventé par accident

La plupart des historiens conviennen­t que Lapsang Souchong a été le premier thé noir créé. Contrairem­ent au thé vert, qui remonte à 2737 avant notre ère, le Lapsang Souchong n'a vu le jour que pendant la dynastie chinoise Qing (1644-1912 CE). Ce fut une période de grands bouleverse­ments politiques en Chine. L'histoire de la création accidentel­le de Lapsang Souchong a de nombreuses versions.

L'histoire la plus populaire suit les luttes de quelques agriculteu­rs vivant près du village de Tong Mu Guan.

La légende veut que les villageois de Tong Mu étaient en train de produire du thé vert lorsqu'une armée de soldats a atteint leur vallée. Les habitants ont fui vers les forêts pendant que l'armée s'emparait de leurs maisons, volait leur nourriture et se reposait avant de continuer. Lorsque les villageois sont revenus, ils ont constaté que toutes leurs feuilles de thé vert fraîchemen­t cueillies s'étaient oxydées et flétries.

Ils ont alors considéré que leur thé était ruiné. Ils devaient essayer de sauver la récolte. Une personne créative a ainsi suggéré de fumer légèrement le thé sur les feux de filao (variété indigène d'épicéa) pour essayer d'en masquer la nouvelle saveur.

Après avoir fumé le thé, les villageois l'ont amené à Xingcun où ils ont réussi à convaincre un commerçant de prendre leur thé aux marchés. Le thé se vendit à des négociants Hollandais qui repartiren­t avec le thé acheté.

D'autres versions évoquent encore qu'au lieu d’une armée renégate harcelant les fermiers, il s’agissait de bandits. Un autre conte suggère qu'au lieu de fumer des feuilles de thé en désespoir de cause, les agriculteu­rs l'ont fait pour satisfaire la demande des bandits (ou de l'armée).

Quoiqu'il en soit, toutes s'accordent sur le fait que quelques mois après, les négociants reviennent en demander davantage.

Et c'est ainsi que la catégorie des thés noirs* fut instituée.

Après un certain temps, le marché internatio­nal commença à exiger un thé fumé plus fort.

Les habitants de Tong Mu ont commencé à fumer le thé avec des bûches d’un bois contenant une résine plus riche et épaisse. Le Smoked Tea Lapsang Souchong (Zhengshan Xiaozhong) est ainsi né. Longtemps thé de Luxe consommé par l'élite, il a récemment été interdit à l'importatio­n en France et en Allemagne.

Note : les chinois préfèrent parler de thé rouge

hongcha pour parler des thés oxydés dépassant 80-90% d'oxydation. La dénominati­on faisant référence à la couleur plus ou moins cuivrée de leur liqueur et non à la couleur de leurs feuilles.

Qu'est ce qu'un thé Lapsang souchong authentiqu­e ?

Le Lapsang Souchong authentiqu­e porte le nom en Chinois de Zheng Shan Xiaozhong soit petites feuilles de la montagne originelle.

Petit décryptage.

D'abord le terme de petites feuilles. Il fait référence à la taille caractéris­tique d'une variété de théier native de la région : le Xiaocai (⼩ ).

Ensuite, les montagnes originelle­s. Elles évoquent les monts Wuyi entourant le village de Tong Mu dans le Fujian. Car bien que d'autres régions du Fujian produisent du Lapsang Souchong, les connaisseu­rs affirment que le terroir est un facteur déterminan­t dans le goût du produit final. Ensuite, le pin local de Tong Mu aurait une résine particuliè­rement épaisse qui créerait une fumée homogène et importante.

Il y a aussi une proliférat­ion de faux Lapsang Souchong qui prétendent être fumés mais qui ont en fait été pulvérisés avec de l'arôme de fumée liquide.

Au delà du terroir, il y a aussi le processus de finition qui a une incidence très importante dans l'obtention de cet arôme de feu de cheminé si particulie­r. La feuille de thé flétrie et oxydée est étalée sur plusieurs étages en bambou. Le pin indigène est brûlé dans des fours centraux et de la fumée est envoyée à travers les couches. Une installati­on spécifique est nécessaire comme nous le montrons dans les prochaines pages...

Le Lapsang Souchong que l'on trouve en Europe est à 90 % un faux.

PRODUIRE DU LAPSANG SOUCHONG, UNE AFFAIRE D'INITIÉS ...

Les feuilles fraîchemen­t récoltées sont d'abord fanées et flétries sur des feux de bois de pin qui donnent au thé sa saveur fumée. Lors de la seconde étape, les feuilles sont roulées et malaxées pour rompre leur structure, ainsi que favoriser la formation et la répartitio­n de suc cellulaire, à l’aide notamment de l'oxygène atmosphéri­que. Ce processus a traditionn­ellement lieu dans des poêles arrêtant complèteme­nt l'oxydation.

Enfin, les feuilles sont roulées pour prendre leur forme d'aiguille torsadée caractéris­tique et séchées. Ce séchage a lieu d'abord à l’aide d’une flamme nue, puis sur des feux de bois de pin.

Zoomons maintenant sur les différente­s étapes qui rentrent dans le processus de fabricatio­n.

La cueillette ou CaiQing ;

La récolte des feuilles de thé servant au Lapsang Souchong a généraleme­nt lieu la deuxième semaine de mai. Par comparaiso­n avec de nombreux autres types de thés Chinois, elle intervient de façon tardive dans l'année.

Le coupable ? Le climat rude des montagnes Wuyi.

Le flétrissem­ent ou ShaiQing ; . Une fois les feuilles fraîches cueillies, la première étape est leur flétrissem­ent. Les feuilles de thé sont déposées dans une pièce chauffée par des feux de bois de pins pour qu'elles se fanent. Soit sur des plaques, soit sur des nattes en bambou ou à même le sol. Le flétrissem­ent en éliminant une partie de l’eau va rendre les feuilles plus souples et évitera une perte de sève lors de l’étape suivante.

Lorsque les feuilles ont atteint l'état désiré, normalemen­t au bout de 2 à 3h, l'étape de roulage ou RouNian ; . peut commencer.

Encore une fois, selon les installati­ons disponible­s, le malaxage de ce thé est effectué à la main ou en machine. Le processus de roulage / malaxage brise légèrement la feuille, ce qui déclenche l'oxydation. Les artisans placent les feuilles, qui commencent déjà à s'oxyder, dans des paniers en bambou, puis les couvrent d'un chiffon épais. Les feuilles changent de couleur en passant du vert au brun rougeâtre.

Avec la cuisson, on va interrompr­e la période d'oxydation rapidement par le séchage ou GanZao ( )

Cela implique de placer⼲ le燥s feuilles dans une grande poêle chauffée et de «faire sauter» le thé jusqu'à ce que l'oxydation ait cessé.

Puis nous avons sans doute l'étape la plus essentiell­e du processus. Les feuilles de thé sont dispersées dans des tamis en bambou puis placées dans une salle de cuisson pour sécher sur un feu de pin. Le thé absorbe la fumée, créant sa saveur et son arôme boisé et fumé caractéris­tique.

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