Amélie du Passage. « Petite Friture » au bout de sa ligne … éditoriale !
Concepteur à la une
Son univers d’éditeur : Ce nom de « Petite Friture » évoque irrésistiblement les senteurs délicieusement grassouillettes qui émanent en bouquets odoriférants de ces charmantes guinguettes jalonnant nos bords de rivière et de mer. Sauf que ce n’est point de cuisine à ambiance bucolique dont il est question avec cette «Petite Friture là », mais de design sur fond d’éditions de créations résolument urbaines dont la figure de proue a pour nom Amélie du Passage.
Son parcours :
Avec ses lunettes dont les montures « hublot » paraissent échapper de l’univers sixtiy de la créatrice Emmanuelle Khanh et son visage lunaire (mais rieur) encadré de cheveux juste ce qu’il faut de décoiffés pour donner dans la cool attitude, la demoiselle du Passage a tout d’un personnage à la Cabu. Sauf qu’une fois franchi le seuil de son studio de création niché au coeur du très branché quartier du Marais où un aréopage de jeunes graphistes s’activent sur leurs écrans dans une ambiance studieuse, la manière ultra business qu’elle a pour évoquer sa stratégie produit et marketing pulvérise d’emblée clichés et à priori. Il faut dire que ce petit bout de femme dont l’allure juvénile n’en affiche pas moins trente quatre printemps au compteur (l’état- civil de Meudon, dans les Hauts de Seine, révèle en effet qu’elle y est née en 1979) n’est franchement pas du genre à laisser le hasard (si tenté qu’il existe!), encore moins l’improvisation, s’immiscer dans sa façon de gérer une affaire mise en orbite en 2009. Une histoire dont cette fille d’un père chimiste ayant longtemps oeuvré dans la plasturgie et d’une mère qui fut décoratrice a voulu commencé seule à en écrire les premières pages. Et si en 2011, elle s’est vue rejointe par Philippe Lehr en qualité de co-associé – elle demeurant en amont de l’activité avec le contrôle de la direction artistique, du choix de la ligne éditoriale et du développement des produits, lui se positionnant sur l’aval avec la responsabilité du développement commercial - « mieux valait me lancer d’abord toute seule, même s’il n’était pas question pour moi de vivre cette aventure en solitaire, tout simplement parce que cela me semblait extrêmement compliqué d’expliquer une ligne éditoriale que l’on a en tête à quelqu’un avant de l’avoir mise en route ». Immergée dès le berceau dans l’amour pour les belles choses et l’ouverture à l’histoire de manière générale et à celle des arts décoratifs en particulier, ce n’est pourtant pas tant un irrésistible appel au design que celle alors adolescente ressent, mais plutôt une furieuse envie d’entreprendre afin « de tracer un chemin empreint de sens sur la base d’un travail en équipe ». Plutôt (très) bonne élève, la voilà qui rallie en 2000 la bannière d’HEC en optant pour la spécialisation « entrepreneuriat ». Pendant les trois années que durent ses études, cette tête chercheuse en perpétuelle agitation des neurones ne cesse de concevoir une foultitude de projets de création d’entreprise. Si aucun d’entre eux n’aboutira au bout du compte, en esprit éminemment positif, elle fait sienne la morale de la fable de La Fontaine « Le lion et le rat » selon laquelle «patience et longueur de temps font plus que force ni que rage » et qu’en conséquence, mieux valait différer un temps ses velléités d’entreprendre plutôt que de risquer de sérieuses embardées pour cause d’inadéquation entre ses désirs et la réalité. Guère présent durant sa période estudiantine, son intérêt pour le design ne s’éveillera que progressivement au rythme de ses expériences professionnelles. Son premier emploi, c’est tout simplement en répondant à une annonce qu’elle le décroche. En l’occurrence, être l’une des plumes de Jean-Jacques Aillagon, à l’époque Ministre de la culture et de la communication. Un poste qui l’amène à se voir rapidement confier le secteur du marché de l’Art. Une première incursion qui lui aiguise un tel appétit pour ce secteur qu’une fois son contrat de chargée de mission achevé une année plus tard, elle réussit à intégrer l’organisation de la FIAC en qualité de secrétaire générale. C’est dans ce cadre qui comportait encore à ce moment-là un secteur design qu’elle contracte le virus pour cette discipline. Une expérience de deux années qui lui ouvre nombre de portes et la convainc d’allier cette passion nouvelle à sa fibre entrepreneuriale toujours présente en créant une entreprise de décoration intérieure. Mais au bout de deux ans d’activité, consciente d’être avant tout intéressée par le travail sur la couleur, la matière et l’objet, la jeune femme prend la décision de passer à la vitesse supérieure en mettant entre parenthèses son agence pour ne plus se consacrer qu’à son nouveau projet de maison d’édition d’objets, de luminaires et de petit mobilier. Mais au fait, pourquoi ce nom si intriguant de « Petite Friture » ? Et son instigatrice de répliquer non sans malice : « Justement pour intriguer ! En fait, cette appellation est un peu à la libre interprétation de chacun. Pour ma part, j’ai voulu évoquer quelque chose de convivial, qui ait un frémissement, à l’image des talents émergents que nous défendons et qui dessinent pour nous ».
Bien que les produits édités par « Petite Friture » soient imaginés par quelques uns des talents parmi les plus prometteurs de la nouvelle scène du design, il ne s’agit pas pour autant de créations pour les galeries. Axées en effet sur une ligne éditoriale clairement voulue fonctionnelle et accessible (tant en style qu’en prix), celles- ci s’inscrivent totalement dans un art de vivre au quotidien même si, tel est d’ailleurs leur grand plus, elles apportent un nouveau regard sur un geste, un moment de vie afin, dixit Amélie du Passage, « de mieux se les approprier, de mieux les chérir ». Parmi les must-have de cette jeune maison d’édition, citons en premier lieu « Vertigo », une suspension de deux mètres d’envergure très légère par son poids et très graphique visuellement signée par Constance Guisset. Évoquons également « Tidelight », la lampe à poser de Pierre Favresse (l’actuel directeur artistique d’Habitat), « Ikebana », le trio de vases en céramique et laque d’Edward Robinson, les objets de bureau en céramique (plumier, vide-poche, serre-livres, horloge) de Luca Nichetto ou bien encore la chaise faite de de lattes de bois contrecollées sur un revêtement à base de liège de Noé Duchaufour-Lawrance. Pour l’heure, le catalogue « Petite Friture » comporte une trentaine de références, à raison d’une dizaine de produits édités chaque année.
Sa distribution :
Celle- ci est multi- canal avec, d’une part, des boutiques multi-marques (grands magasins, boutiques indépendantes allant du design ultra pointu à la décoration généraliste, boutiques de musée, boutiques multi-produits ou spécialisées dans le luminaire, le mobilier ou les objets), d’autre part des architectes, des décorateurs et des bureaux d’achats pour une implantation sur des chantiers BtoB ou BtoC.