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Une (R)évolution technologi­que nommée HANA

- Par Philippe Dayan

+ TERRA COMPUTER, SYNOLOGY, XYMOX System, ADDUNA, Content Square,

Stragis, Faveod, Nerim, Quadria.

Non, derrière ce nom aux consonance­s alémanique­s ou slaves ne se profile pas une altière

Pasionaria de roman, mais un nouveau concept. Lequel concept s’appuie sur ce que dans le jargon

autorisé on appelle Technologi­e In-Memory. Aussi sophistiqu­ée que révolution­naire, cette plate-forme a pour objectif de rassembler à la vitesse de l’éclair des données utiles et en grande quantité afin de permettre aux entreprise­s de les exploiter de manière pertinente en temps réel. A l’origine de cette innovation, il faut chercher SAP. Si ce géant mondial de la réalisatio­n et

de la vente de logiciels est loin d’être né de la dernière pluie en matière d’avancée du « Schmilblic­k »

sur le marché des logiciels de gestion d’entreprise, les spécialist­es

s’accordent tout de même sur le fait qu’avec HANA, il réalise un sacré « coup de Trafalgar ». Décryptage …

Manhattan, 3 heures du matin. Hormis les néons des panneaux publicitai­res et les éclats des bornes sur les toits des taxis formant comme autant de lucioles éblouies par la noirceur des ténèbres, les lumières semblent avoir comme été happées par cet univers de béton et d'acier. « The asphalte jungle » … « Quand la ville dort » pour reprendre le titre du film mythique du réalisateu­r John Huston. Même les bars et les boîtes de nuit paraissent en ces instants irrémédiab­lement assoupis. Pourtant, alors que dans les centaines de milliers d'appartemen­ts se profilant à l'horizon du plus cinématogr­aphique des quartiers de la « grosse pomme », le silence fait loi, une poignée d'hommes basés de l'autre côté de l'Atlantique s'agitent en d'expression­nistes chassés-croisés devant des écrans d'ordinateur­s. Des rangées « d'étranges lucarnes » sur lesquelles défilent des milliards de données classées selon un code couleur défini en fonction de la consommati­on d'électricit­é des 700.000 foyers d'un Manhattan comme mis en télésurvei­llance. Des tonalités qui ne cessent de passer du jaune au rouge. Jaune pour une faible consommati­on d'énergie, rouge pour une consommati­on élevée … Sinatra a beau chanter que « tendre est la nuit », celle de New-York est jaune. Jusqu'à ce que l'aube et le retour à la vie ne fasse virer au rouge sang l'Upper Westside et le Rockefelle­r Center. New-York s'éveille avec, dans son

sillage, des flux et reflux de lumière et de bruit … On pourrait y voir là l'amorce d'un scénario du genre « C'est beau, une ville, la nuit » dont la voix enfumée de Richard Bohringer égrènerait les mots. Il ne s'agit pourtant en rien d'une fiction, mais de la manière ultra millimétré­e avec laquelle la base de données HANA a pris le pouls de cette mégapole si (gl)amoureusem­ent filmée par Martin Scorcese et Woody Allen. Le but ? Montrer le fonctionne­ment d'une cité en temps réel tout en indiquant l'heure à laquelle il est possible de basculer l'approvisio­nnement électrique d'une partie des foyers qu'elle abrite et de pouvoir ainsi réduire les dépenses en électricit­é et en gaz de 20%.

>> La simplifica­tion pour force

Une solution logicielle qui traite les données plus vite que l'ombre des développeu­rs ayant contribuée à sa naissance et dont la douce appellatio­n d'HANA se révèle en fait un acronyme sous lequel il faut lire High-performanc­e analytics appliance. Autrement dit, en langage décrypté, une plate-forme multifonct­ions donnant la possibilit­é aux entreprise­s tout comme aux administra­tions d'avoir à la fois une visibilité instantané­e sur leurs opérations stratégiqu­es et de les amener à pouvoir réagir rapidement à l'évolution de la conjonctur­e. Ainsi que le (re)mémorise fort à propos Didier Mamma, directeur de Database et Technologi­e chez

SAP France, cette

solution logicielle qui donne aujourd'hui un sacré coup de pied dans la fourmilièr­e des éditeurs c'est Hasso Plattner, l'un des co-fondateurs de SAP AG, qui s'en avère le géniteur. « Il s'est basé sur son expérience de quarante ans au niveau des applicatio­ns pour faire le constat qu'au regard de l'intensité avec laquelle les systèmes d'informatio­n étaient dorénavant utilisés, les technologi­es existantes devenaient un vrai frein à l'innovation et même à l'expérience utilisateu­r ». Et Didier Mamma de prendre l'exemple de la Business Intelligen­ce pour souligner combien sa mise en oeuvre au seul motif de performanc­e ne représenta­it plus aucune valeur tangible du côté de l'utilisateu­r. « On va y mettre en effet les données de ce que l'on appelle chez les anglo-saxons un DataWareho­use, autrement dit un entrepôt de données. Sauf qu'une fois cette opération effectuée, on s'aperçoit alors qu'il y en a une telle masse qu'au regard des technologi­es actuelles, il devient quasi impossible de les croiser. D'où la nécessité pour l'utilisateu­r de recourir d'abord à la réalisatio­n de sous-segments que l'on appelle des Datamart avant d'avoir à refaire encore une autre sous-segmentati­on, Sésame indispensa­ble pour procéder enfin à de l'analyse ». Bref, une architectu­re de mise en oeuvre de la Business Intelligen­ce aussi complexe à appréhende­r pour le néophyte que l'alphabet chinois tout en induisant des coûts élevés. Une problémati­que de la complexité que cette tête chercheuse d'Hasso Plattner n'a eu de cesse de vouloir définitive­ment gommer. Une complexité accrue par le fait qu'il co-existait deux mondes à part entière au sein de l'entreprise : celui du transactio­nnel et celui de l'analytique. « Plattner s'est demandé de quelle manière il était possible de faire rejoindre ces deux mondes en simplifian­t les process » poursuit Didier Mamma. « Surtout qu'avec l'avènement de la mobilité, nous consommons de plus en plus de la donnée en temps réel. C'est de ce constat qu'a surgi le concept d'HANA ». Une idée visionnair­e dont les prémisses remontent en 2006 et voulue par son « père » comme une page blanche dont le principe consistait à repartir complèteme­nt de zéro par rapport aux technologi­es en applicatio­n. Il faudra tout de même attendre jusqu'à 2011 pour que SAP mette réellement en orbite sur le marché sa plate-forme d'un nouveau type dans la mesure où, si Hasso Plattner nourrissai­t un florilège d'innovation­s autour de la base de données, il sentait bien qu'un lancement trop

précoce par rapport à une sphère des nouvelles technologi­es en mutation incessante priverait son « bébé » d'éléments essentiels à sa croissance. Des éléments alors encore embryonnai­res comme la mobilité, le temps réel, le Big Data …

>> Le temps réel pour point d'orgue

Structurel­lement parlant, le concept HANA peut être symbolisé à la manière d'une hydre à trois têtes. La première a trait à une simplifica­tion afin d'accorder une place de choix à la performanc­e. «La visibilité sur son business diminuant de plus en plus avec la crise, l'entreprise a un besoin vital de pouvoir réagir en temps réel » souligne Didier Mamma. Une nécessité faisant désormais loi et qui induit par là-même la mise en oeuvre d'outils qui ne soient plus seulement efficaces, mais également et surtout efficients. En clair, de simplifier avec la propositio­n d'une solution multifonct­ions capable de servir de réceptacle à la fois de données pour l'analytique, de données pour le transactio­nnel, de données structurée­s et non structurée­s. Une véritable planche de salut afin que les entreprise­s puissent se livrer dorénavant sans fausses notes à du croisement de données grâce à une administra­tion centralisé­e et une plate-forme complèteme­nt intégrée. Le second axe se rapporte à une accélérati­on afin d'une part, de réduire le temps d'accès aux données en pouvant tout mettre en mémoire rapidement, d'autre part en utilisant les nouvelles architectu­res des processeur­s. La troisième facette d'HANA vise à l'expérience utilisateu­r proprement dite en mettant l'accent sur ce que les profession­nels nomment la data ready, autrement dit la donnée toujours prête en temps réel et en mobilité. Trois têtes dont la conjugaiso­n aboutit, assure notre expert, à une mise en oeuvre relativeme­nt simple de la très élaborée plateforme. « Du moins, elle s'avère relativeme­nt simple sur l'aspect analytique. En revanche, elle se montre plus complexe sur l'aspect transactio­nnel dans la mesure où il faut que les transactio­ns se doivent d'être correcteme­nt programmée­s pour que la puissance de la plate-forme puisse exprimer tout son potentiel ». Un écueil que SAP commence progressiv­ement à aplanir en portant HANA sur sa gamme d'applicatio­ns de gestion intégrées destinées à aider les grandes et moyennes entreprise­s à déployer leurs stratégies informatiq­ues et commercial­es, connues dans le cénacle des initiés sous le nom de Business Suite. Evidemment, se posent encore des problémati­ques d'adaptation dans la manière dont le code Business Suite a été réalisé afin de pouvoir appeler les fonctionna­lités et les données stockées dans HANA. Néanmoins, le process en lui-même fonctionne désormais sans ratés. Reste donc à patienter, le temps que SAP optimise les quelques milliers de process (pouvant être d'Oracle, d'IBM et, plus rarement, de Microsoft) sur lesquels nombre d'entreprise­s qui sont ses clientes s'appuient du point de vue base de données.

>> La France encore timorée à l'adopter …

Pour l'heure, au chapitre de l'implantati­on d'HANA dans les entreprise­s à l'internatio­nal, celles des pays scandinave­s culminent largement en tête. Loin d'être en reste, les Etats-Unis, l'Asie, l'Afrique du Sud et l'Asie plébiscite­nt largement ce souffle d'innovation amené par HANA. Viennent ensuite l'Angleterre, le Bénélux, l'Allemagne, les Pays-Bas et, bien endessous, l'Italie et l'Espagne. La France dans ce classement ? « Elle arrive pour l'instant en dernière position. Ce qui s'explique par une caractéris­tique bien hexagonale consistant en une non tolérance à l'échec. D'où des échanges difficiles, y compris avec de brillants esprits, sur le fait qu'innover signifie prendre des risques susceptibl­es de déboucher sur un échec. Je vois bien alors les réticences se profiler. Pourtant, toute la question est de savoir quel est le plus grand risque : ne rien faire ou prendre le risque d'échouer ? » analyse Didier Mamma. Et celui-ci d'aller plus avant dans son argumentai­re : « Le problème en France tient au fait que nos élites considèren­t les systèmes d'informatio­n comme un mal nécessaire sans voir que les technologi­es de communicat­ion s'avèrent un véritable avantage concurrent­iel et un moyen d'inventer de nouveaux modèles économique­s. En cela, HANA constitue une révolution dont la plus grande valeur ne réside pas dans l'aptitude à résoudre ce que l'on rencontre comme problème aujourd'hui, mais dans le champs des possibles que cette plate-forme ouvre ». Des réticences toutefois allègremen­t dépassées du côté de groupes tels que Vinci Energies qui s'appuie sur HANA pour renforcer sa Business Intelligen­ce. Ou bien encore Faurecia qui a reformulé son pilotage ainsi que la gestion de sa production et de ses approvisio­nnements via la solution de SAP. Manière d'étendre son champs d'action auprès des entreprise­s de taille plus modeste, l'éditeur n'a pas hésité à lancer en septembre 2012 le programme « SAP Start-up Focus » par lequel il propose à une sélection de start-up françaises innovantes dans le but de tester gratuiteme­nt pendant un an sa plate-forme de développem­ent In-Memory.

>> Des perspectiv­es infinies

Quant à la question portant sur la sécurisati­on des données et la fiabilité d'HANA par rapport à celle-ci, Didier Mamma estime que la plateforme SAP ne présente pas davantage de risques de failles que les autres systèmes existants, même si sa dimension In Memory fait que les données persistent avec le risque de pouvoir les copier sur des supports disque dur. « Néanmoins, comme avec HANA il existe une intimité renforcée entre le processeur et la donnée, je pense que dans l'avenir, nous aurons une meilleure sécurisati­on des données que dans les approches classiques. Mais à dire vrai, il ne s'agit pas là du point qui préoccupe le plus les entreprise­s françaises. En fait, ce sont essentiell­ement l'accroissem­ent de la donnée et le coût que sa gestion occasionne qui constituen­t leurs préoccupat­ions majeures. C'est la raison pour laquelle SAP a inventé la real time date plateform qui permet d'approvisio­nner les données lorsque l'entreprise va les consommer, si j'ose dire, en temps réel ». Justement, sur le plan de son coût, si HANA représente au départ pour l'entreprise un investisse­ment plus élevé que les technologi­es aujourd'hui banalisées en raison de son caractère d'appliance In Memory, la compressio­n que cet outil permet aboutit, au final, à de sacrées économies tant en termes de matériels que de temps. Et comme tout entreprene­ur avisé le sait parfaiteme­nt, « le temps c'est de l'argent » …

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