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« MON PRÉNOM VEUT DIRE “PATIENCE”, MAIS JE NE LE SUIS PAS DU TOUT, PATIENTE, NI PONCTUELLE D’AILLEURS. »

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13 ans, après avoir vu une petite annonce affichée dans le quartier, sa mère l’inscrit pour un casting. À sa grande surprise, Abdellatif Kechiche la choisit pour interpréte­r un des deux rôles principaux dans son film L’Esquive (2004), en compagnie d’une autre débutante, Sara Forestier. Cette belle brune qui n’osait pas rêver de cinéma sera nommée pour le César du meilleur espoir féminin. Depuis, Sabrina Ouazani enchaîne les rôles. Au fil de ses prestation­s, elle prouve qu’elle est à l’aise dans tous les registres : drames, films d’auteur et même blockbuste­rs. Nous l’avons rencontrée et fait plus ample connaissan­ce avec elle.

Olivia de Buhren : Qui êtes-vous ?

Sabrina Ouazani : Je suis actrice et réalisatri­ce d’un premier court métrage. J’ai 31 ans et je viens de La Courneuve, en banlieue parisienne.

OB : Quelle est la question que l’on vous pose un peu trop souvent ?

SO : Être une femme et avoir un premier rôle, comment le vivez-vous ? Je me demande toujours si les journalist­es posent ce type de questions aux comédiens hommes. On parle tellement de la parité et de l’égalité homme-femme. On ne devrait plus penser en termes de genre, mais en termes de personne. Lors d’un casting, on ne devrait plus se dire : « J’ai besoin d’une black. »

OB : Quel genre de personne êtes-vous dans la vie ?

SO : Je suis quelqu’un de passionné dans tout ce que j’entreprend­s, je suis souriante, je déborde d’énergie. Quand j’étais petite, on pensait que j’étais hyperactiv­e. Ça se ressent encore aujourd’hui. Mon prénom veut dire « patience », mais je ne le suis pas du tout, patiente, ni ponctuelle d’ailleurs.

OB : Quel est le premier film qui vous a donné envie de faire du cinéma ?

SO : Meilleur espoir féminin de Gérard Jugnot avec Bérénice Bejo. Ça a été un véritable choc pour moi. C’est l’histoire d’une jeune provincial­e qui passe un casting et, tout d’un coup, elle est propulsée à Paris pour un premier rôle dans un film. À cette occasion, elle découvre tout l’univers du cinéma. Je me rappelle cette scène où Gérard Jugnot entre dans la salle de cinéma et découvre pour la première fois sa fille en train de jouer. J’ai longtemps rêvé que mon père se prenne cette même claque en me voyant.

OB : Que disent vos parents de vous ?

SO : J’ai grandi dans une famille très pudique. On ne se dit pas les choses. J’ai découvert que mon père était fier de moi le jour où je suis allée le chercher au travail. En rentrant dans son atelier, j’ai trouvé mon CV et l’affiche d’un de mes films sur le mur. C’était sa manière de me prouver sa fierté. C’était le plus beau cadeau que l’on pouvait me faire.

OB : Vous êtes-vous fait des amis dans le métier ?

SO : Oui. Il n’y en a pas mille, mais il y a ma meilleure amie, Janane Boudili, et aussi Abd al Malik et sa femme Wallen.

On suit le parcours du jeune Clément et de ses meilleurs amis, qui débarquent dans le milieu du rap. On voit leur ascension dans la musique et la manière dont ils vont s’en sortir entre la vie réelle, les problèmes et tous les moyens qu’ils ont mis en place pour gagner de l’argent.

OB : Le rap, c’est votre truc ?

SO : Oui, j’adore. J’ai une culture musicale assez hip-hop internatio­nale et française. En fait, je suis assez éclectique dans mes goûts.

OB : Quel genre écoutez-vous ?

SO : J’aime autant Lauryn Hill que Charles Aznavour. Oui, je sais, c’est le grand écart. J’aime aussi Soolking, Léa Castel, Angèle, Slimane…

OB : Et dans le rap ?

SO : Je suis de la vieille école. J’écoute beaucoup de rap « ancien » : Diam’s, NTM, Mafia K’1 Fry, Kery James. J’ai récemment découvert aussi la musique de Hatik.

OB : Vos trois titres préférés dans votre playlist du moment ?

SO : Loin de moi de Naza, Moi de Lolo Zouaï et Double Shifts de Charlotte Cardin.

OB : Est-ce que vous dansez ? SO : J’adore !

OB : Où pratiquez-vous ?

SO : Je ne suis pas une grande fêtarde. Je ne sors pas trop en boîte de nuit. J’aime danser à la maison, avec mes amis, et jouer au Uno.

OB : Un conseil qui vous a fait du bien ?

SO : Quand Abdellatif Kechiche m’a dit : « Ne cherche pas à jouer, vis-le ! »

OB : Une erreur que vous ne commettrez pas deux fois dans votre parcours profession­nel ? SO : La confiance trop vite donnée. Il y a des gens qui m’ont beaucoup déçue. Je suis quelqu’un de très entier, je donne tout et, quand j’aime, j’aime vraiment beaucoup, sans penser que, derrière, il y a un vice ou quoi que ce soit. Mais, malheureus­ement, c’est déjà arrivé.

OB : Qu’est-ce que l’on peut vous souhaiter ?

SO : Que la vie reprenne son cours normalemen­t. La santé, évidemment, pouvoir continuer à faire ce que j’aime et aussi réaliser mon premier long métrage.

Validé,

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