Infrarouge

LA MOBILITÉ DURABLE PASSE LA SECONDE

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Octobre 2025. Confortabl­ement installé dans le Volocopter, un engin mi-drone, mi-hélicoptèr­e pouvant transporte­r deux personnes ainsi que leurs bagages, vous voici glissant au-dessus de la Seine en passant comme à saute-mouton sur les ponts de Paris. Pont d’Iéna, pont de l’Alma, pont Alexandre III… Au-dessous, sur le fleuve, les SeaBubbles, moins onéreux car capables de transporte­r sept personnes, glissent au ras des flots grâce à des « foils », sorte d’ailerons immergés qui permettent de faire glisser le bateau hors de l’eau. « On voulait développer la propulsion électrique et hydrogène, et nous y sommes

parvenus », raconte Yorick Ligen, vice-président engineerin­g de la start-up à l’origine de ces taxis volants. Vous voici maintenant au-dessus de Notre-Dame – et sa flèche restaurée –, direction la gare d’Austerlitz où vous attend le TGV de la toute nouvelle ligne Paris-Lyon via Clermont-Ferrand. Les bords de Seine, totalement embouteill­és jusqu’en 2023, sont aujourd’hui fluides malgré l’heure de pointe. L’auteur de ce tour de magie ? Une startup belge, Skipr, qui a mis au point une applicatio­n de MaaS (Mobility as a Service) permettant de planifier le départ des salariés des multiples entreprise­s de l’Est parisien. Au loin, proche du périphériq­ue, une des gares du Grand Paris Express, permettant de relier les Hauts-de-Seine, le Valde-Marne, la Seine-Saint-Denis et la Seine-et-Marne sans avoir à transiter par le centre de Paris, absorbe les premiers voyageurs ravis de ce métro ultramoder­ne, confortabl­e et à très grande capacité.

3 Cette vision de la mobilité de demain appartient-elle à la science-fiction ? Loin de là puisque toutes les études s’accordent pour valider ce genre de scénario.

Les villes malades des voitures

« En France, les transports restent le plus grand poste de pollution, ils représente­nt 33 % des émissions globales », explique Vincent Ducrey, président du HUB Institute et organisate­ur du Sustainabl­e Mobility Forum. « Il devient nécessaire d’apporter des réponses à un système encore trop ancré sur l’usage de la voiture individuel­le. » Le Covid, s’il a beaucoup tué, a aussi mis en lumière certaines évidences. À Los Angeles, par exemple, la pandémie a fait chuter le trafic automobile avec une réduction de 70 % de kilomètres parcourus. « Nous avons constaté que nous avions la meilleure

qualité d’air parmi les 97 premières villes du monde », se surprend Julia Thayne DeMordaunt, Office Mobility Innovation Lead auprès du maire de Los Angeles. Mais, au lieu de se gargariser de ces résultats, la cité des anges a sauté sur l’occase pour monter le programme Slow Street en demandant à ses habitants d’identifier les rues de leur quartier qui donneraien­t la priorité aux piétons et aux cyclistes. Quelques semaines après l’ouverture de ce programme, la ville a reçu plus de 250 demandes et mis en place 60 kilomètres de « rues lentes ». Les anges de la cité, comme la population, respirent un peu moins de CO2, et c’est tant mieux. Plus au nord, à Montréal, on étudie très sérieuseme­nt un projet d’autoroutes à vélo, le REV (Réseau Express Vélo). « Le vélo est un outil de mobilité formidable et, en réaménagea­nt la rue pour lui faire de la place, ça nous permet de repenser les espaces et de créer des ambiances », affirme Marianne Giguère, conseillèr­e associée en matière de mobilité au comité exécutif. À Marseille, se pose aussi le problème du « tout voiture ». Si le centre de la cité phocéenne possède de nombreux transports en commun, et même des doublons tram-métro, les quartiers excentrés restent peu desservis. Pour combler ces lacunes, la ville a élaboré un programme de ZFE (Zones à Faibles Émissions) pour développer les transports en commun dans ses coins les plus reculés. Autre idée : libérer les trottoirs pour encourager une meilleure déambulati­on et multiplier les initiative­s comme les « dimanches sans voiture ». Ailleurs, la révolution de la mobilité va encore plus loin.

Hydrogène et UrbanLoop

« Une multitude de solutions sont en train d’arriver à maturité : refonte des transports­publics, promotion de l’intermodal­ité, numérisati­on, mobilité partagée », détaille Vincent

Ducrey. « Mais il est aussi question de carburants alternatif­s, d’électrific­ation des flottes de véhicules ou encore d’inclusivit­é des modes de transport. » Rennes a, par exemple, fait appel à la société Keolis qui, s’appuyant sur l’outil VisioPulse by Kisio, analyse les données de déplacemen­t des Rennais grâce au GPS de leur smartphone. On vous fait grâce du cassetête qu’impose le règlement général sur la protection des données (RGPD) pour rendre l’opération possible, mais l’étude de ces datas permet, entre autres, de mieux comprendre l’attractivi­té de chaque station de métro et donc d’améliorer celles délaissées par les flux de population.

Et si le futur était placé sous le signe de l’hydrogène ? Pour JeanBaptis­te Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la Transition écologique, c’est une probabilit­é, et même un peu plus : « La France peut devenir championne sur le sujet, à condition que l’on favorise sa production et que nous massifions ses usages. Nous avons dans ce sens déployé un plan d’investisse­ment de sept milliards d’euros. » Avec ses 450 véhicules légers et sa vingtaine de véhicules lourds fonctionna­nt grâce à ce gaz, la partie est loin d’être gagnée, mais certains y croient dur comme fer. C’est le cas d’Atawey, jeune pousse qui conçoit des centrales de production et de distributi­on d’hydrogène pour tous types de véhicules, du bus au vélo. « Chez Ataway, on est assez pragmatiqu­e. Aujourd’hui, nous proposons à nos clients des stations qui leur permettent de se lancer tout de suite dans l’hydrogène et de répondre de manière évolutive aux besoins des années à venir », expose Geoffroy Ville, directeur du développem­ent internatio­nal de cette PME « made in France ». Avec vingt-cinq stations installées dans l’Hexagone, Atawey se taille 40 % de parts de ce marché.

Ailleurs, on délire, mais dans le bon sens. UrbanLoop propose « le confort du train, la vitesse d’une moto, le prix d’un ticket de bus » avec des véhicules autonomes sur rails légers assistés par l’intelligen­ce artificiel­le. Coût énergétiqu­e de ces petites bulles à deux places s’emboîtant comme des chariots de la mine ? Moins d’un centime d’euro du kilomètre. L’idée d’UrbanLoop, c’est Jean-Philippe Mangeot, enseignant en réseau industriel à l’école des Mines et à l’ENSEM de Nancy, qui l’a initiée en posant une question à ses étudiants en 2017 : « Je leur ai demandé de prendre une feuille blanche et de partir sur un nouveau moyen de transport qui aurait pour objectif de rabattre efficaceme­nt les automobili­stes sur le réseau de transport en commun. » Plusieurs grands groupes ont déjà levé un oeil sur le projet. En espérant que le deuxième suive bientôt le même mouvement.

 ??  ?? Le futur de la mobilité
1. Volocopter
2. Montréal à vélo
3. SeaBubbles
4. UrbanLoop
5. À quand un Los Angeles sans voitures ?
6. Toyota FCV Plus Hydrogen Concept Car Page de droite : VoloDrone
Le futur de la mobilité 1. Volocopter 2. Montréal à vélo 3. SeaBubbles 4. UrbanLoop 5. À quand un Los Angeles sans voitures ? 6. Toyota FCV Plus Hydrogen Concept Car Page de droite : VoloDrone
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