Infrarouge

ALAN TAUDON, CUISINE DE SENS ET D’ÉMOTIONS

- Par Anne Debbasch

Sous la baguette de cette figure montante de la cuisine, L’Orangerie, table confidenti­elle du George V auréolée d’une étoile au Michelin, attire tous les fins gourmets. Avec maestria, le chef compose des assiettes où légumes et poissons tiennent le premier rôle.

Lové sous la verrière qui lui sert d’écrin intimiste, le restaurant se dévoile comme un jardin secret. 18 couverts, un service aux petits soins et une carte où seuls deux menus sont proposés, en cinq ou sept services. « Christian Le Squer m’a confié les clés de L’Orangerie en 2018, après huit ans passés à ses côtés chez Ledoyen, puis au George V. Il me fallait imaginer une carte à l’identité propre, qui trouve sa place entre Le George et Le Cinq. Le végétal et les poissons se sont imposés à moi. Une propositio­n qui avait du sens et correspond­ait à cette salle tout en longueur, profilée comme une serre. C’était une opportunit­é et un véritable challenge », explique le chef.

Avec minutie et passion, il se concentre sur le végétal, qu’il place en majesté. Infusions, décoctions de plantes fraîches et autres fleurs n’ont pas de secrets pour lui. Les sauces, légères et aromatique­s, mettent en scène l’ingrédient. Incisives, vives, avec des touches piquantes ou plus douces, arrondies, acidulées ou légèrement fumées, elles parfument, cajolent, habillent et occupent une place à part entière. Les légumes et les poissons à la cuisson parfaite viennent s’en napper. Les saucières, souvent grandes oubliées des tables gastronomi­ques, reviennent en force, riches d’arômes et de textures. Une gourmandis­e retrouvée, d’une modernité folle. Et personne n’y résiste. « Il faut se familiaris­er avec cette approche végétale pour mettre en valeur ce que nous cuisinons habituelle­ment en garniture. Le légume devient majeur, il faut penser autrement, créer une partition de musique sans fausses notes, travailler des contrepoin­ts en petites touches et réhabilite­r les sauces. Ce sont elles qui vous emmènent ailleurs, elles sont la robe de mariée, l’accompagne­ment parfait du végétal, une belle façon de lui rendre hommage. »

Les desserts, réalisés de concert avec le chef pâtissier Michaël Bartocetti, sont de la même veine. Audacieux, parfois décalés, ils viennent raconter la fin de l’histoire. La responsabi­lité environnem­entale est évidemment au centre de l’assiette, et tout est mis en place pour diminuer l’utilisatio­n de plastique et organiser la gestion des pertes. Cerise sur le gâteau, Alan Taudon refuse de servir des fruits d’été en hiver. À sa table, il se vit quelque chose de différent, une invitation au voyage, une initiation aux saisons, une cuisine de sens.

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