FRÉDÉRIC BODENES directeur artistique et image du Bon Marché
Cette performance théâtrale est une libre inspiration d’Au bonheur des dames. Que reste-t-il du roman de Zola ?
On retrouve certains personnages, d’autres ont été créés et, aux 14 chapitres du roman, répondent 14 saynètes. Les puristes ne seront pas déçus !
Transformer le magasin en théâtre pour faire découvrir l’histoire vous a été inspiré par la pièce Sleep No More, lancée en 2011 à New York.
En effet. C’est arrivé comme une évidence. L’anniversaire des 170 ans du Bon Marché était la meilleure occasion pour transformer le magasin en énorme pièce de théâtre immersif et faire vivre à nos clients une expérience unique, en dehors du commerce, et faire découvrir notre histoire. J’avais vu Sleep No More, il y a dix ans, c’était un moment fantastique. Faire ça dans un grand magasin, la nuit, je trouvais l’idée enthousiasmante !
Qu’est-ce qui vous avait séduit dans Sleep No More ?
Le fait de se confronter aux acteurs, de monter sur scène, de participer sans participer. Le côté mystérieux et fantasmagorique. J’avais aussi beaucoup aimé « l’après », lorsque chacun raconte ce qu’il a vu.
Cela a-t-il été difficile de trouver la troupe capable de relever le défi ?
J’ai mis du temps, j’ai cherché dans toute l’Europe ! Jusqu’à ce que je rencontre la compagnie Crumble Production. Nous sommes partis ensemble en séminaire pour imaginer les grandes lignes de la pièce, et Crumble a écrit les 14 saynètes.
L’originalité de cette expérience immersive, c’est qu’aucun spectateur ne vivra la même soirée. Effectivement. Selon où on se trouve et où on se déplace, personne ne verra ou ne comprendra les mêmes choses durant les deux heures de cette « nuit magique ». Il faudrait voir dix fois Au bonheur des dames pour tout vivre !
Un teaser ?
Nous sommes partis du principe que Zola s’est trompé quand il a écrit Au bonheur des dames. Les protagonistes vivent donc dans le mensonge depuis 170 ans et, ce soirlà, il faut découvrir la vérité : les acteurs sont comme des fantômes qui reviennent dans le grand magasin pour découvrir avec vous la vérité.
Ce printemps, à l’occasion des 30 ans des Vieilles Charrues, vous aviez transformé le Bon Marché en « lieu de vie et d’émotion ». Cette fois, c’est le théâtre. Est-ce l’évolution des grands magasins d’aujourd’hui ?
Nous ne faisons que reprendre ce que les Boucicaut avaient déjà inventé il y a 170 ans avec des ateliers de lecture, des fanfares… Un grand magasin ne peut plus être un simple lieu de vente. Il doit se différencier, être un petit monde qui fait rêver. C’est cette valeur immatérielle, artistique, culturelle, créée autour du produit, qui fait notre singularité.