Infrarouge

MARIE-CLAUDE PIETRAGALL­A, LA FEMME QUI DANSE

Entre sa compagnie, son centre de formation, ses apparition­s à la télévision et ses deux pièces de théâtre, l’artiste plurielle ne chôme pas. Aujourd’hui, celle qui se fait appeler « Pietra » nous parle de son seule-en-scène, La Femme qui danse. Rencontre

- Par Olivia de Buhren

VPourquoi ? ous ne voulez pas dire que vous êtes danseuse, mais « la femme qui danse ».

Pour moi, ce qui compte le plus, c’est l’humain, avec la mécanique du corps et toute sa poésie. Le plus intéressan­t pour nous, artistes, c’est de toucher les choses les plus enfouies.

Comment vous est venu votre amour de la danse ?

J’ai eu un choc quand ma mère m’a emmenée voir un ballet de Maurice Béjart. Je me suis rêvée sur scène. J’ai aimé voir tous ces corps en mouvement, cette poésie.

Vous sentez-vous mieux sur scène ou dans la vie ordinaire ?

J’ai la sensation de pouvoir dialoguer plus facilement sur scène. Je sens que je peux appréhende­r le monde sous un prisme différent.

Vous dites de votre nouveau spectacle que c’est le plus intime. Pourquoi ?

C’est un spectacle dont j’ai écrit les textes, une sorte de réflexion sur mon métier de danseuse et sur tout ce qui me fait vibrer. Et puis, j’interprète un seul et unique personnage : le mien. C’est un témoignage assez unique. J’allie la danse et la parole en direct. C’est un travail pointu et très personnel de souffle et d’énergie.

Est-ce un spectacle autobiogra­phique ?

Oui, c’est mon histoire. Mais, au-delà de ça, je voulais parler de la danse et de tout ce que cela apporte. Danser est une philosophi­e de vie, une façon de bouger, d’être, de penser.

Pourquoi parler et danser en même temps ?

La chorégraph­ie met en lumière le texte, et vice et versa. Les deux vont ensemble.

Au niveau du souffle et de la concentrat­ion, c’est très éprouvant. Pourquoi ajouter cette difficulté ?

C’est en effet très difficile. Il y a tout un travail pour réussir à lier les deux. Avec Julien Derouault, nous formons de jeunes artistes à cette technique unique. Pour nous, la transmissi­on, l’oralité sont très importante­s.

Le spectateur a le sentiment que vous vivez une forme de voyage sensoriel entre la voix, le corps, les émotions et la musique.

Oui, c’est exactement cela. Le plus important est le souffle et l’énergie que l’on met dans le corps. Nous mettons tous nos sens en éveil. Ce spectacle est un voyage à travers les cinq sens.

Appréhende­z-vous avec sérénité le temps qui passe ?

Oui, j’ai eu la chance d’appartenir à une époque extraordin­aire avec de grands noms qui ont marqué l’histoire de la danse. Aujourd’hui, il n’y a malheureus­ement plus de grands noms, certaineme­nt parce qu’il y a une volonté d’immédiatet­é, la société va très vite. Et puis, on dévalorise aussi l’interprète, ce qui est dommage. Mais je suis heureuse de mon parcours et de ce que je continue à faire avec passion. Je ne regarde pas le passé. Uniquement devant moi.

Pouvez-vous solliciter autant votre corps aujourd’hui qu’hier ?

C’est différent. J’exerce beaucoup de responsabi­lités. Mes journées sont épuisantes. Je ne gère pas mon corps de la même façon que quand j’avais 20 ans. J’ai une hygiène de vie très sérieuse. Je ne pense pas aux années qui passent. C’est un état d’esprit, un regard sur la vie. Je ne m’intéresse qu’aux choses qui me font vibrer.

Avez-vous toujours envie de continuer à créer des spectacles ?

Je suis très étonnée de tout ce que j’ai fait dans mon existence. Je ne me serais jamais projetée à l’âge que j’ai sur scène. Aujourd’hui, je prends la vie comme elle vient et je me réjouis de travailler avec de nouveaux artistes.

La Femme qui danse de Marie-Claude Pietragall­a et La Leçon d’Eugène Ionesco, chorégraph­ie et mise en scène de Marie-Claude Pietragall­a et Julien Derouault, au théâtre de la Madeleine puis en tournée dans toute la France.

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