SE PORTER CAUTION POUR UN LOCATAIRE
Votre enfant souhaite que vous vous portiez caution pour le paiement de son loyer. il vous est difficile de lui refuser, mais, avant de vous engager, prenez la mesure des implications qu’un tel acte comporte.
Difficile de dire « non »… On se porte généralement caution pour un enfant, un membre de sa famille ou un ami pour lui rendre service afin de lui permettre de trouver plus facilement une location immobilière. Pourtant, la signature que vous apposez sur l’acte de caution ne constitue pas une simple formalité. Loin de là ! C’est un acte par lequel vous vous engagez, vis-à-vis du bailleur, à payer les sommes qui lui sont dues par le locataire en cas de défaillance de sa part. Les conséquences ne doivent pas en être négligées. En effet, si vous ne respectez pas vos obligations, le bailleur pourra alors engager des poursuites à votre encontre! Voici cinq questions pour comprendre la portée de votre engagement.
➜ Le bailleur peut-il refuser un Locataire qui ne présente pas de caution ?
Alors qu’au regard du code pénal, un bailleur se rend coupable de discrimination s’il refuse des lo- cataires en raison « de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur état de santé, de leur perte d’autonomie,… » (C. pénal, art. 225-1), en revanche, la loi ne lui interdit pas d’écarter une personne qui ne présenterait pas des garanties financières suffisantes. Pour s’assurer du paiement des loyers, il est alors en droit d’exiger du candidat locataire qu’il lui présente une personne se portant caution pour lui.
À noter : Un bailleur qui a déjà souscrit une assurance, ou toute autre forme de garantie, garantissant les obligations locatives du locataire (1) ne peut toutefois pas demander, en plus, une caution ; sauf s’il loue le logement à un étudiant ou un apprenti.
➜ Le bailleur peut-il refuser La caution proposée ?
La loi (du 6 juillet 1989, art. 22-2) donne la possibilité au bailleur de demander à la personne qui se porte caution un certain nombre de pièces justificatives (liste exhaustive fixée par le décret n°2015-1437 du 5 novembre 2015 - Annexe II) afin de prouver qu’elle dispose des moyens financiers suffisants pour se substituer au locataire en cas d’impayés. Si, en dépit de cela, le bailleur conserve un doute sur la solidité financière de la caution proposée, il peut la refuser. En revanche, le fait que cette dernière n’ait pas la nationalité française ou qu’elle ne réside pas sur le territoire métropolitain n’est pas un argument valable (loi du 6 juillet 1989, art. 22-1).
« Le bailleurpour le reste choix souverain de
son locataire tant que les
critères qui le motivent ne sont pas discriminatoires ; et refuser de louer à une personne qui n’aurait pas de caution valable est tout à fait légal » précise Cécile Nlend, juriste PAP. fr.
➜ Le bailleur peut-il se retourner contre moi sans poursuivre au préalable Le Locataire ?
Cela dépend de l’engagement signé, la loi prévoyant deux formes de cautionnement : simple ou solidaire.
• Si la caution donnée est simple, le bailleur doit avoir préalablement épuisé tous les recours dont il dispose contre le locataire (y compris la saisie et la vente de ses biens) avant de pouvoir se retourner contre vous, s’il n’a pu être ainsi payé. « Ce mode de cautionnement est devenu très marginal, indique Cécile Nlend ; les propriétaires n’ont, en effet, aucun intérêt à l’accepter. Et comme ils ont souvent le choix entre de nombreux dossiers, ils prendront celui qui propose une caution solidaire ». Si vous êtes plusieurs à cautionner le locataire, le bailleur ne pourra poursuivre chaque caution qu’à concurrence de sa part.
• En cas de caution solidaire, le bailleur pourra agir directement contre vous dès le premier incident de paiement sans avoir à se retourner au préalable contre le locataire défaillant. En outre, même s’il y a d’autres personnes qui se sont aussi portées caution, le propriétaire peut réclamer la totalité de la dette du locataire à une seule d’entre elles en choisissant celle qui lui semble la plus solvable.
À noter : « Si la mention : caution solidaire n’apparaît pas dans le contrat, la caution est alors présumée simple », souligne Cécile Nlend.
➜ quelles sont Les sommes Que je cautionne ?
« Dès lors qu’elle n’est pas explicitement limitée dans l’acte de cautionnement, l’obligation de la caution peut
s’étendre à tous les frais incombant au locataire : loyers et charges mais également frais de remise en état des lieux en cas de dégradations, indemnités d’occupation si le locataire se maintient dans les lieux après expulsion,… », explique David Rodrigues, juriste logement auprès de l’association de consommateurs CLCV (www.clcv.org). Lisez attentivement l’acte avant de signer !
➜ Pendant combien de temPs est-ce que je m’engage ?
Si vous vous êtes porté caution pour une durée déterminée (ce qui doit être clairement indiqué dans l’acte, par exemple: « je m’engage pour la durée du bail initial, soit 3 ans »), votre engagement cessera automatiquement à l’expiration de ce délai. Vous ne serez alors plus tenu des dettes qui pourraient naître postérieurement.
Si, en revanche, aucune indication de durée n’est précisée ou s’il est écrit dans l’acte de caution que vous vous êtes engagé pour une durée indéterminée (ex. : « pour toute la durée de la location »), votre engagement dure jusqu’au départ du locataire. Il vous est cependant possible de vous délier de cet engagement, de manière unilatérale, et à tout moment, en adressant au bailleur une lettre recommandée avec AR. « Toutefois, précise David Rodrigues, la garantie ne cessera pas à la réception de ce courrier par le bailleur mais au terme du bail en cours (initial ou renouvelé) ». Exemple : Pour un bail conclu pour 3 ans, si vous dénoncez votre engagement au bout de 2 ans, vous serez néanmoins tenu des dettes jusqu’à l’arrivée du terme, soit pendant encore un an.
« Attention, avertit David Rodrigues, même lorsque l’engagement a pris fin (terme arrivé ou départ du locataire), la personne qui s’était portée caution peut quand même être sollicitée par le bailleur pour répondre de dettes nées à l’époque où elle était encore caution ».
Conclusion: pour se porter caution d’une personne, mieux vaut avoir une totale confiance en elle, ou pouvoir contrôler son mode de vie... ou être prêt à lui venir en aide pendant des années, compte tenu de la durée de l’engagement!