UN COÛT FISCAL EN DÉFAVEUR DE LA PROPRIÉTÉ
Propriétaires et locataires ne sont pas soumis aux mêmes impositions. La fiscalité doit donc être prise en compte d’autant qu’elle pèse de plus en plus sur la propriété.
Avec l’embellie de l’immobilier, beaucoup rêvent d’acquérir un toit pour se sentir « chez eux » et sécuriser l’avenir. Mais avant de sauter le pas, il faut faire ses comptes sans oublier la variable des impôts. Car être propriétaire a un coût fiscal dont il ne faut pas sous-estimer le poids sur l’achat et la détention d’un logement. Et ce malgré les avantages fiscaux attachés à la résidence principale.
Droits De mutation : à la charge De l’acheteur
Tout commence le jour de la signature de l’acte de vente définitif du logement. Le futur propriétaire doit acquitter, en plus du prix de vente, des frais annexes proportionnels communément appelés « frais de notaire ». En réalité, sauf la rémunération proprement dite du notaire (pour l’acte), ceux-ci sont essentiellement destinés au Trésor Public pour le compte duquel le notaire collecte les frais d’enregistrement ou la TVA (simulateur de calcul disponible sur le site immobilier.notaires.fr). En effet, l’acquéreur d’un logement ancien supporte des droits d’enregistrement dont le taux global est dans la grande majorité des cas de 5,80665 % du prix de vente. Quelques rares départements font exception, ayant décidé de ne pas voter une augmentation du droit départemental de 3,80 % à 4,5 % comme la loi les y autorise (soit un taux global de 5,09006 % encore applicable en Indre, en Isère, dans le Morbihan, en Martinique et à Mayotte). Les droits d’enregistrement sont en principe calculés sur le prix de vente indiqué dans l’acte de vente. Ce prix de vente est, le cas échéant, augmenté de toutes les charges qui incombent normalement au vendeur et qui sont facturées à l’acquéreur (par ex, la quote-part de taxe foncière payée par l’acquéreur pour la période antérieure à son entrée en jouissance).
Pour réduire l’assiette des droits, il est intéressant de ventiler le prix dans l’acte de vente afin de faire apparaître distinctement de l’immobilier le prix
d’une cuisine équipée ou d’une bibliothèque par exemple, la valeur des équipements mobiliers ne supportant pas les droits d’enregistrement. De la même façon, une économie peut être réalisée en stipulant que la commission due à l’agence est à la charge de l’acquéreur. À défaut (commission à la charge du vendeur), les droits sont calculés sur le prix de vente augmenté de la commission. En revanche, il est vivement déconseillé de verser en liquide au vendeur une partie du prix de vente (dessous de table) dans le but de réduire les droits à payer. Si le fisc découvre la manoeuvre et prouve une dissimulation de prix, il peut infliger une majoration de 80 % des droits dus sur la partie occulte du prix assortie de l’intérêt de retard de 0,40 % par mois.
IMPÔTS LOCAUX : PLUS LOURDS POUR LES PROPRIÉTAIRES
Les impôts locaux pèsent de plus en plus sur le budget des ménages. Si toutes les personnes disposant d’un logement doivent mettre la main à la poche tous les ans pour acquitter la taxe d’habitation (TH), les « heureux propriétaires » doivent de surcroît verser la taxe foncière (TF). Selon une étude sur la fiscalité immobilière en Europe réalisée par le cabinet Fidal en octobre 2014 pour la Fédération des Promoteurs Immobiliers, la France détient la palme en matière d’impôts locaux, la TF pouvant représenter 10 % du prix d’achat d’un logement neuf sur 10 ans !
La taxe d’habitation (TH) à payer par tous. La TH touche toute personne qui dispose d’un logement suffisamment meublé pour y habiter (ainsi que ses dépendances immédiates) qu’elle l’occupe en tant que propriétaire, locataire ou occupant à titre gratuit. L’occupant au 1er janvier en est redevable pour l’année entière, même s’il a déménagé après cette date. Dès lors qu’il s’agit bien de sa résidence principale, l’assiette de la taxe, qui est fonction de la valeur locative du logement, bénéficie d’abattements de droit ou facultatifs. C’est également à ce titre qu’il est éventuellement possible, sous certaines conditions très précises, de revendiquer une exonération, ou un plafonnement de la taxe (voir IP n°747, novembre 2016). La taxe foncière (TF), incombe au seul propriétaire. Seul le propriétaire en titre est juridiquement redevable de la TF et de ses taxes annexes (notamment, taxe pour l’enlèvement des ordures ménagères, taxe de balayage). Un locataire ne peut donc se voir refacturer le montant de la TF par son bailleur. La TF est établie d’après la situation au 1er janvier de l’année d’imposition. Elle est due pour l’année entière, même en cas de vente en cours d’année. Toutefois, dans une telle situation, il est possible de prévoir, dans l’acte de vente, une répartition de la TF entre acheteur et vendeur au prorata de nombre de mois pendant lesquels chacun a été respectivement propriétaire du bien. Un tel accord n’est cependant pas opposable au fisc. Les cas d’exonération sont rares. Il s’agit tout d’abord de celle applicable aux constructions nouvelles qui sont en principe exonérées totalement pendant 2 ans, sous réserve du dépôt obligatoire d’une déclaration spéciale. Par ailleurs, les personnes âgées ou invalides disposant de faibles ressources peuvent sous certaines conditions bénéficier d’une exonération de TF.
Valeurs locatives: une épée de Damoclès. La TF est, comme la TH, assise sur la valeur locative du bien au 1er janvier de l’année. Cette assiette repose, hélas, sur des critères ne reflétant plus du tout la réalité du marché puisqu’elle date de 1970! Une aberration qui conduit à ce que certains paient anormalement peu, tandis que ceux qui ont acquis un bien neuf doivent assumer une ardoise beaucoup plus lourde. Une réforme des valeurs locatives des locaux d’habitation a bien été lancée en 2010 afin de les rapprocher des loyers réellement pratiqués, mais elle a pris du retard.
Si elle voyait le jour, certains propriétaires d’immeubles anciens de centre-ville pourraient voir flamber leur facture de TF. Par ailleurs, certains départements et
communes n’hésitant pas à jouer sur le levier fiscal pour faire face à leurs dépenses, il existe de fortes disparités de taux d’une collectivité locale à l’autre. Avant d’acheter ou de louer un logement, il est donc recommandé de se renseigner au préalable sur le poids des impôts locaux en interrogeant le vendeur ou le bailleur, ou en s’adressant au service du cadastre du lieu de situation du bien.
CRÉDITS D’IMPÔT (CITE) : POUR LE PROPRIÉTAIRE COMME POUR LE LOCATAIRE
Acheter ou louer un logement nécessite parfois des travaux. Sous réserve d’en respecter les conditions, certaines dépenses relatives à l’habitation principale peuvent, en partie, être financées au travers de crédits d’impôt restituables en cas d’excédent par rapport à l’impôt dû. Tel est le cas, par exemple, du crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) ou du crédit d’impôt pour dépenses d’aide à la personne et la prévention des risques. Ces deux avantages fiscaux sont ouverts tant au propriétaire qu’au locataire d’un logement dès lors qu’il constitue sa résidence principale. Ils se cumulent avec le taux réduit de TVA de 10 % applicable aux travaux effectués dans les immeubles achevés depuis plus de 2 ans (5,5 % pour les dépenses éligibles au CITE).
ISF ET PLUS-VALUE DE CESSION : UN RÉGIME DE FAVEUR POUR LA RÉSIDENCE PRINCIPALE
Être propriétaire de sa résidence principale peut aussi être synonyme d’ISF pour certains contribuables. En effet, la limite d’imposition fixée à 1,3 million € peut être atteinte lorsque l’on possède, outre un patrimoine de rente, un grand appartement ou une maison dans une grande ville. Dès lors que le bien fait partie du patrimoine au 1er janvier, il doit être déclaré après application d’une décote de droit de 30 %. Constituant bien souvent l’essentiel du patrimoine taxable, il convient d’apprécier au plus juste sa valeur vénale. Un exercice délicat à documenter avec soin pour être en mesure de répondre à toute question du fisc. S’ajoute à cela l’incertitude qui pèse quant au sort qui pourrait être réservé à l’ISF après l’élection présidentielle. Si le candidat François Fillon prône sa suppression, le candidat Emmanuel Macron entend quant à lui recentrer l’ISF sur la « rente immobilière » tout en maintenant l’abattement de 30 % sur la résidence principale. À noter enfin que, malgré les refontes successives apportées au régime de taxation des plus-values immobilières, la vente de la résidence principale reste pour l’heure exemptée de toute taxation sous réserve de satisfaire les conditions requises. Mais qu’en sera-t-il demain si une nouvelle réforme venait à être proposée ?