Intérêts Privés

FENÊTRE SUR COUR : ARGENT : LES LIMITES DE LA SOLIDARITÉ ENTRE ÉPOUX

SI LA SOLIDARITÉ FINANCIÈRE EST IMPORTANTE ENTRE MARI ET FEMME, ELLE N’EST PAS TOTALE. QUEL QUE SOIT LE RÉGIME MATRIMONIA­L.

- MICHEL RAVELET (1) 1 civ. 5 octobre 2016 n°15-24.616

L’article 1415 du Code civil est clair et d’ordre public : l’emprunt contracté par un époux n’engage pas l’autre si celui-ci n’a pas donné son consenteme­nt préalable. Cet article, Jacques X.. en a pris connaissan­ce avec beaucoup de plaisir, après avoir reçu une lettre de sa banque l’informant que le découvert sur le compte de sa femme était passé du simple trou à un véritable abysse et qu’il fallait d’urgence le combler. Un courrier rappelant, en outre, que les deux époux étant mariés sous le régime de la communauté universell­e, leurs biens respectifs ne font qu’un ! Comment s’en sortir? Justement en invoquant cet article 1415! Jacques va soutenir qu’à aucun moment il n’a donné son accord pour que sa femme bénéficie d’un découvert sur son compte de dépôt. Derechef, la banque soutient évidemment qu’un tel découvert n’est pas assimilabl­e à un emprunt mais à une simple facilité de caisse.

UN ÉPOUX CONTRACTE UN DÉCOUVERT IMPORTANT, SON CONJOINT, QUI N’A PAS DONNÉ SON ACCORD, N’EST PAS ENGAGÉ SOLIDAIREM­ENT À LE PAYER

Direction, bien sûr, les tribunaux, où la banque va finalement perdre. Les juges de la Cour de cassation, contredisa­nt sur ce point ceux de la cour d’appel de Metz, vont rendre un arrêt important (1) : quel que soit le régime matrimonia­l choisi, même la communauté universell­e, un conjoint ne peut engager que ses biens propres, s’il en a, et ses revenus pour souscrire un découvert bancaire ou un emprunt. Il n’engage pas ipso facto la solidarité financière de l’autre conjoint qui n’a pas expresséme­nt donné son accord. Un accord qui, la Cour ne le dit pas, mais cela semble une évidence, doit se faire par écrit et avant la mise à dispositio­n des fonds ou du découvert. Idem pour un cautionnem­ent. Les juges vont quand même souligner que cette absence de solidarité financière connaît deux exceptions : en cas de sommes de faible importance ou de dépenses nécessaire­s à la vie courante du ménage.

Que se passe-t-il alors pour Jacques..? Les biens de la communauté sont évidemment concernés par la dette de sa femme, mais pas ses biens propres. Il ne paiera donc pas les pots cassés…

MÊME LA COMMUNAUTÉ UNIVERSELL­E N’ENTRAÎNE PAS UNE TOTALE SOLIDARITÉ FINANCIÈRE DES ÉPOUX.

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