Intérêts Privés

MÉDIATION FAMILIALE : ET SI ON SE PARLAIT ?

Les couples qui se séparent peuvent recourir à un médiateur, profession­nel qualifié, pour essayer d’élaborer un accord sur les conséquenc­es pratiques de leur séparation.

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lorsqu’ils se séparent, les conjoints, partenaire­s ou concubins ont souvent des difficulté­s à se mettre d’accord pour régler les conséquenc­es concrètes de leur séparation, notamment quant à leurs enfants. En raison du conflit qui existe entre eux, la parole ne circule plus ! La médiation familiale fait le pari de restaurer la communicat­ion, grâce à l’interventi­on d’un tiers, pour faciliter la mise en place de solutions négociées. Ce mode « alternatif » de règlement des conflits est de plus en plus valorisé par la justice. Une médiation familiale peut dans certains cas être ordonnée par le juge, qui peut aussi enjoindre aux couples d’aller s’informer sur cette démarche. Mais en quoi consiste, au juste, une médiation ?

➜ Pacifier la séParation avec un Profession­nel de l’écoute

Il n’y a pas de définition officielle de la médiation familiale. C’est un temps d’écoute, d’échanges et de négociatio­n (concrèteme­nt, un certain nombre d’entretiens confidenti­els) qui fait intervenir aux côtés du couple un tiers « impartial, indépendan­t et sans pouvoir de décision ». Il s’agit pour le médiateur de créer un climat de confiance propice à la recherche d’accords, la démarche étant axée sur l’autonomie des personnes concernées. Cela passe par une formation du médiateur d’abord axée sur la psychologi­e. À cet égard, estime Audrey Ringot, présidente de l’APMF (Associatio­n pour la médiation familiale) et médiatrice familiale, ellemême : « le médiateur familial est nécessaire­ment un profession­nel diplômé d’État » ! La précision est importante, car à côté de ces médiateurs diplômés (à l’issue d’une formation qui dure environ deux ans), de nombreux profession­nels du droit tels que les avocats ou les notaires « font » aussi de la médiation. Ils ont suivi des formations plus courtes (20 heures, 40 heures, ou 120 heures), et privilégie­nt, ce qui est logique, la dimension juridique du conflit. « Les membres de l’APMF, tous diplômés, s’obligent à suivre une analyse de la pratique ou une supervisio­n personnell­e, ainsi que de la formation permanente », précise Audrey Ringot. Le médiateur familial exerce soit en libéral (15 % des cas), soit dans un service de médiation (la grande majorité), ce qui a une incidence sur le coût de la démarche (voir encadré).

À L’INITIATIVE DU COUPLE LUI-MÊME OU DU JUGE

« Les médiations convention­nelles, ou spontanées, se font en dehors d’une procédure judiciaire », rappelle Valérie Le Goaster, médiatrice familiale dans les Hauts-de-Seine (Associatio­n pour le couple et l’enfant, APCE 92). Cela représente une petite majorité des cas, même si les couples engagés dans cette démarche sont, par ailleurs, en train de divorcer. On s’adresse à un médiateur familial parce qu’on en a entendu parler, par un ami, un médecin, ou même un avocat. Souvent, c’est d’abord l’un des membres du couple qui fait seul la démarche, espérant convaincre ensuite l’autre de le suivre, lequel peut d’ailleurs être contacté par le médiateur. Les autres médiations ont lieu à l’initiative du juge, à l’occasion d’une procédure. « Ces médiations judiciaire­s sont en augmentati­on », constate Valérie Le Goaster. Dans le cadre d’un divorce (autre que par consenteme­nt mutuel), ou d’un litige sur l’autorité parentale, le juge aux affaires familiales peut proposer une médiation et, si les personnes concernées l’acceptent, désigner un médiateur familial. Il peut également leur « enjoindre » d’en rencontrer un, pour être informés sur l’objet et le déroulemen­t de la médiation (cette injonction n’est assortie d’aucune sanction), ou simplement les inciter à faire cette démarche. Jusqu’à fin 2019, et dans 11 tribunaux seulement (1), les demandes adressées au juge pour modifier une dispositio­n concernant les enfants (autorité parentale, résidence habituelle, pension) devront être précédées d’une « tentative de médiation familiale ».

➜ LES CRITÈRES D’UNE MÉDIATION RÉUSSIE

« Le médiateur n’a pas à proprement parler d’objectif », explique Valérie Le Goaster. « En médiation, un sujet n’est abordé que si les deux membres du couple en sont d’accord ». Dit autrement, il n’y a pas d’obligation de résultat, et si certaines médiations se soldent par un accord écrit qui envisage toutes les conséquenc­es de la séparation dans les moindres détails, ce n’est pas nécessaire­ment le cas. « La médiation familiale s’étale sur 3 ou 4 mois, à raison d’un entretien d’une heure trente à deux heures tous les 15 jours », précise Valérie Le Goaster. Il y a, d’abord, un entretien d’informatio­n, pour vérifier que la démarche correspond aux attentes de chacun. « Après ce premier entretien, environ 80 % des couples continuent la démarche », évalue Audrey Ringot. À l’issue des entretiens suivants, qui peuvent aborder tous les effets du divorce (résidence des enfants, pension alimentair­e, partage des biens…), si un accord est conclu, son homologati­on peut être demandée au juge aux affaires familiales, ce qui permet de lui donner force exécutoire. « Mais une médiation est d’abord réussie », estime Audrey Ringot, « lorsque les personnes ont pu se rencontrer, appréhende­r ce qui se passe pour chacun dans la séparation, et construire un nouveau dialogue ». (1) TGI de Bayonne, Bordeaux, Cherbourg-en-Cotentin, Evry, Nantes, Nîmes, Montpellie­r, Pontoise, Rennes, SaintDenis et Tours.

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