TÉLÉCHARGEMENT ET STREAMING : VOS DROITS
Télécharger un film, une série ou un album ou encore les regarder ou les écouter sur internet… est devenu une pratique courante. Mais, si vous choisissez la voie de l’illégalité, vous vous exposez à des sanctions pénales !
Télécharger sur son ordinateur ou sa tablette, par une connexion Internet, des films ou des musiques ou encore les regarder ou les écouter en streaming est un geste qui fait désormais partie de notre quotidien. Nombre de sites légaux donnent ainsi aux internautes la possibilité de le faire en streaming soit gratuitement (généralement entrecoupé de publicités), soit en payant un abonnement (à partir de 7,99 €/mois pour Netflix, 6,99 €/mois pour filmotv) ou à la carte (à partir de 2,99 €, par exemple, pour un film loué 48h. sur cinemasalademande.com). Mais Internet, en facilitant le partage de fichiers, a également ouvert la voie à des propositions de téléchargement ou de streaming illégales. L’illégalité consiste à récupérer (reproduire par enregistrement) une oeuvre protégée par un droit d’auteur sans en avoir l’autorisation ou encore à la regarder sur un serveur qui n’a pas obtenu les droits pour la diffuser auprès du public. Les pouvoirs publics ont toutefois choisi de ne pas considérer automatiquement l’internaute dans l’illégalité comme un fraudeur intentionnel, mais comme un consommateur égaré à remettre sur le droit chemin… C’est ainsi que la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) a mis en place un dispositif chargé, dans un premier temps, d’avertir l’internaute hors-la-loi. Ce n’est que si le contrevenant persiste dans l’illégalité que la Haute autorité s’orientera vers une sanction pénale.
➜ Que se passe-t-il lorsQue le téléchargement illégal est avéré ?
En principe, quiconque télécharge illégalement une oeuvre protégée par un droit d’auteur, s’expose à une sanction pénale. Car, au plan du droit, le téléchargement illégal constitue le délit de contrefaçon de droits d’auteur passible d’une peine, au maximum, de 3 ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende (C. de la propriété intellectuelle, art. L. 335-2 et s.). « En pratique, toutefois, explique Maître Olivier Iteanu, avocat (1), ces poursuites pénales sont très rarement mises en oeuvre contre les particuliers qui téléchargent occasionnellement. Elles visent plutôt ceux qui partagent un très grand nombre de fichiers vidéos et/ou audio ou les plateformes proposant des téléchargements en toute illégalité ».
Dans la grande majorité des cas, le contrevenant va plutôt faire l’objet d’une procédure spéciale mise en place par la Hadopi (voir ci-après).
➜ Premier avertissement HadoPi
Si vous avez reçu un e-mail d’avertissement de la Hadopi, c’est que votre connexion a été repérée comme ayant été utilisée pour effectuer des téléchargements illégaux (voir encadré). « Il faut savoir, précise Julien Lausson, journaliste pour Numerama, que la procédure Hadopi ne concerne que les téléchargements illégaux effectués via des plateformes de partage de fichiers (réseaux dits peer to peer, comme BitTorrent, eMule). Elle ne s’attaque pas aux personnes qui téléchargent par des liens directs ».
Comme il s’agit d’une première détection frauduleuse, vous n’allez recevoir qu’un simple courriel vous avertissant que vous avez manqué à l’obligation de surveillance de votre connexion à internet (ce sont peut-être vos enfants qui ont téléchargé à votre insu…). C’est pourquoi, avant d’envisager une quelconque sanction pénale, la Hadopi va d’abord vous avertir que votre connexion a servi
à pirater des films, séries TV et/ou de la musique et vous recommander de « prendre sans délai toutes mesures utiles pour éviter une nouvelle
atteinte au droit
d’auteur ». À cet effet, l’autorité va vous ren- voyer sur des fiches pratiques en ligne sur son site (https ://www.hadopi. fr/ressources/fiches-pratiques) destinées à vous permettre d’obtenir diverses informations afin
de sécuriser votre ligne. Elle vous indique également comment accéder aux offres légales de téléchargement disponibles sur le marché, via www.offrelegale.fr. Cet e-mail constitue la première phase du dispositif actionné par la Hadopi et qui en comporte trois.
• Phase 2 : 2ème avertissement par email + courrier
Si votre connexion est de nouveau repérée dans les 6 mois suivant l’envoi du premier courriel, vous allez en recevoir un nouveau, doublé d’une lettre envoyée en recommandé. Ces missives vont vous avertir des sanctions auxquelles vous vous exposez en continuant de la sorte.
• Phase 3 : la notification
Si rien n’a changé 12 mois après le deuxième avertissement, un dernier courrier vous sera envoyé, toujours en recommandé, vous informant que des poursuites pénales sont susceptibles d’être désormais diligentées à votre encontre (C. de la propriété intellectuelle, art. R.335-5).
Dans la mesure où vous avez ignoré ses deux premiers avertissements, la Haute autorité peut, en effet, transmettre votre
dossier au procureur de la République qui décidera de vous poursuivre ou non devant le tribunal de police. Si la contravention de « négligence caractérisée » (voir encadré) est retenue par le juge, vous encourrez alors une amende pouvant aller jusqu’à 1500 € (doublée en cas de récidive). « Depuis juillet 2013 (décret n° 2013-596 du 8/7/2013), il n’est plus possible d’assortir cette sanction pénale d’une suspension - pour une durée maximale d’un mois - de la connexion internet du contrevenant », indique Maître Olivier Iteanu.
➜ RegaRdeR un film en stReaming
Le streaming permet de regarder des films, des séries ou d’écouter de la musique sans avoir besoin de les télécharger (donc sans copie). Certaines plateformes, comme Youtube, Dailymotion (pour les vidéos) ou encore Deezer ou Spotify (pour la musique), proposent un accès gratuit et légal à leur contenu. Vous pouvez ainsi visionner les différentes vidéos ou écouter les albums mis en ligne sur ces sites sans débourser un centime. Mais attendez-vous alors à ce que le film, la série ou encore l’album soit entrecoupé de publicités. Le streaming peut également être payant, comme sur Canalplay.com, Google play, netflix.com, filmotv.fr. L’accès peut être à la pièce ou sur abonnement. À noter dans le domaine de la musique, l’offre d’abonnement payant à Deezer (9,99 €/mois) qui permet d’écouter de façon illimitée des albums, sans aucune publicité et avec une haute qualité de son.
Ces formules simples et peu coûteuses encouragent à l’utilisation du streaming légal. Mais, même en dehors, le risque d’être poursuivi pour avoir regardé ou écouté une oeuvre protégée sur un site de streaming illégal est quasi-inexistant. En premier lieu, parce qu’il faut prouver que la personne avait conscience de l’illicéité de son acte. Or, il n’est pas toujours évident de faire la différence entre un site de streaming légal et un autre illégal… Encore que maintenant, il vous est possible de vérifier si le site de streaming est référencé comme légal en consultant www.offrelegale.fr (site dépendant de la Hadopi). En outre, l’utilisateur du streaming n’ayant pas téléchargé de fichiers de vidéos ou de musique, il est difficile de le considérer comme coupable de contrefaçon (même si techniquement le streaming nécessitant le stockage provisoire des données sur l’ordinateur, le temps du visionnage ou de l’écoute, il serait possible de considérer qu’il y a eu, un moment, possession d’une copie de l’oeuvre). D’ailleurs, pour l’heure, aucune décision de justice n’a abondé en ce sens.
Enfin, comme expliqué ci-dessus, la procédure de la Hadopi ne concerne que le téléchargement illégal en peer-to-peer. « Attention toutefois, prévient Julien Lausson, certains sites, sous couvert de se présenter comme des sites de streaming, utilisent en fait une technologie de P2P (comme le protocole BitTorrent) pour acheminer l’oeuvre jusqu’à l’internaute. De sorte que, dans cette hypothèse assez particulière, un internaute pourrait voir son adresse IP identifiée dans le cadre de la procédure mise en place par la Hadopi ».
En revanche, celui qui propose en streaming sur internet une oeuvre (et ce, même s’il l’a achetée en toute légalité et la partage gratuitement), sans autorisation de l’auteur commet le délit de contrefaçon de droit d’auteur. L’auteur et ses ayants droit peuvent également s’attaquer à l’éditeur ou l’hébergeur du site qui, eux, enfreignent directement le droit d’auteur. (1) Auteur de « Quand le digital défie l’Etat de droit », Editions Eyrolles, 2016.