RÉVEILLEZ VOTRE ÉPARGNE SALARIALE : ARBITREZ-LA !
De nombreux salariés laissent dormir leurs avoirs sur le fonds monétaire de leur PEE, et perdent de l’argent ! Il y a mieux à faire pour gagner plus, sans impôt.
Christophe Eglizeau, le directeur général de Natixis Interépargne, pousse un cri d’alarme : « les salariés ont la chance de disposer d’un réel potentiel qui doit être mieux valorisé ! ». Car si 10,3 millions de salariés bénéficient d’un dispositif d’épargne entreprise (PEE, PERCO, etc), ils ne s’y intéressent, pour la plupart, que de loin, lorsqu’ils perçoivent leur participation ou leur intéressement. C’est dommage, car il s’agit de l’une des meilleures enveloppes d’épargne. Le moment est donc venu de reprendre en mains votre
épargne salariale, dont les encours s’élèvent à 131,5 milliards d’euros, d’après l’AFIN, Association française de la gestion financière.
Une goutte d’eau, certes, par rapport aux 1 700 milliards d’euros de l’assurance vie. Mais cette épargne salariale représente, pour certains épargnants, la quasi-totalité de leur patrimoine, constituée main dans la main avec leur entreprise. En effet, les salariés bénéficient d’un coup de pouce de leur employeur, qui peut verser un abondement pour les encourager à utiliser ce dispositif. « Les grandes entreprises sont les plus généreuses : le taux d’abondement atteint en moyenne 100 %, alors qu’il est fréquent, dans les PME, de ne pas verser d’abondement », constate Olivier de Fontenay, associé d’Eres.
PAS D’IMPÔT SUR LES GAINS, MAIS DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX
Cela signifie que pour 100 euros versés sur son PEE par le salarié, son employeur ajoute jusqu’à 100 euros (si abondement) qui lui sont immédiatement acquis. Une véritable aubaine. D’autant que le régime fiscal du PEE est très favorable : les gains sont exonérés d’impôt sur les plus-values, seuls les prélèvements sociaux (17,2 %) restant dus. Les sommes sont bloquées cinq ans, mais de nombreux cas de déblocage anticipés sont prévus. Ainsi, vous pouvez récupérer votre capital pour acheter votre résidence principale, en cas de mariage ou de Pacs, de naissance d’un troisième enfant, de divorce, etc. Pour l’heure, la moitié des sommes détenues sur un PEE sont disponibles (car placées depuis plus de 5 ans), mais les salariés les laissent fructifier à l’abri de l’impôt.
ARBITRAGE À FAIRE
Reste cependant à prendre soin de cette épargne salariale placée, c’est-à-dire à la gérer activement. Ce que les salariés ne font pas aujourd’hui puisque les fonds monétaires représentent un quart des encours d’épargne salariale (hors fonds d’actionnariat salarié) d’après une étude du groupe Eres. Une hérésie à double titre. D’abord parce qu’il n’est pas logique de placer une épargne à moyen terme (puisque le PEE est bloqué cinq ans) sur un support de placement de très court terme (le monétaire). Ensuite parce que les fonds monétaires affichent des performances désastreuses dans le contexte actuel de taux d’intérêt à court terme au plancher : 100 % des FCPE monétaires ont affiché une performance négative en 2017, à -0,35 % en moyenne, d’après les calculs d’Eres !
Investir en monétaire reste donc, avant tout, une bonne façon de s’appauvrir. « Le fonds monétaire est généralement le choix par défaut, qui recueille l’intéressement et la participation du salarié lorsque celui-ci ne manifeste pas d’autre choix », indique Cécile Adjani, directeur de la stratégie et du développement chez BNP Paribas Épargne Retraite et Entreprise. Cela signifie que les salariés se retrouvent investis en monétaire tout simplement faute de s’intéresser suffisamment à leur épargne entreprise. Et leurs économies fuient comme un vieux robinet… Dommage !
PRISE DE CONSCIENCE
Notons tout de même une bonne nouvelle :
« les salariés sont de plus en plus conscients de la réalité économique des fonds monétaires. Ils se positionnent désormais vers les autres placements. Pour mémoire, les monétaires représentaient encore 40 % des encours d’épargne salariale il y a cinq ans », ajoute Olivier de Fontenay. Les actions de sensibilisation des sociétés de gestion auprès des salariés portent donc leurs fruits peu à peu. De même, certaines entreprises ont modifié le fonds par défaut au profit d’un produit obligataire court terme ou diversifié prudent pour les nouveaux versements. Reste au salarié à prendre en mains son épargne pour optimiser sa performance. Car la palette de produits disponibles sur un PEE est suffisamment large pour éviter le monétaire, l’offre compte en général entre cinq et dix fonds. « Il faut trouver le juste équilibre : une offre réduite présente l’avantage de la simplicité et de la lisibilité pour tous les salariés, mais une offre plus fournie permet de couvrir précisément toutes les classes d’actifs par degré de risque », indique Dominique Dorchies, directrice générale
adjointe de Natixis Interépargne.
Le fonds Solidaire rencontre un franc succès
À noter : les entreprises ont l’obligation de proposer un fonds solidaire, qui consacre 5 % à 10 % de son actif au financement de structures solidaires. Le solde du portefeuille peut être diversifié ou investi en actions ou en obligations. Ces produits connaissent un franc succès puisque leur encours atteint 7,4 milliards d’euros fin 2017, en hausse de 19 % sur un an.
Au-delà de ce fonds solidaire, vous avez au minimum le choix entre un fond de type prudent, équilibré et dynamique, dont la répartition entre obligations et actions varie en fonction du risque souhaité. Si vous travaillez dans une grande entreprise cotée en Bourse, vous avez également accès à un fond d’actionnariat salarié. Ces produits pèsent à eux seuls 50,7 milliards d’euros d’après l’AFIN, soit 38,5 % du total placé en épargne salariale.
Le fonds monétaire est généralement le choix par défaut, qui recueille l’intéressement et la participation du salarié lorsque celui-ci ne manifeste pas d’autre choix » Cécile Adjani, directeur de la stratégie et du développement chez BNP Paribas Épargne Retraite et Entreprise
Aller vers des fonds davantage investis en Actions selon votre durée de placement
Pour choisir le ou les fonds dans lesquels investir, il faut tenir compte de votre aversion au risque, mais aussi de votre horizon de placement : si vous prévoyez d’acheter votre résidence principale dans deux ans, et de débloquer votre PEE à cette occasion, mieux vaut investir dans un fonds prudent pour ne pas risquer de sortir en perte si les marchés actions évoluent défavorablement d’ici là. Mais si cette épargne a vocation à financer un projet plus lointain, il est logique de prendre une dose de risque plus importante, ce qui implique un fonds davantage investi en actions. Il reste d’ailleurs possible de modifier vos choix à tout moment. « L’idéal est de vérifier une à deux fois par an comment évolue son capital, pour réaliser des arbitrages si nécessaire », recommande Cécile Adjani chez BNP Paribas ERE.
perco : gestion sur pilote automatique !
Pour la gestion d’un PERCO, dispositif d’épargne salariale dédié à la préparation de la retraite, le choix est beaucoup plus simple. En effet, les entreprises ont l’obligation de proposer une gestion pilotée, gratuite, dont l’allocation d’actifs évolue en fonction de l’horizon restant avant la retraite. Ainsi, un salarié de 35 ans détiendra plus d’actions que son collègue de 55 ans. Cette gestion pilotée connaît un succès croissant puisque 48 % des salariés l’ont choisie fin 2017, un chiffre en hausse de 36 %.
« Dans certaines entreprises, la gestion pilotée tient compte non seulement de l’horizon de placement, mais aussi du degré d’acceptation du risque de l’épargnant, qui a le choix entre plusieurs grilles de sécurisation de son épargne », précise Dominique Dorchies chez Natixis Intérépargne.
Attention, le PERCO est cependant moins souple que le PEE car il est bloqué jusqu’à la retraite. Les jeunes salariés sont souvent plus enclins à lui préférer le PEE, dont ils peuvent sortir après cinq ans. Mais la possibilité de récupérer les sommes versées sur un PERCO pour acheter sa résidence principale apporte cependant une certaine souplesse.