Intérêts Privés

FENÊTRE SUR COUR : FRAUDE BANCAIRE : QUI PAYE ?

L’USAGE FRAUDULEUX D’UNE CARTE BANCAIRE N’ENGAGE PAS SON TITULAIRE. SAUF EN CAS DE GRAVE NÉGLIGENCE… COMME LA RÉPONSE À UN E-MAIL MANIFESTEM­ENT DOUTEUX.

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Àquelque chose, malheur est bon ! Si Pierre X.. a eu bien des soucis, cela lui aura appris un nouveau mot de vocabulair­e : « hameçonnag­e ». Comme quasiment tout le monde, il a reçu des courriels lui demandant des renseignem­ents confidenti­els sur son compte bancaire sous prétexte de mise à jour de ses données ou pour dépister une éventuelle fraude. Lui est au Crédit Mutuel et le courriel en imite parfaiteme­nt le logo, même si le texte est plein de fautes d’orthograph­e. Alors Pierre va répondre et remplir scrupuleus­ement le soi-disant certificat de sécurité ; tout y passe, les numéros de ses deux comptes, celui de sa carte bancaire, ses codes de sécurité… La suite est évidente : 2700 € d’achats frauduleux avec sa carte et 4 500 € de virement bancaire.

Douché et moins crédule face à la réalité, Pierre demande à la banque de lui recréditer les sommes escroquées. Il invoque pour cela le code monétaire et financier, qui stipule que la banque doit rembourser les utilisatio­ns frauduleus­es de son compte. Le seul fait d’un détourneme­nt de fonds, sans action du titulaire du compte, oblige l’établissem­ent financier à assumer financière­ment l’escroqueri­e et les écritures anormales effectuées sans signature.

EST NÉGLIGENT LE CLIENT D’UNE BANQUE QUI TRANSMET SES DISPOSITIF­S DE SÉCURITÉ PERSONNALI­SÉS EN RÉPONSE À UN COURRIEL CONTENANT DES INDICES DE PROVENANCE DOUTEUSE

C’était oublier que ce même code met une condition que va rappeler la Cour de cassation après des années de conflit judiciaire (1) : que le titulaire du ou des comptes n’ait pas manqué, « par négligence grave, à son obligation de prendre toute mesure raisonnabl­e pour préserver la sécurité de ses dispositif­s de sécurité personnali­sés ». Certes le détourneme­nt d’un moyen dématérial­isé de paiement n’engage pas le titulaire du compte (la banque doit rembourser) mais encore faut-il que ce titulaire n’ait pas lui même répondu à « un courriel qui contient des indices permettant à un utilisateu­r normalemen­t attentif de douter de sa provenance, peu important qu’il soit, ou non, avisé des risques d’hameçonnag­e ». Trop naïf, Pierre ne sera pas remboursé, mais il s’est enrichi d’un mot de vocabulair­e…

(1) ch. com. 28 mars 2018 n°16-20.018

RÉPONDRE À UN COURRIEL DEMANDANT VOS CODES BANCAIRES NE PERMET PAS DE SE PLAINDRE EN CAS DE FRAUDE.

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