Visite historique des lieux :
Un exemple unique de l’architecture hygiéniste
Après l’épidémie meurtrière qui a frappé Barcelone à l’été 1821, Marseille craint un nouvel épisode de fièvre jaune. Pour éviter l’affolement de la population et la paralysie du commerce maritime, l’Intendance sanitaire commande en urgence un nouvel établissement sanitaire à l’architecte du département, Michel-Robert Penchaud, en remplacement de l’ancien lazaret de Saint Martin d’Arenc, devenu vétuste. Construit sur l’île de Ratonneau, à 4km au large de Marseille, l’hôpital Caroline, ainsi nommé en hommage à Caroline de Bourbon Sicile, la veuve du Duc de Berry assassiné en 1820, est conçu pour accueillir 48 malades et 24 convalescents. Modèle de l’architecture hygiéniste, il est constitué de douze petits pavillons isolés, répartis symétriquement autour d’une chapelle de style grec. « Tout l’agencement du site a été pensé de façon à éviter les contagions », souligne Isabelle Guérin. « Ainsi, les patients infectés, qui arrivaient par bateau, pénétraient par un monumental escalier en fer à cheval au Nord tandis que les personnels en bonne santé avaient, eux, une entrée réservée à l’Est. » Pour permettre un renouvellement continu de l’air, des ouvertures semi-circulaires sont prévues au rez-de-chaussée et des claires-voies au premier étage. Chaque quartier dispose, en outre, d’une citerne destinée à récupérer les eaux de pluie pour la boisson, la toilette des malades, la blanchisserie et la cuisine. Remarquable réussite architecturale, l’hôpital inauguré en 1828 ne remplira finalement jamais la fonction qui devait être la sienne au départ. En l’absence de cas déclaré de fièvre jaune, il servira tour à tour d’entrepôt pour les balles de laine, de logement pour les ouvriers oeuvrant sur l’île, avant d’être reconverti, au début du XXe siècle, en hôpital militaire puis en dépôt d’armes. Bombardé par les Alliés en 1944, il est laissé à l’abandon avant de devenir propriété de la Ville en 1970.