DEVENEZ « MÉCÈNE » POUR SOUTENIR L’ART
AIDER LE PATRIMOINE ET BAISSER SES IMPÔTS très courante aux États-unis, la philanthropie artistique commence à se développer en France, avec l’aide notamment d’incitations fiscales. Explications.
Si vous êtes amateur d’art, pourquoi ne pas devenir mécène à l’instar de certaines célébrités et grandes fortunes ? En province comme en région parisienne, les opportunités pour soutenir ce secteur varié allant de la musique aux arts vivants, en passant par la préservation du patrimoine bâti et paysager ne cessent d’augmenter. Et pour cause, les subventions en provenance de l’État se réduisent au fil des années pour les structures culturelles publiques. Faire preuve de générosité à leur égard procure des contreparties en nature, notamment des visites privées d’exposition en soirée ou le jour de fermeture, voire à une invitation à des spectacles, proportionnelles à la valeur du don. Bref, le mécène est un peu plus qu’un simple bailleur de fonds anonyme. Prenons l’exemple du château de Versailles. Depuis 1995, avec son musée et son domaine national, il constitue un établissement public doté d’une autonomie de gestion administrative et financière. Les amoureux du Château du Roi Soleil peuvent rejoindre la Société des Amis de Versailles en versant une adhésion annuelle. En
Mécénat culturel et entreprise
Un dirigeant d’entreprise ou un professionnel libéral peut parfaitement donner un coup de pouce aux activités artistiques en profitant d’un avantage personnel. « Les TPE et PME sont de plus en plus nombreuses à se lancer collectivement dans le mécénat culturel lors de grands événements locaux comme Un été au Havre, ou l’Industrie Magnifique à Strasbourg ou bien à travers des clubs de mécènes comme Prisme à Reims ou encore Mécènes du Sud à Marseille » explique Léa Morgant, responsable culture à l’Admical (association développant le mécénat des entreprises). Fiscalement, les versements opérés par des entreprises aux structures d’intérêt général ou d’utilité publique ouvrent droit à une réduction d’impôt de 60 % du montant du don dans la limite de 5 pour mille du chiffre d’affaires annuel. Moyennant quoi, les mécènes reçoivent des contreparties en nature, par exemple sous forme de mise à disposition gratuite de visites d’exposition ou d’une salle d’un musée ou encore des places de concert dans un festival.
contrepartie ils auront droit à des visites privées d’exposition en soirée ou le jour de fermeture, voire à une invitation à des spectacles dans le superbe Opéra Royal.
CAMPAGNE DE MÉCÉNAT POPULAIRE
Toujours à Versailles, il existe des campagnes permanentes ou ponctuelles de financement. La dernière en date permet d’ « adopter » une statue parmi la trentaine de la Chapelle Royale, dans le cadre de travaux soutenus par la Fondation Philanthropia, créée par la banque privée suisse Lombard Odier. Les statues en pierre de Tonnerre se dressent, à l’extérieur, sur le faîte de la Chapelle conçue par Mansart. Afin de les remettre en état, il est possible de parrainer une statue moyennant un don de 10 000 euros, assorti d’une réduction d’impôt sur le revenu (voir plus loin). Depuis près de quinze ans, le Château fait appel aux mécènes pour « adopter » des statues, des bancs et même des arbres de son parc à partir de quelques milliers d’euros. L’adoption peut s’effectuer en solo ou en association avec des parents ou des amis. Avec près d’une dizaine de campagnes de mécénat populaire à son actif, le musée du Louvre est lui aussi bien rôdé à ces opérations. À deux pas, se trouve un lieu emblématique de l’histoire de Paris : « l’arc de Triomphe du Carrousel de Paris, dont l’architecture, avec ses colonnes corinthiennes de marbre rose et ses trois arcades, s’inspire de celle des arcs romains » observe Jean Luc Martinez, président directeur du Musée du Louvre. C’est pour financer la restauration de cet édifice construit en 1809 sous Napoléon 1er, que le grand musée doit réunir, avant le 31 janvier 2019, une collecte d’un million d’euros auprès des particuliers. S’ils consentent un don d’au moins 200 euros, (68 euros après déduction fiscale), ils auront droit à une visite privée autour de l’oeuvre et des collections du Louvre, un mardi, jour de fermeture du musée. Une occasion de venir avec ses enfants afin de les sensibiliser à l’art et au patrimoine français.
COUP DE POUCE AU PATRIMOINE
La France compte une multitude de chefsd’oeuvre. S’ils ne sont ni inscrits ni classés aux Monuments historiques, la seule solution pour rénover ce patrimoine historique passe par la générosité du public. Il y a quelques mois, la mission Stéphane Bern a répertorié 270 projets de restauration jugés prioritaires, dont 18 projets emblématiques. Afin de financer ces derniers, la Française des jeux a lancé depuis septembre, une nouvelle offre de jeu « Mission Patrimoine » vendu chez les buralistes. Même si l’État prélève de confortables taxes sur le produit de ces jeux, un peu plus de 15 millions d’euros ont déjà pu être alloués, soit 30 % des besoins de financement exprimés. Un des porteurs de projets répertoriés comme, par exemple, l’Hôtel-Dieu de Château-Thierry, dans l’Aisne, a déjà reçu un chèque de 202 000 euros. Mais la liste des biens à restaurer avec ou sans la mission Stéphane Bern reste très longue. Des propriétaires privés ou des collectivités locales lancent des campagnes de financement participatif. Récemment la ville de Quimper a sollicité le public pour restaurer l’église du cloître de Locmaria.
LE FINANCEMENT PARTICIPATIF AU SERVICE DE L’ART
Caractérisé par des dons d’internautes, le mécénat participatif accueille des projets culturels au sens large. Axés sur les châteaux et les édifices religieux, des sites comme dartagnans ou credofunding.fr sont très actifs. Tout comme la plateforme KissKissBankBank qui souhaite réunir au moins 180 000 euros avant fin janvier pour équiper en instruments de musique des nouveaux orchestres d’enfants dans le cadre du projet Démos (Dispositif d’éducation musicale et orchestrale à vocation sociale), coordonné par la Cité de la Musique-Philharmonie de Paris.
DONS : QUELLE FISCALITÉ ?
Généralement les bienfaiteurs utilisent leurs dons pour profiter d’une réduction d’impôt sur
le revenu de 66 % du montant du don, dans la limite de 20 % de leur revenu imposable. Mais la mise en place du prélèvement à la source change quelque peu la donne. Pour les dons effectués avant la fin de l’année 2019, l’administration fiscale versera avant le 1er mars 2020, aux donateurs un acompte de 60 % de la réduction d’impôt en se basant sur le montant du don effectué en 2018. Elle lui réglera le solde de la réduction d’impôt, après l’envoi de la déclaration fiscale 2020 au titre des revenus de 2019.
En l’absence de don réalisé en 2018, pour un particulier consentant un don en 2019, la totalité de sa réduction d’impôt s’imputera directement sur le montant de son impôt sur le revenu, après l’envoi de la déclaration fiscale en 2020. Il est aussi possible de soutenir l’art en réglant sa note d’IFI, impôt sur la fortune immobilière. Il suffit que les assujettis déduisent du montant de leur IFI, 75 % des dons réalisés au profit d’une fondation reconnue d’utilité publique, dans la limite de 50000 euros par an. Un versement de 66 666 euros permet optimiser ce plafond. Seuls les dons effectués entre la date limite de dépôt de déclaration d’IFI 2018 et celle de 2019 sont pris en compte pour l’IFI à régler au titre de cette année. Des structures comme la Fondation du Patrimoine, la Fondation de France, la Fondation pour les Monuments historiques, la Fondation VMF (vieilles maisons françaises) sont éligibles à la réduction d’IFI.
Si les avantages fiscaux en matière de philanthropie sont non négligeables, l’intérêt pour une oeuvre d’art ou un édifice ou encore un événement artistique prime avant tout.