Prêt non RAPPORTÉ à l’héritage
Le rapport des donations est la technique qui permet de maintenir l’égalité entre les frères et soeurs lors de la succession de leurs parents. Ce qui a été antérieurement donné à l’un ou à l’autre est considéré en principe comme une avance sur la succession, et l’héritier qui avait bénéficié de la donation voit sa part d’héritage diminuée pour en tenir compte.
Mais quid dans le cas où ce n’est pas une donation en bonne et due forme qui a été consentie, mais un avantage tel que la mise à disposition d’un logement, sans loyer en contrepartie ? Il s’agit bien, objectivement, d’un avantage indirect, puisque l’héritier qui en a bénéficié a pu économiser les loyers qu’il aurait dû verser s’il s’était logé par ses propres moyens. La Cour de cassation avait d’abord admis que le bénéficiaire de l’avantage en doit compte à ses cohéritiers (décision du 8 novembre 2005).
Mais elle a par la suite modifié sa jurisprudence, en exigeant que les héritiers qui demandent le rapport de l’avantage prouvent l’intention libérale de leurs parents (plusieurs décisions du 18 janvier 2012). Preuve très difficile à apporter en pratique. Plus récemment, la Cour de cassation a jugé que dans ce cas de figure, il y avait un prêt à usage, c’est-à-dire un « contrat de service gratuit », qui confère seulement un droit d’occupation du logement mais n’opère aucun transfert d’un droit patrimonial au profit du bénéficiaire, notamment de propriété sur les logements ou ses fruits et revenus (loyers),
« de sorte qu’il n’en résulte aucun appauvrissement du prêteur ». Ce contrat
(prêt à usage, commodat) « est incompatible avec la qualification d’avantage indirect rapportable » (décision du 11 octobre
2017). Dans l’affaire concernée, l’occupation avait duré presque 11 ans.