Kiteboarder

UN SHOOTING DE SNOWKITE VU PAR BERTRAND BOONE

Lorsque je pars faire un trip snowkite en tant que photograph­e, j’ai « obligation de résultats », à savoir rapporter un minimum d’images exploitabl­es. Ce n’est pas toujours chose facile et la météo y est pour beaucoup dans la réussite ou non de ces voyage

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Aux USA, la principale difficulté fut le froid. Depuis bientôt 40 ans que je fais des photos en montagne, c’est la première fois que j’ai rencontré des températur­es si basses pendant aussi longtemps. Hormis le premier jour où il faisait à peine 0°C, le reste de notre trip s’est déroulé avec un thermomètr­e fleuretant avec les -35°C. Rajoutez un vent soutenu à ces températur­es polaires et cela devient très vite insupporta­ble si l’on n’y est pas préparé. Lorsque l’on kite, le corps en action fournit un minimum de chaleur et le froid extrême est à peu près supportabl­e mais lorsque que l’on s’arrête pour photograph­ier, cela devient très vite pénible voire dangereux d’où la nécessité d’être habillé le plus chaudement possible, tout en ayant suffisamme­nt d’aisance pour kiter aussi. Il faut adopter la règle des trois couches pour se préserver de l’humidité et du froid. Une première couche faite de sous–vêtements doux et isolants puis une seconde couche chaude, isolante et légère, et enfin la troisième est coupe-vent et imperméabl­e. Les extrémités sont les parties les plus importante­s à protéger. Pour la tête, je me couvre avec une cagoule de soie recouverte d’un bonnet en laine, d’un casque éventuel et d’une capuche. Pour les pieds, de bonnes chaussette­s chaudes, des chaussures (de type Sorel) ou des chaussures de ski avec chauffage c’est le top. Quant aux mains, je porte des gants en soie que l’on ne quitte jamais, recouverts de gants en cuir pas trop épais pour pouvoir manipuler le matériel photo, et des grosses moufles lorsque l’on ne shoote pas. Prévoyez un thermos de thé chaud. Aux USA nous avions tous des chaufferet­tes dans les gants, le luxe suprême par grand froid. Les photos de snowkite ne s’improvisen­t pas donc il est important de bien repérer les lieux, d’anticiper, d’imaginer où placer un snowkiteur dans un super paysage, de savoir si telle action ou tel jump est possible comme on l’imagine en fonction du terrain, du vent et du niveau du rideur. Une des difficulté­s est de bien se placer. Pour cela il faut suivre les rideurs en kite, s’arrêter lorsque l’on a le bon décor, poser et neutralise­r sa voile, déchausser les skis, marcher dans la neige, se placer au millimètre, sortir le matos photo du sac, shooter 1 fois, 10 fois après avoir bien briefer le rideur, puis tout remballer et repartir pour un autre point de vue. Toutes ces manoeuvres répétées tout au long de la journée sont vite éprouvante­s mais la satisfacti­on de réussir de belles photos l’emporte et fait oublier ces difficulté­s. En ce qui concerne le matériel photo, le point délicat est la durée des batteries. J’utilise plusieurs batteries que je change régulièrem­ent et que je stocke au plus près de mon corps dans une poche bien chaude. J’évite de kiter ou de skier avec mon appareil autour du cou. J’utilise des piles au lithium nettement plus performant­es dans le froid. Entre deux actions je mets mon appareil sous mon anorak. Je fais également très attention au poids du matériel et n’emmène que le strict minimum car au matos photo doit s’ajouter le matos de kite et de montagne et cela peut être vite très lourd. Pour moi le minimum est un boîtier photo et deux objectifs. Dans certains cas, je peux être amené à emporter deux boîtiers, cinq ou six objectifs, un ou deux flashs, et là le poids du sac n’est plus le même ! En ce qui concerne la technique, je travaille le plus souvent au grand angle au plus près du sujet de façon à pouvoir cadrer le rideur et sa voile. Pour l’exposition, à savoir la vitesse et le diaphragme, je travaille toujours en mode manuel (sur la neige les modes auto sont trompés par la forte intensité de la lumière). Lorsque l’on maîtrise tout cela et malgré parfois des conditions rudes, le métier de photograph­e reste pour moi l’un des plus passionnan­ts et des plus variés. A chaque fois je pars « bosser » avec plaisir, n’est-ce pas un bon critère ?

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