Coupe claire au ministère
La nouvelle ministre des Sports va devoir éteindre l’incendie provoqué par l’objectif du gouvernement de supprimer 1 600 emplois d’ici à 2022.
Roxana Maracineanu est déjà dans le grand bain. Hier, avant de s’entretenir avec le Premier ministre Édouard Philippe, elle a publié son premier communiqué pour tenter de rassurer les quelque quatre mille agents du ministère.
L’objet de leur inquiétude : une lettre de cadrage de Matignon, adressée à sa prédécesseure Laura Flessel le 26 juillet dernier, q ui a nnonce une p ro c ha i ne baisse du budget des Sports 2019 de 30 M€, soit 450,6 M€ contre 480,7 cette année ( cf infographie).
« Vous serez appelée à appliquer un schéma d’emplois de moins 1 600 ETP ( emplois temps plein) au cours de la période 20182022 afin de mettre en oeuvre l’engagement présidentiel de réduire de 50 000 le nombre d’agents publics sur le périmètre de l’État et de ses opérateurs » , écrit le Premier ministre.
Hier soir, la nouvelle ministre des Sports a insisté sur sa « volonté de mieux préparer notre modèle à répondre aux objectifs de performance et de développement de la pratique sportive » : « Cela se fera naturellement en y associant les agents de mon ministère et notamment les CTS ( conseillers techniques sportifs) dont nous avons besoin, les fédérations et l’ensemble de nos partenaires avec lesquels j’engagerai des concertations dès lundi. »
Au nombre de mille six cents, les conseillers techniques sportifs sont répartis dans les soixante- dix- neuf fédérations dont ils sont la cheville ouvrière. Il s’agit des entraîneurs nationaux, des conseillers techniques nationaux et régionaux ou encore des directeurs techniques nationaux ( DTN). Ces derniers ont réagi au quart de tour via Philippe Bana, président de l’association des DTN, qui a dénoncé une lettre qui « demande au plus petit ministère de s’autodétruire en termes de ressources humaines avec 60 % de suppressions d’agents » .
“Est- ce que Teddy Riner , , aura encore demain un entraîneur JEAN- CLAUDE SENAUD, DTN DU JUDO
Patrick Rosso,DTN du taekwondo a renchéri : « C’est totalement incohérent. D’un côté, ils nous fixent comme objectif quatre- vingt médailles en 2024 et, de l’autre, ils coupent la tête de la moitié de ceux qui sont censés les préparer et les accompagner. »
Son homologue du judo, JeanClaude Senaud, a enfoncé le clou : « Peut- être faut- il changer de modèle du sport mais cela se prépare. Est- ce que Teddy Riner aura encore demain un entraîneur, un préparateur physique qui sont des cadres d’État ? Et qu’est- ce que l’on va faire concernant les quartiers, le sport féminin et le handisport ? »
Face à cet emballement, le CNOSF a tenté, lui aussi, de calmer le jeu alors qu’il réclame de- puis plusieurs mois une augmentation des moyens financiers. « La lettre de cadrage est à la fois imprécise et très dure car nous n’en n’avons pas eu connaissance » , explique Denis Masseglia, patron du CNOSF, qui a pourtant rencontré le Premier ministre lundi.
Comme le courrier ne précise pas la nature des 1 600 emplois visés, le patron du CNOSF demande à Matignon de rassurer le mouvement sportif. Et de lui confirmer que « l’effectif des 1 600 CTS aujourd’hui à la disposition des fédérations sera maintenu » , ce qui lui a été précisé par l’entourage du Premier ministre par un texto, hier. Ce dernier devait recevoir, jeudi 6 septembre, un rapport présentant le nouveau modèle de gouvernance adopté par les acteurs du sport après huit mois de travaux.
Mais le changement de ministre a différé la remise du document, lequel acte la mise en place de la future agence du sport en 2019 et propose notamment « le rattachement des CTS aux DTN » ainsi qu’ « une évolution dans le cadre des objectifs contractualisés » .
Le feuilleton n’est pas fini. « Le travail avec le ministère des Sports prendra plusieurs jours » , indique- t- on du côté de l’Élysée.