L'Equipe

Les lamentatio­ns du Lamentin

Dernier représenta­nt de l’outre- mer, le club martiniqua­is aurait aimé se déplacer dans d’autres conditions et jouer en région parisienne son 32e contre Orléans.

- BAPTISTE CHAUMIER

L’ Aiglon du Lamentin, dernier représenta­nt ultramarin encore en lice en 32es de finale de la Coupe de France, est arrivé hier en métropole. La délégation du club martiniqua­is a décollé mardi soir pour un long périple jusqu’à Paris avant de se rendre à Orléans, samedi. Et c’est déjà un exploit puisqu'aucun club de l’île n’avait réussi jusque- là à se qualifier pour ce stade de la compétitio­n en jouant le tour précédent à domicile. Ce jour- là, face à Sainte- Geneviève ( N 2, 3- 2, le 8 décembre), la liesse s’est emparée du petit stade Georges- Gratiant, plein à craquer, mais elle ne pourra pas exploser au même endroit, cette fois. Même si l’Aiglon a été tiré au sort en premier, il devra jouer son match sur le terrain de son adversaire, Orléans ( L2).

Le règlement de la Coupe de France est très clair sur ce point : à partir des 32es de finale, tous les matches doivent se dérouler en métropole. Christophe Drouvroy, le directeur des compétitio­ns nationales à la FFF, explique : « Les clubs de Ligue 1 entrent en lice à partir de ce tour et c’est difficile de les faire se déplacer en outre- mer, en sachant qu’il pourrait y avoir potentiell­ement un déplacemen­t jusqu’en Polynésie ! Avec leurs calendrier­s déjà surchargés, les clubs profession­nels ne peuvent pas se permettre ces très longs trajets. » Malgré les quatre divisions d’écart entre les deux équipes, l’Aiglon, qui évolue en R 1, le plus haut niveau de la Ligue de Martinique, devra donc se déplacer à Orléans. À défaut de compter sur le soutien de leurs supporters locaux, les dirigeants de ce club omnisports, le plus important de l’île, espéraient au moins pouvoir jouer le match en région parisienne, où la communauté antillaise est très nombreuse.

Mais leur requête a été rejetée par l’USO. Le président du club orléanais, Philippe Boutron, l’assume :

« C’est vrai pour plusieurs raisons : d’abord parce que le règlement le stipule et ensuite parce que cela fait quatre ans que nous n’avons pas joué un match de Coupe de France à domicile. » Pas sûr pourtant que la recette soit équivalent­e pour Orléans à celle perçue récemment en Coupe de la Ligue pour la réception du Paris- SG en 8es de finale ( 1- 2, le 18 décembre). Président de l a section football de l’Aiglon, Fabrice Bocaly regrette cette décision au goût amer : « On a été tiré en premier et on n’a même pas le choix du terrain ! On fait 6 800 kilomètres ( voir infographi­e)

pour venir jusqu’en métropole, il y a quatre divisions d’écart, et on nous refuse la moindre faveur. On nous parle souvent de l’esprit de la Coupe, je ne le retrouve pas du tout. »

Pas de quoi faire ciller Boutron, qui rétorque : « Je pense que tous me s c o l l è g u e s d e s c l u b s p r o auraient réagi de la même façon. Le foot, c’est notre business, on n’allait pas jouer en région parisienne simplement pour leur faire plaisir. » Les joueurs de l’Aiglon y dormiront au moins puisqu’ils sont hébergés à Clairefont­aine ( Yvelines) le temps de leur séjour en métropole. Mais sur les conditions de voyage, il reste un peu d’incompréhe­nsion dans les rangs martiniqua­is.

“Le foot, c’est notre business, on n’allait pas jouer en région parisienne , , simplement pour leur faire plaisir

32 000 euros de billets d’avion aux frais de la FFF

« On aura deux jours et demi d’entraîneme­nt sur place, trois jours pour s’acclimater aux températur­es et se remettre du décalage horaire ( 20 degrés et 5 heures d'écart), c’est trop juste, regrette Bocaly. On aurait aimé voyager avant, d’autant qu’au 7e tour ( ils avaient joué à Poitiers, N3, le 17 novembre), l’organisati­on avait été parfaite. » Difficile pourtant de procéder autrement, à écouter Drouvroy. « On est obligés d’attendre les résultats du 8e tour avant de faire les réservatio­ns et désormais les compagnies aériennes n’acceptent plus qu’on bloque des billets à l’avance avec le risque qu’on les annule quinze jours avant. On a réagi immédiatem­ent après leur qualificat­ion mais je vous laisse imaginer la complexité de trouver autant de places en période de fêtes, au moment où les avions sont complets. » La FFF a fini par en trouver mais a dû débourser 32 000 euros au total, les compag n i e s re f u s a n t l e s t a r i f s d e groupe…

L’instance prend d’ailleurs en charge l’intégralit­é des frais de la délégation de l’Aiglon, qui compte vingt- trois personnes ( 18 joueurs et 5 encadrants), entre le déplacemen­t et l’hébergemen­t. Neuf personnes supplément­aires ont même été invitées à séjourner à Clairefont­aine par la Fédération. C ’ e s t d a n s c e c a d re q u e l e s joueurs de l’Aiglon s’apprêtent à préparer le match d’une vie pour certains. Après avoir déjà atteint les 32es de finale, le club martiniqua­is pourrait marquer encore un peu plus l’histoire du football de l’île en devenant le premier à atteindre les seizièmes de finale, en cas d’exploit…

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