Piles et batteries au lithium : ça se recycle, ne vous en débarrassez pas n’importe comment !
Elles engendrent des déchets, des incendies et des pollutions environnementales. Les piles et batteries ne sont pas des ordures comme les autres. Leur recyclage est nécessaire.
Il est souvent invisible et sa présence est discrètement signalée : le lithium, dans les piles et les batteries, s’insère dans de nombreux objets du quotidien.
Cigarettes électroniques à l’image des puffs, voitures et trottinettes électriques, cartes de visite, GPS…
Autant d’appareils que nous utilisons couramment et, une fois inutilisés ou mal en point, se retrouvent jetés à la poubelle un peu n’importe comment.
Pourtant considérés comme déchets dangereux, ils doivent être recyclés sous peine de faire courir à celles et ceux qui les retrouvent – en grande majorité les centres de stockage et de tri de déchets – des risques importants d’incendies.
Très réactif à l’air, à l’eau et au moindre choc, le lithium provoque en effet des explosions impressionnantes qui ne sont pas sans conséquence sur notre sécurité. Pas sans conséquence non plus sur l’environnement, car les feux déployés émettent des pollutions dans les airs par les fumées, ou dans le sol par l’évacuation des eaux qui ont servi à éteindre les feux.
Recycler et non jeter
Pourtant, le problème ne date pas d’hier mais le phénomène tend à s’intensifier. Le groupe Passenaud, spécialisé dans la collecte et le recyclage de déchets dans le nord-ouest de la France, a connu depuis 2019 cinq incendies. « En quatre ans, il y a eu une
accélération» , indique Lila-Anne Schiano, responsable Qualité sécurité environnement (QSE) du groupe, rencontrée par la rédaction.
Un véritable souci pour les professionnels qui voient s’embraser des tas de déchets, et qui mettent en péril la sécurité des agents sur place, malgré une formation accrue ces dernières années pour savoir les éteindre.
Les piles et batteries au lithium qui se nichent dans nos appareils électroniques doivent en effet recevoir un traitement particulier. Comme le souligne le Bureau d’analyse des risques et pollutions industriels (BARPI), attenant au ministère de la Transition écologique, le lithium est considéré comme un déchet dangereux et doit impérativement être recyclé en conséquence.
« Li-Ion »
S’il est difficile de savoir si notre objet électronique dispose de lithium, une petite inscription est notée sur l’appareil concerné : « Li-ion » pour lithium-ion.
Hors de question, donc, de le jeter dans les déchets tout venant : il faut alors le déposer « dans le point de collecte le plus proche » indique le BARPI ; à savoir le lieu où vous l’avez acheté (dans un supermarché, par exemple). Ou encore les déposer en déchetteries. Selon le BARPI, 60 000 points de collecte étaient dénombrés en 2018. Ces piles et batteries au lithium sont ensuite prises en charge par deux éco-organismes agréés par l’État, COREPILE et SCRELEC. COREPILE préconise d’ailleurs, en cas de batteries ou de piles – surtout si elles sont endommagées, de scotcher les pôles et d’insérer le tout dans des sachets hermétiques.
Des déchets difficilement quantifiables
En France, en 2018, selon l’Ineris (l’Institut national de l’environnement industriel et des risques), 1 405 millions de piles et de batteries ont été fabriquées. Parmi elles, 25 % sont constituées de lithium. Son utilisation grimpe en flèche d’année en année, si bien que sa production mondiale est estimée à 77 000 tonnes en 2019. Le lithium est un métal très prisé car comme l’indique le groupe Passenaud, il réussit à stocker énormément d’énergie. Il est à la fois léger et puissant. Très apprécié, largement produit : il est difficile aujourd’hui de quantifier le nombre de ses utilisations, et surtout des déchets qu’il engendre. D’autant plus que les filières de recyclages, bien qu’existantes, restent très insuffisantes. « Il existe des filières pour recycler les
batteries », expose Ysaline Jean-Jacques, cheffe de projet prévention filières REP (Risques et impacts industriels) à France nature environnement (FNE), contactée par la rédaction. « Ce sont SCRELEC et COREPILE (…) mais à part cela, ça se recycle très très mal. »
La pollution générée par les incendies
Mais il n’y a pas seulement les quantités de déchets qui sont à déplorer. Comme expliqué un peu plus haut, le lithium est un métal qui réagit très fortement à son environnement.
Si la batterie ou la pile est à découvert, l’air, l’eau ou le moindre coup peut générer une explosion. Dans les centres de traitement des déchets, des incendies surviennent donc régulièrement et embrasent ce qui s’y trouve cartons, plastiques, objets en tout genre.
Et ces incendies génèrent de la pollution. « Par les fumées et les envols de poussière ou de suie qui partent à distance en fonction de l’intensité des vents », expose Yves Guelorget, président de la commission technique de l’UPDS, l’Union des professionnels de la dépollution des sites, contacté par actu. fr. Également par les eaux d’extinction qui, « si elles dépassent les capacités de stockage de l’installation (de traitement de déchets, NDLR), peut rejoindre les rivières et s’infiltrer dans les sols », poursuit le président de l’UPDS.
En cas de gros incendies, les centres de tri et de stockage de déchets doivent répondre à une procédure encadrée par un arrêté préfectoral. Un bureau d’études est mandaté pour faire des prélèvements dans le sol et dans les airs, dans un périmètre précis.
« Des guides existent et listent les substances à rechercher », poursuit Yves Guerloget. « On peut rechercher des acides, de la suie qui s’est déposée sur le linge ou sur
la terrasse des gens. » Ces données sont ensuite transférées à la DREAL, la Direction la régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement.
Les incendies restent globalement circonscrits. Et les centres de stockage de déchets sont construits de telle sorte que le feu ne se disperse pas. Mais tout de même. Les conséquences sur l’environnement bien que peu étayées ont déjà été mentionnées en 2018 par le BARPI qui souligne une « toxicité pour les organismes aquatiques en cas de rejet », « d’une toxicité/corrosivité des fumées d’incendie contenant des hydroxydes de lithium, des composés métalliques (oxyde de Mg…) pouvant entrainer une pollution environnementale ».
Et… c’est à peu près tout. S’il est désormais connu que les filières d’extraction de ce minéral sont un désastre écologique (elles sont gourmandes en énergie, en eau notamment, comme le détaille l’association SystExt) ; à l’autre bout de la chaîne, une fois consommé, il reste encore beaucoup à faire pour évaluer l’impact environnemental du lithium.