L'Action Républicaine

Que devient le Don Quichotte sculpté par B. Inchakoff ?

Une sculpture bien connu des Loupéens. Elle a trôné pendant plusieurs décennies dans l’entrée du château de La Loupe, avant d’être déménagée avant les travaux. Où est-elle, et qui est elle ? L’histoire d’une oeuvre et de son artiste...

- • Nadine Debèze

Installée pendant plus de vingt ans à l’entrée du château de La Loupe, Don Quichotte « Retour à Toboso », une des sculptures les plus connues de Bernard Inchakoff (1933-2007) accueillai­t les visiteurs avant que le bâtiment ne soit mis en travaux.

Un artiste talentueux

Cette silhouette était devenue familière aux loupéens depuis trente-quatre ans. Elle avait disparue pour être entreposée dans un local municipal. Qu’est devenue cette oeuvre majestueus­e, un trésor local inspiré de Don Quichotte, l’oeuvre de Cervantès l’une des plus grands figure de la littératur­e espagnole ? Et qui était Bernard Inchakoff, son sculpteur ?

Peintre et sculpteur de SaintAndré-de-l’Eure (Eure) où il a résidé une grande partie de sa vie, Bernard Inchakoff est un artiste talentueux ayant régulièrem­ent exposé à partir de 1970 tant en Normandie qu’à Paris.

Il est l’auteur de nombreuse oeuvres de l’art décoratif du XXe siècle, notamment la fontaine de Neubourg, de « l’Aurore », une gigantesqu­e mosaïque de cuivre émaillé, élément décoratif de la salle polyvalent­e du collège d’Evreux…

Dans le Perche, il avait adhéré au début des années 1990 au mouvement artistique lancé à La Loupe par Charles Reuter, artiste peintre local.

Avec son épouse Ginette, l’artiste loupéen a fondé « La Palette percheronn­e » associatio­n de peinture et de sculpture qui fût à l’origine d’une douzaine d’exposition en Normandie et à La Loupe.

Une maison des Artistes

Ces normands revenus dans notre région depuis plus de quarante ans ont bien connu Inchakoff. « C’était un ami !» affirmait Ginette Reuter, née Roux, interrogée en 2012.

« Bernard nous avait confié qu’il était issu d’une famille modeste. Son père prisonnier d’origine russe était venu en France participer à l’une des batailles de la Marne en 1914. Un maréchal ferrant de Saint-André-surEure qui avait la mission de ferrer les chevaux était débordé de travail, les autorités lui avait donc attribué ce prisonnier russe pour l’aider. Les deux hommes s’étaient pris d’amitié et le prisonnier avait épousé la fille du maréchal ferrant », présente-t-elle.

Né d’une mère normande et d’un père russe, « Bernard a sculpté et peint dès son plus tendre âge. De la forge de son papa, il a hérité de l’atelier et surtout de la passion. Et c’était un véritable artiste qui a produit énormément d’oeuvres : émaux, peintures, fers forgés, poèmes. A la fin de sa vie, Bernard Inchakoff a même légué sa maison de Saint-André-de-l’Eure à sa commune, ce qui a permis un projet de création de Maison des Artistes » poursuit Ginette.

Un patrimoine local

Invité d’honneur d’un salon artistique qui se tenait au château de La Loupe en 1990, le peintre sculpteur andrésien était venu présenter son Don Quichotte : l’archétype du rêveur irraisonné, justicier auto-proclamé qui part sauver le monde.

Un hommage au fameux roman chevaleres­que de l’auteur Miguel de Cervantès, qui parut en deux partie en 1605 et 1615 qui fût considéré comme un des romans les plus importants de la littératur­e espagnole et mondiale. Cette oeuvre retrace les aventures d’un anti-héros idéaliste. Pris pour fou, raillé par tous il continuera jusqu’au bout sa recherche de la perfection.

Une quête qui fût, référence à l’histoire, peut-être celle des artistes de l’époque… « Certes, nous avons fait avec les moyens du bord pour pouvoir exposer... Jean Ambriogio qui appartenai­t aussi à cette vague artistique fourmillan­te, avait refait gracieusem­ent les carrelages du château, avant de se lancer dans la mosaïque de l’église Notre-Dame des Fleurs. Et cette oeuvre d’ Inchakoff avait tant fait impression aux élus que la municipali­té de Jacques Renard, dont Renée Paris son adjointe aux affaires culturelle­s, avait proposé de l’acheter pour près de 500 €. Inchakoff était venu refaire la lance ayant été vandalisée à deux reprises les années suivantes » raconte Ginette Reuter.

Des oeuvres vendues à l’Hôtel Drouot

Pour élaborer cette oeuvre figurative de 50 kg environ, Bernard Inchakoff a utilisé la technique des feuilles de cuivre soudées et vieillies au chalumeau, et il a recouvert la matière d’une touche de vernis pour stopper l’oxydation. « Cette magnifique oeuvre avait énormément plût! Lors de l’inaugurati­on, l’artiste m’avait alors confié que Don Quichotte représenta­it un peu l’histoire de la vie tournée en dérision : son personnage suit son chemin, sans se soucier du reste » avait témoigné en 2012 Claude-Brouard, le fondateur de l’associatio­n de la Récré des seniors. Depuis le décès de l’artiste en 2007, une associatio­n Les amis de Bernard Inchakoff été créée à Saint-André-de-l’Eure. Certaines oeuvres de l’artiste sont vendues à l’Hôtel Drouot.

Une restaurati­on en 2023

Fin 2023, Marc Girardot, actuel adjoint en charge de la Culture dans l’équipe municipale d’Éric Gérard à La Loupe a joué un rôle essentiel dans ce dossier après la découverte de cette statue « dont il manquait la queue du cheval ». L’élu a entrepris une restaurati­on de la sculpture en faisant appel à Thierry Bouharaoua, professeur de plomberie au Château des Vaux ayant des connaissan­ces en soudure. C’était un soir de décembre 2023 que l’enseignant a donné de son temps, de ses compétence­s et de ses moyens pour restaurer cette sculpture, d’après une photograph­ie de 1994 confiée par Patrice Carbonnet.

Cette sculpture, qui appartient au patrimoine loupéen ayant été restaurée, devrait prochainem­ent retrouver une place dans la ville…

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Bernard Inchakoff est le créateur de cette sculpture de Don Quichotte « Retour à Toboso ».

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