Lauréat de la Mission Bern, le Manoir de Pré est reconstruit avec les méthodes traditionnelles
De gigantesques travaux sont menés sur les dépendances du Manoir de Pré, lauréat 2022 de la Mission Bern. Son propriétaire, attaché aux méthodes traditionnelles, souhaite redonner vie à ce bâtiment à l’abandon, datant de 1535.
En arrivant sur place, des planches et des chevrons inventoriés, des troncs d’arbres numérotés et des tas de gravats sont dispersés au sol. Les dépendances du Manoir de Pré, à Chapelle-Guillaume, lauréates départementales du Loto du patrimoine de la Mission Bern en 2022, sont totalement déconstruites.
Seuls un pignon et des murs bas en pierre subsistent. « Le bâtiment n’était pas entretenu depuis 500 ans, le pan de bois Nord était en état de dégradation avancé, et des ronces grimpaient jusqu’au faîtage des dépendances, commente Pierre-Alexandre Treust, le propriétaire des lieux depuis sept ans. Les pans de bois n’étaient pas considérés ».
Reconstruire à l’identique
Les travaux de déconstruction ont donc débuté dans la deuxième moitié de l’année 2023, avec les charpentiers. Ces derniers ont retiré les tuiles de la toiture, les poutres, les chevrons, les planches... Chaque matériau a ensuite été diagnostiqué, afin d’estimer la construction des dépendances en 1535. « On a pu se rendre compte de certaines choses lors du démontage », glisse le propriétaire. Notamment des techniques de travail de l’époque, qui seront copiées pour reconstruire les dépendances à l’identique.
« On est des passionnés, on n’est pas dans le folklore. On va travailler avec les méthodes ‘à l’ancienne’, une façon de préserver le bâti et assurer sa durabilité dans le temps. On a le souci de respecter ces méthodes pour qu’on n’y revienne pas dans 500 ans ».
Un chantier
« à l’ancienne »
Ces techniques traditionnelles permettent surtout « un confort de travail ». « On veut entendre les cordes se tendre, les bois craquer, comme sur un bateau », image Pierre-Alexandre Treust. Un chantier sans bruit mécanique, pour faciliter le confort, la communication. Par exemple, les charpentiers vont travailler avec une chèvre de levage pour soulever ou maintenir les matériaux en hauteur. Aussi, des rails ont été installés le long de la dépendance pour faire glisser les matériaux d’un bout à l’autre. Et les troncs seront taillés à la hache.
Si de nombreux troncs seront amenés au Manoir en vue de la restauration, quelques planches et chevrons datant de 1535 seront conservés. Le maître charpentier Gustave Remon a regardé chaque pièce avant de faire son tri et s’accorder avec Frédéric Pelletier, le technicien forestier, sur le nombre de troncs d’arbres à ramener en vue du chantier. « C’est le technicien forestier qui a choisi les bois pour le chantier », poursuit Pierre-Alexandre Treust.
Les arbres abattus dans la forêt à 700 m
Petite particularité : le bois nécessaire à la restauration est abattu à seulement 700 mètres du Manoir, dans la forêt La Fagotière, grâce au don de M. et Mme de la Roulière, les propriétaires de cette forêt. Et en comparant les différents bois, Pierre-Alexandre Treust a constaté « le même type de croissance entre les bois de la forêt et les bois de la dépendance ».
Ce qui induit que, déjà en 1535, le Manoir de Pré avait été construit grâce aux arbres de La Fagotière, qui à l’époque, « appartenait au domaine du Manoir », précise son propriétaire.
Pour coller aux méthodes traditionnelles, le débardage dans la forêt est effectué par traction animale, avec quatre chevaux percherons, pilotés par Christine Sallé et Vivien Ricard (lire par ailleurs).
Un lieu de villégiature d’artisans
L’ensemble des travaux devraient être terminés pour 2025, mais Pierre-Alexandre Treust a une idée bien précise pour la suite, au Manoir de Pré. Le projet est de réhabiliter les dépendances pour les transformer en un lieu d’exposition et de villégiature d’artisans. Un lieu qui sera mis à disposition pour des ateliers de taille de bois, d’initiation à l’équarrissage, des stages d’initiation aux métiers traditionnels.
Un projet qui n’aurait pas été possible sans l’aide de 300 000 euros de la Fondation du Patrimoine, rappelle le propriétaire.