L'Écho de l'Armor et de l'Argoat
«Un clocher, ce n’est pas seulement religieux»
12 chercheurs vont arpenter Pontrieux, Belle-Isle-en-Terre, Louargat et Moustéru pour recueillir la parole de leurs habitants dans les bars, dans la rue, partout où c’est possible et spontané. Un travail de terrain.
Parmi eux, trois enseignantschercheurs de l’École normale supérieure (ENS) Paris et de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture (ENSA) de SaintÉtienne, deux docteurs (urbanisme et architecture), sept étudiants en géographie. Ils seront accompagnés de deux vidéastes qui réalisent un documentaire pour KUB.
Du sacré au commun
Cette recherche-action, baptisée « du sacré au commun » est réalisée sous la houlette d’Emmanuele Cunningham — Sabot, professeure en aménagement et urbanisme à l’ENS Paris. Les profils divers de ces chercheurs reflètent les dimensions multiples que peut revêtir une église.
«L’idée majeure de l’équipe est, dans un premier temps, de comprendre quelle place a l’église dans chacune des communes où l’on travaille » explique Georges-Henry Laffont, Maitre de conférences à l’Ecole Normale Supérieure d’Architecture de Saint-Etienne. « Un clocher ce n’est pas seulement religieux, c’est un symbole, souvenez-vous de l’affiche de campagne de François Mitterrand en 1981 ».
Quel rapport à l’église ?
Et quand on parle de place, c’est non seulement la place qu’elle prend, au coeur du bourg ou pas, mais aussi comment les habitants la perçoivent. « Quel rapport ont les gens avec l’église : esthétique, identitaire ? » poursuit le chercheur. La question du coût sera aussi posée : « ça peut être un obstacle pour se mettre d’accord entre différents acteurs ».
Et enfin, dernière interrogation : «Et s’il fallait faire quelque chose de cette église, qu’est-ce que les gens seraient prêts à faire ? C’est un thème qui permet de délier les langues ».
L’idée est de réunir le plus d’informations et d’éléments afin de se faire une idée de ce qui pourrait freiner ou au contraire favoriser tel ou tel usage de l’église.
«On prend toutes les informations et on déniche le petit truc qui est un frein ou un levier pour faire quelque chose, sachant que nous ne prendrons pas la décision; c’est un bien commun et c’est à partir de là que la décision est prise. Il faut que les gens s’approprient la démarche et la restitution de l’enquête pour continuer, car une semaine ne suffira pas ».
« De la dentelle »
Si des exemples d’usages autres que cultuels des églises existent en France ou à l’étranger, rien n’est automatiquement transposable.
Chaque communauté villageoise a son histoire avec son église et sa perception propre du bâtiment. « C’est de la dentelle, du cas par cas » remarque le chercheur. Le devenir de ces édifices peut aussi être vu à l’échelle de l’agglomération dans le cadre d’un équipement public mutualisé, comme une médiathèque ou des logements...
L’idée finale étant d’anticiper sur le devenir de ces bâtiments coûteux, anciens et très symboliques.
Mettre d’accord les acteurs qui gravitent autour (collectivités, habitants, diocèse) avant que la situation ne devienne catastrophique.
Ensuite, tout est imaginable. Ainsi, les architectes estiment tout à fait possible de diviser l’église de Belle-Isle-en-Terre pour célébrer le culte au rezde-chaussée et en garder le caractère sacré, tout en créant une bibliothèque à l’étage. Mais, répète Georges-Henry Laffont : « Ce n’est pas nous qui déciderons ».
M.L.