Ports de plaisance en perte de vitesse ?
Des listes d’attente qui fondent, des usagers en quête d’immédiateté et d’économie. A Piriac-sur-mer ou La Baule/le Pouliguen, la CCI s’adapte à ces grandes mutations.
Les ports de plaisance ont perdu de leur superbe. L’ère de la saturation généralisée semble révolue, plus besoin de patienter une décennie pour obtenir le précieux anneau. « C’est un constat national. En Bretagne, à l’exception des ports à très haut niveau de service, ouverts 24h/24, ou les plus attractifs comme St-malo, les listes d’attente ont fondu. Certains n’en ont même plus », témoigne Emmanuel Jahan, directeur des ports et de l’économie littorale à la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) Nantes/st-nazaire.
- 35 % d’inscrits
Entre 2012 et 2016, les ports gérés par la CCI ont constaté une baisse de 35% des inscrits. Désormais, il faut compter entre 3 et 8 ans, selon la taille des bateaux, pour obtenir une place à Piriac-sur-mer, entre 2 et 5 pour La Baule/le Pouliguen. Quant au port d’échouage de Pornichet, « il y a 25 emplacements de libre. C’était plein il y a encore deux ans. Cela pourrait finir par devenir inquiétant », estime Emmanuel Jahan. Même si ces trois structures sont dépendantes des marées, que le chenal du Pouliguen souffre d’un déficit de tirant d’eau lié à l’envasement, elles bénéficient d’un « superbe bassin de navigation dans une baie abritée », de coins de pêche réputés, et de la proximité des iles, Hoedic, Houat ou Noirmoutier. Mais les vents tournent et les ports doivent changer. « Jusqu’à présent, on n’avait pas besoin d’aller chercher des clients, ils frappaient à la porte. Nous devons savoir maintenant répondre à leurs besoins, passer de gestionnaire à prestataire de services », avance Emmanuel Jahan. La CCI teste cet été de nouvelles offres pour faciliter la vie d’usagers moins expérimentés et guère enclins à se compliquer la vie avec les taches périphériques : location de matériel, ménage, livraison de course. « L’objectif c’est de proposer un package complet l’année prochaine. Cela implique que tout l’écosystème local joue le jeu. » Autre nouveauté au Pouliguen, le dispositif O’quai qui propose de s’épargner les manoeuvres délicates d’entrée et de sortie du port. La CCI travaille également avec des chantiers navals locaux pour développer en 2017 des places en port à sec sur le secteur La Baule/le Pouliguen. « Le bateau s’abime moins, et il est mis à l’eau au besoin. » Le grand défi, à plus long terme, c’est bien la démocratisation des ports de plaisance. Les propriétaires sont de plus en plus âgés, et les nouvelles générations ne veulent plus engager des dépenses somptuaires dans le nautisme.
Plus de locations
Si le nombre de permis augmentent, les achats de bateaux baissent. La plaisance n’échappe pas à « l’uberisation ». Commencent déjà à fleurir sur Internet des annonces de locations entre particuliers, type Airbnb. Emmanuel Jahan doute de la généralisation du système : « les gens ont un rapport presque affectif à leur bateau, ils le chouchoutent. Le confier à des inconnus ce n’est pas évident. » Des entreprises, comme la toute nouvelle start’up nantaise Share my sea, se lancent sur le créneau du Blablacar en mer : un bateau partagé, des promenades où chacun participe aux frais. Mais c’est bien la location, déjà possible à Pornichet et au Pouliguen, qui est amenée à se développer. « Je crois beaucoup aux « boat club », comme cela existe aux Etats-unis. Avec un abonnement à la carte, on peut louer des bateaux dans différents ports, le prendre dans un, puis le laisser dans un autre. » Un peu comme pour les voitures. A la CCI, la réflexion est amorcée.