Partie de la Presqu’île, l’affaire de drogue épingle d’autres trafics : jusqu’à quatre ans de prison
Parti de violences sur dette de drogue, le dossier s’est rapidement étoffé. Sept hommes et deux femmes ont comparu les 11 et 12 décembre devant le tribunal correctionnel de Saint-Nazaire. Tous ont été condamnés.
Le 18 janvier 2022, alors qu’il vit chez sa grand-mère de 92 ans, à Piriac-sur-Mer, un toxicomane reçoit la visite de deux hommes, dont un mineur. Ils viennent récupérer une dette de 6 000€. Un copain, présent lors de cette tentative d’extorsion, saisit un pistolet d’alarme et les met en fuite. Le mineur arrache un panneau de signalisation et violente le copain. Mal lui en a pris, « c’est son ADN relevé sur cette arme » qui l’a confondu et a permis de remonter jusqu’à son complice, un homme de 26 ans. De fil en aiguille, dix personnes ont été poursuivies. Quatre hommes sont détenus depuis fin octobre 2022.
« Voir des filles et jouer au casino »
En fait, le jeune Piriacais était chargé de revendre 300 g d’héroïne, soit 6 000€, mais aurait préféré... « en faire sa consommation personnelle ». Les enquêteurs de la brigade de recherche de Saint-Nazaire se sont livrés « à des investigations approfondies », ce qui a permis de remonter sur des affaires dans l’affaire. Après s’être intéressés à la géolocalisation du véhicule et aux écoutes téléphoniques du majeur (soupçonné d’un trafic de stupéfiants partant de son bar à chicha, en centreville de Saint-Nazaire, et d’un lieu de stockage, rue Paul-Bert à Penhoët), en 2021 et 2022, ils ont interpellé cet homme de 26 ans et son ex-compagne, et ensuite deux Havrais, deux Angevins, deux Nazairiens et un Herbignacais. Les prévenus ont fait face au tribunal correctionnel nazairien les 11 et 12 décembre.
Le bar à chicha, le prévenu déclare l’avoir acquis grâce aux 10 000€ prêtés par la mère de sa fille de cinq ans (voir encadré) avec qui il a vécu entre fin 2017 et janvier 2021. « Ma seule erreur, dira-t-il à l’audience, c’est de l’avoir remboursée en espèces. Je regrette ».
Le Piriacais ayant répertorié le nom d’un autre fournisseur, les enquêteurs se sont dirigés vers le Havre, s’intéressant aux allers et retours, plus ou moins brefs, d’un homme de 29 ans, qui se faisait conduire par un ami de 24 ans, sous le coup d’une suspension de permis et d’une interdiction de paraître en Loire-Atlantique. Incarcérés, ils devaient répondre de livraisons de stupéfiants, principalement d’héroïne, à deux consommateurs de 47 ans, résidant dans le quartier nazairien de Prézégat. Leurs motifs de déplacements : « voir des filles, aller au casino, faire la fête »... ont fait hausser les sourcils des juges.
Le plus jeune, incarcéré à Angers, a répété à plusieurs reprises : « C’était pour me changer du quotidien ». Alors que son codétenu affirme « qu’ils venaient seulement récupérer de l’argent pour épurer une dette ». L’avocat de ce dernier, Me Sobieslaw Benmoussat, a d’abord souligné son passage aux aveux immédiat, insistant sur « les nombreux éléments manquants ». Son client est condamné à trois ans de prison. De même que son chauffeur, assisté de Me Guillaume Herzog : « Ce dossier concerne une multitude de trafics qui n’ont pas ou peu de lien entre eux. La démonstration du rôle de mon client est bien faible ».
« Flagrant manque de preuves »
À ses yeux, le procureur n’a parlé de la séquestration du quadragénaire de Prézégat dans une cave « que pour justifier les quatre années de prison requises ».
L’autre habitant de ce quartier, admet avoir menti en garde à vue : « Ils m’ont cassé trois côtes, j’ai dit que j’avais juste à récupérer l’argent et l’envoyer, c’est faux, j’ai tout inventé pour sortir, je souffrais trop ». Il a été condamné à trois ans dont deux avec sursis probatoire.
C’est à partir du téléphone du plus jeune Havrais, qu’apparaissent les Angevins. Le plus fortement impliqué sera jugé le 13 février. Son ex-compagne s’est expliquée (voir encadré). Le troisième, 23 ans, avait une dette de 3 000€. Il était assisté de Me Alicia Pla : « Une peine de trois ans, dont deux ferme, n’a aucun sens pour quelqu’un obligé de faire le planton au bas d’un immeuble du quartier de la Rosière ou à la gare d’Angers... et qui a fait un bénéfice d’environ 200€ en quelques mois », appuyaitelle. Il est condamné à trois ans dont un avec sursis probatoire.
En ce qui concerne le gérant du bar à chicha, Me Sami Khankhan a longuement appuyé sur « le manque essentiel de preuves », estomaqué de voir que son client qui travaille, qui n’a qu’une faible condamnation à son casier judiciaire, qui n’est poursuivi que sur les seules déclarations du Piriacais, « serait à la tête de cette affaire ». Sa plaidoirie de relaxe n’a pas été entendue. Son client, incarcéré à Rennes, a pris quatre ans.
Défendu par Me Eve Poterie,
le quadragénaire de Prézégat, détenu quelque temps dans une cave, a exprimé être sous pression, tant à l’extérieur qu’à Vannes où il est incarcéré : « Je ne suis pas allé en promenade depuis trois mois ». Son avocate a décrit un « être hyper fragile, toxicomane de longue date, qui prenait des amendes parce qu’il ne payait pas ses dettes, qui revendait seulement à trois clients... ». Elle a souligné qu’il se soigne « et veut s’en sortir, notamment pour son fils ». En lui signifiant qu’il est condamné à 36 mois dont la moitié avec sursis probatoire, la présidente lui a conseillé de se faire oublier à Saint-Nazaire.
L’Herbignacais de 43 ans, relaxé pour la cession, a été condamné à douze mois avec sursis simple.
Les peines de prison, de même que les amendes, sont inférieures à celles requises par le procureur, Jean-François Héry. Tous les protagonistes sont interdits de contact entre eux. Certains sont interdits de paraître dans le département.