Coup de Trafalgar : ils encouraient jusqu’à dix ans de prison, mais ressortent libres de leur procès
Quatre hommes et une femme, âgés de 30 à 52 ans, comparaissaient devant le tribunal de Saint-Nazaire mardi 16 janvier, pour répondre d’une série de vols commis fin 2022. Un vice soulevé par deux avocats a renvoyé l’affaire au ministère public.
Une cinquantaine de personnes étaient venues soutenir les six prévenus, dont quatre détenus : trois depuis fin novembre 2022, un depuis janvier 2023. Un cinquième a été incarcéré de novembre 2022 à avril 2023. Placé sous contrôle judiciaire, il s’est présenté libre. C’était aussi le cas de l’épouse d’un détenu. Ils ont tous un lien de parenté.
29 condamnations au casier
Dès le début de l’audience, l’avocat du plus jeune (douze mentions au casier), Me Sobieslaw
Benmoussah, et le conseil de sa belle-soeur, Me Sabrina Demane (2 mentions), soulevaient des conclusions de nullité et demandaient le renvoi du dossier au ministère public. Conclusions qu’ils avaient adressées aux magistrats à dix heures le matin même. La présidente, jugeant alors une affaire de stupéfiants, ne pouvait s’y intéresser sérieusement.
Les conseils précisaient qu’après les réquisitions de renvoi du parquet, « les avocats ont le droit de faire des observations devant être intégrées dans l’ordonnance et ne pas se contenter d’y mettre un visa ». Or, dira Me Benmoussat : «Ici, l’ordonnance de renvoi apparaît comme un copiécollé du réquisitoire établi par le magistrat instructeur ».
Sa consoeur avait demandé un non-lieu pour l’épouse du détenu aux 29 condamnations, du fait que « l’on ne voyait pas d’éléments à charge dans cette ordonnance ».
« Tenez-vous tranquilles »
Les prévenus devaient répondre de vols de cartouches de cigarettes dans des bureaux de tabac, de véhicules faussement immatriculés, d’un camion chargé de cargaison… Ils ont sévi à Prinquiau, La Turballe, Drefféac, La Chapelle-Launay, mais aussi dans le Morbihan et le Finistère, entre le 17 et le 24 novembre 2022. Quelques jours plus tard, ils étaient interpellés. Aucun n’a reconnu les faits, excepté celui qui comparaissait libre.
La présidente les a mis en garde : « Les faits sont très graves. Certains encourent jusqu’à dix ans. Il y a 99,9 % de probabilité que l’on se revoit. Alors, tenez-vous tranquilles ». Tandis que les rires et les applaudissements commençaient à fuser dans la salle, la juge a calmé le jeu : « Stop ! »
Deux victimes seulement étaient présentes.
Les réquisitions suivies
Lors de l’audience, le procureur, Kevin Le fur, a reconnu la faille dans la procédure. Après un certain temps de délibération, le tribunal a suivi ses réquisitions : « les six prévenus doivent être libérés. Le dossier est renvoyé à Nantes aux fins de régularisation ».
Initialement, l’affaire devait être jugée aux Assises. Si elle a été correctionnalisée, c’est à cause de l’encombrement de dossiers. Or, en correctionnelle, la détention provisoire ne peut dépasser un an.
À l’issue de l’audience, dans la salle des pas perdus, les commentaires allaient bon train. En tendant un peu l’oreille, on entendait un avocat « saluer l’honnêteté de la présidente et du procureur », une parente des prévenus dire : « Vous avez vu la tête de la victime!», et un auditeur : «Ça nous coûte cher, cette affaire ».