L’Écho de la Presqu’île (SN)

Des pêcheurs à quai pendant un mois

Sept bateaux de pêche sont à quai jusqu’au 20 février. Les profession­nels sont sujets à un arrêté du Conseil d’État qui vise la réduction des captures accidentel­les de dauphins.

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« On se comporte comme de bons élèves depuis des années et on nous met encore plus la tête sous l’eau. » À la barre de son Nausicaa, le plus grand chalutier de La Turballe (25 mètres), Romain Jouan, 32 ans, a du mal à entrevoir l’horizon.

Le 22 décembre, il a reçu «comme un coup de massue » l’arrêté d’interdicti­on de pêche pris par le Conseil d’État. Cela oblige tous les bateaux de plus de huit mètres équipés d’un certain type de filets à rester à quai du 22 janvier au 20 février. Cette décision, prise pour « réduire les captures accidentel­les de petits cétacés » (et notamment des dauphins), fait effet sur tout le golfe de Gascogne. C’est une première depuis 1945. À La Turballe et au Croisic, une trentaine de marins sont concernés.

Changer de technique de pêche

Le crachin breton est de sortie ce mardi matin sur le port de La Turballe. Romain Jouan, patron armateur, observe avec envie ses collègues membres des équipages de chalutiers de fond qui préparent leurs filets. Ce Turballais de naissance, ne comprend pas : « Ça fait 25 ans qu’on subit des baisses de quotas, et des fermetures de pêcherie pour donner un coup de boost à certaines population­s, des solutions avaient été trouvées, mais rien n’y fait ».

Lui, dont 70 % de l’activité provient du « pélagique », une technique de pêche en surface ou à mi-hauteur, espérait que l’installati­on de caméras à bord ou l’achat de répulsifs à dauphins suffirait à satisfaire le Conseil d’État, mais il n’en est rien. Il envisage donc de « sortir faire du chalut de fond, une pêche qui consiste à racler les fonds marins avec des filets, pour deux semaines» même si, « cela coûte deux fois plus cher en gasoil. » Pendant cette parenthèse, l’équipage du Nausicaa ne remontera plus de merlus, d’anchois, ou de thons, mais plutôt des sèches, des encornets, et tous les autres « poissons des mers sales. »

«Pas le temps de tester les alternativ­es»

Au Croisic, à 16 kilomètres au sud, la problémati­que est la même pour Jérôme Debec, propriétai­re du seul caseyeur fileyeur impacté par l’arrêté : «La période est propice à la pêche de la sole, qui représente une partie importante de notre activité. En restant à quai, on renonce à 20 % de notre chiffre d’affaires », regrette-t-il avant d’affirmer « n’avoir jamais pêché aucun dauphin dans des filets à sole en 20 ans. »

De son côté, Romain recense «seulement deux dauphins remontés en moyenne sur les 300 jours annuels passés en mer »

La nouvelle est « d’autant plus incompréhe­nsible pour lui » qu’il avait commencé à s’équiper de répulsifs à dauphins : «On nous demande de chercher des alternativ­es, mais on ne nous laisse même pas le temps de les tester. »

«Notre métier c’est d’aller sur l’eau»

Les pêcheurs ligériens regrettent que cette décision, qui sera effective à chaque début d’année jusqu’en 2026, ait été officialis­ée fin décembre, deux semaines avant sa mise en place. « On était tous les pieds sous le sapin, on s’est retrouvés découragés une semaine après, n’ayant pas de puissants syndicats derrière nous, on espérait que le comité de pêche régional puisse nous accompagne­r, mais ça n’a pas été le cas », affirme Romain Jouan.

Les marins attendent maintenant d’obtenir les aides européenne­s promises qui doivent leur permettre de combler 80 % de leur perte. Aucune informatio­n concernant la date de réception de ces milliers d’euros de dédommagem­ents ne leur a été transmise. Ils s’accordent tous les deux pour affirmer « Notre métier c’est d’aller sur l’eau, on veut vivre de ça, pas des subvention­s ».

Le prix du poisson impacté

Pour Sébastien Vogne, responsabl­e du port de la pêche de la Turballe, c’est la mesure de trop : « Ça s’ajoute aux années Covid, à l’augmentati­on de l’énergie, je pense qu’ils ne mesurent pas les conséquenc­es que ça peut avoir », tonne-t-il. Le responsabl­e l’annonce «Il y aura moins de ventes, moins de revenus, moins de volume en criée, ça va engendrer une hausse du prix du poisson». Sylvie Le Bec, directrice de la LAPP44, société en charge des ports de pêche du Croisic et de La Turballe, s’inquiète elle aussi : « On peut avoir des pertes de marché à cause de ça puisque les entreprise­s peuvent se tourner vers d’autres approvisio­nnements étrangers ».

Pour faire entendre leur mécontente­ment, des marins turballais ont manifesté aux côtés des agriculteu­rs le 25 janvier à Rennes et prévoient de se rendre à Paris le 2 ou 3 février.

La plaque retrouve sa place

Samedi 20 janvier, une cérémonie à l’hôtel de ville de La Baule a rendu hommage à Olivier Guichard à l’occasion des 20 ans de sa disparitio­n.

Pour marquer l’événement, a été dévoilé un bas-relief en bronze représenta­nt l’ancien ministre et maire de La Baule (lire page 28). Mais la cérémonie a été également l’occasion de remettre la plaque inaugurale de l’hôtel de ville qui avait été mystérieus­ement enlevé… L’inaugurati­on de cette nouvelle mairie à l’architectu­re très moderne avait eu lieu le 4 décembre 1974 en présence, bien sûr, d’Olivier Guichard, mais aussi de Michel Poniatowsk­i, alors ministre de l’Intérieur.

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